Série (5/5) : « Les spin-offs esquissent le futur »
L’expérience est sensorielle. Sept machines imaginaires sont représentées sur un grand mur en bois. Il suffit de les toucher pour que ces dessins prennent vie : sous les doigts, le bois s’anime par la production de mélodies et de vidéos.
Cette œuvre numérique, présentée au musée des sciences le Pass, est une réalisation de la société Hovertone. Cette spin-off de l’Université de Mons née en 2016 se distingue aujourd’hui en tant qu’agence de design « d’interactions technologiques ».
« Nous proposons à nos clients, principalement des musées, des expériences où le visiteur peut interagir avec le sujet exposé. Le but est de susciter l’intérêt du public », indique Nicolas d’Alessandro, docteur en sciences de l’ingénieur et fondateur de la spin-off.
« Le chant des machines », une expérience unique
« L’expérience présentée au PASS est en réalité un gigantesque écran tactile de 40 m². C’est la plus grande surface tactile d’Europe. Pour parvenir à cela, nous avons développé un revêtement avec des capteurs, que l’on a tapissé sur des panneaux en bois. Ceux-ci ont ensuite été assemblés et fixés dans l’espace muséal. On voulait proposer une expérience tactile et musicale unique », développe cet ancien chercheur de l’Institut pour les technologies créatives de l’UMONS.
Les technologies tactiles et la musique se trouvent être deux piliers fondateurs de la start-up : « Initialement, en lançant cette spin-off avec ma collègue Joëlle Tilmanne, on envisageait de vendre un instrument de musique numérique que j’avais créé durant ma thèse », explique le Dr. d’Alessandro.
Alors que sa recherche se concentrait sur l’acoustique de la voix de synthèse, il développa une nouvelle application de voix chantée sous forme de synthétiseur numérique.
« Mais quand nous avons créé Hovertone, sur fonds propres, le marché des applications mobiles était déjà bien fourni. Nous avons rebondi en exploitant nos compétences dans les technologies interactives. Dès 2017, nous nous sommes spécialisés comme designers d’expériences interactives ».
Scientifiques et musées des sciences, un duo naturel
L’entreprise compte aujourd’hui deux autres employés et des clients comme le PASS ou encore la Cité des Sciences de Paris.
Les espaces muséaux seraient en phase d’évolution, cherchant à mieux attirer le public en modifiant leurs discours et offrant aux visiteurs une expérience davantage participative. Le numérique représente un outil pertinent dans ce processus.
Les applications de l’entreprise Hovertone se sont ainsi rapidement fait une place dans le monde des expositions scientifiques : « Nous avons finalement peu de concurrents. C’est un secteur de niche. Nous travaillons principalement pour des musées de sciences. Venant à la base du monde scientifique, nous discutons facilement des thématiques à aborder dans l’exposition et restons très rigoureux sur le contenu à valoriser », précise Nicolas d’Alessandro.
L’autre atout de la société ? Développer ses propres technologies permettant de réaliser des expériences uniques et sur-mesure. La start-up possède ainsi un espace de laboratoire et de prototypage. Des collaborations se profilent par ailleurs avec l’UMons.
« Au-delà de cette activité de recherche, je pense que notre force est aussi d’avoir 10 ans d’expérience derrière nous. On connaît les rouages de la recherche, on sait comment elle fonctionne, quels sont les pièges à éviter, et évaluer ce qui est réalisable ou non pour nos clients ».
Piétiner le tableau périodique de Mendeleïev
L’équipe de Hovertone mène en ce moment un projet de recherche sur le tableau périodique de Mendeleïev pour le PASS. Il s’agit de développer un système de captation au sol. « L’idée est que le tableau soit représenté par terre. Les visiteurs pourraient alors sauter sur les cases des éléments », s’enthousiasme Nicolas D’Alessandro.
Si l’entrepreneur ne considère pas l’idée de se relancer dans la recherche académique, il envisage néanmoins la possibilité de revenir à l’université pour partager son expérience : « Notre spin-off est encore jeune. Mais d’ici 10 ans, je pense que je voudrais transmettre mes connaissances, mon vécu. Passer dans l’entreprenariat, c’est avoir du jour au lendemain 1500 choses à faire. C’est un défi pour n’importe qui ». Sans accompagnement, comme celui proposé par les incubateurs, il confie qu’il aurait été très difficile de lancer cette start-up. Elle a, par ailleurs, été soutenue financièrement par le programme First Spin-off de 2012 à 2015.