Plage d'Ostende

Les barres sableuses protectrices des plages belges, sous la loupe

24 janvier 2022
par Laetitia Theunis
Durée de lecture : 5 min

Essentielles à la pratique des loisirs nautiques et au tourisme, ainsi qu’à la protection des rivages contre les tempêtes et les ouragans, les plages de sable occupent près d’un tiers des côtes mondiales. Mais, quelle que soit leur latitude, sous l’influence néfaste des activités humaines et du changement climatique, plus de 70 % d’entre elles subissent de plein fouet le phénomène d’érosion. A tel point que d’ici à 2100, le littoral pourrait avoir reculé, en moyenne et dans le monde, de 35 à 240 mètres.

La mer du Nord ne fait pas figure d’exception. Afin de pouvoir prendre des mesures de protection éclairées, il est fondamental de comprendre les éléments qui influencent la dynamique spatiale et temporelle de ses plages. Dans le cadre du projet RS4Mody, qui s’est clôturé récemment, des chercheurs de l’UCLouvain, de la VUB et du VITO ont ainsi pris leurs quartiers sur la plage de Groenendijk à Coxyde.

Barres sableuses au large de Coxyde © RS4Mody – Cliquez pour agrandir

Des barres de sable protectrices

Sur la côte belge, l’amplitude de marée est forte. En effet, il y a plus de 4 mètres entre la marée la plus haute et la plus basse. Ce type de zone côtière, qualifiée de macrotidale, est caractérisée par la présence de barres intertidales. Il s’agit de bancs de sable disposés parallèlement au rivage.

Ces structures jouent un rôle primordial contre l’érosion, due aux tempêtes, de la plage qu’elles longent. Et ce, en réduisant l’énergie des vagues atteignant le rivage.

« La morphodynamique de ces systèmes de barres est principalement contrôlée par des forçages externes tels que le niveau d’eau et l’énergie incidente des vagues », expliquent les chercheurs, coordonnés par Margaret Chen, professeure d’hydrologie et de génie hydraulique à la Vrije Universiteit Brussel (VUB).

Régions microtidales, mésotidales et macrotidales © aquaportail – Cliquez pour agrandir

Comportement sur le long terme

Il existe peu d’informations sur leurs caractéristiques à grande échelle, soit sur plus d’un kilomètre. De plus, « en raison des nombreux défis associés à un environnement dynamique, la plupart des études sur la morphodynamique des barres intertidales se concentrent sur le court terme, avec des observations à l’échelle d’une journée, d’une semaine ou parfois d’un mois. »

Le projet RS4Mody tente de comparer la morphodynamique des barres à différentes échelles de temps. En effet, en sus d’une investigation du comportement et de l’évolution morphologique d’une plage macrotidale à barres sableuses sur le court terme, il l’a réalisée sur plus de 25 ans.

Roses annuelles des vents et des vagues de 2000 à 2019 © RS4Mody – Cliquez pour agrandir

Pour ce faire, les chercheurs ont compilé et analysé des photos aériennes et de terrain, des cartes, la littérature émanant depuis 1990 ainsi que des données aériennes LidAR (méthode de télédétection et de télémétrie semblable au radar, mais qui émet des impulsions de lumière infrarouge, au lieu d’ondes radio, puis en mesure le temps de retour après avoir été réfléchies sur des objets à proximité).

Cela leur a permis d’analyser les rôles relatifs des différents facteurs météorologiques et marins qui influencent le comportement et l’évolution des barres sableuses. A savoir, notamment, la vitesse et la direction du vent, les caractéristiques des vagues, le niveau de l’eau.

Concernant les analyses à court terme, soit juste avant et juste après une tempête, ainsi qu’un mois plus tard , les chercheurs ont utilisé des informations récoltées par drones équipés d’une caméra multispectrale et par des campagnes aériennes LiDAR.

Modèle numérique d’élévation (MNE) avant et après une tempête © RS4Mody – Cliquez pour agrandir

Un modèle pour davantage de sécurité côtière

La zone d’étude, située le long du rivage de Groenendijk à Coxyde, s’est étendue sur 1,3 kilomètre de long et 0,5 kilomètre de large.

« Les données historiques LiDAR aériennes à haute résolution spatiale ont fourni des détails sur les changements morphologiques à long terme. Quant aux campagnes de vols de drones équipés de caméras à haute résolution, elles ont été réalisées avant et après une tempête afin d’en évaluer l’impact, ainsi que la dynamique de récupération des barres », explique Pre Chen.

« Un suivi hydrodynamique avec des analyses des sédiments et des structures internes des barres sableuses a également été effectué. Et ce, afin de développer et de mettre en œuvre un modèle conceptuel de la morphodynamique des plages à barres macrotidales qui incorpore les facteurs impactants et les caractéristiques des sédiments à court et à long terme », poursuit-elle.

Le modèle développé au cours de ce projet financé par Belspo (politique scientifique fédérale) dans le cadre de son programme STEREO III, permet de prédire dans le temps l’évolution des caractéristiques morphologiques intégrées de la plage. De quoi fournir des informations utiles aux autorités en charge de la gestion et de la sécurité des zones côtières.

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