Le satellite européen d’astrométrie Gaia, qui vogue dans l’espace à 1,5 million de kilomètres de la Terre depuis quatre ans, vient de permettre une exceptionnelle cartographie en trois dimensions de plus d’un milliard d’étoiles situées dans notre galaxie. Un exploit!
Il s’agit de la carte du ciel la plus précise jamais réalisée à ce jour. Une belle avancée à laquelle plusieurs équipes d’astronomes belges ont activement participé. On retrouve en effet au sein de l’équipe internationale impliquée dans ce projets des chercheurs de l’ULB, l’ULiège, la KULeuven ou encore de l’Observatoire royal de Belgique et de l’Université d’Anvers.
Positions, luminosité, mouvements sont scrutés attentivement
Gaia est une mission scientifique de l’Agence spatiale européenne (ESA). L’engin de deux tonnes, qui a été déposé au point de Lagrange L2, un point en orbite terrestre particulièrement stable, observe le ciel depuis juillet 2014. Son objectif: créer la carte 3D de notre galaxie la plus précise possible en observant plus d’un milliard d’étoiles. Cela inclut non seulement les positions et mouvements des étoiles, mais aussi d’autres paramètres astronomiques telles leur magnitude (leur « luminosité »), leurs couleurs ou encore leur température.
Gaia cartographie aussi d’autres astres par exemple les objets du système solaire (astéroïdes, comètes et satellites naturels), les galaxies et les quasars. Le satellite scientifique doit aussi pouvoir détecter de nouvelles exoplanètes.
Les chercheurs belges aux commandes
Le Dr Dimitri Pourbaix (ULB) est un des piliers belges de cette mission scientifique spatiale européenne. Il en fait partie depuis ses débuts. « Alors que la mission Gaia n’était qu’un concept sur papier », dit-il. Le Dr Pourbaix est l’investigateur principal belge de cette ambitieuse mission.
En plus de la coordination belge du projet Gaia, il dirige aussi la partie du consortium de traitement de données de Gaia (Gaia Data Processing and Analysis Consortium) en charge du traitement des données des objets.
Collaboration de l’ULiège et de l’Observatoire sur les vitesses radiales
De son côté, l’Observatoire royal de Belgique calcule un aspect important du mouvement des étoiles : la vitesse à laquelle une étoile se rapproche ou s’éloigne de nous. C’est ce que les scientifiques appellent « la vitesse radiale de l’étoile ».
L’Observatoire contribue aussi au traitement de données liées aux astéroïdes. Le catalogue actuel de Gaia contient les positions précises de plus de 14.000 astéroïdes.
À Liège, c’est à l’Institut STARS que se situent les chercheurs impliqués dans le projet. Ils ont collaboré aux mesures des vitesses radiales des étoiles observées par le Spectromètre de Vitesse Radiale (Radial Velocity Spectrometer), un instrument à bord du satellite Gaia.
Ces vitesses permettent de mieux comprendre comment les étoiles se déplacent autour de notre galaxie. « Un domaine spécifique de l’équipe de Liège pour ce présent catalogue est la séparation des objets observés en deux catégories : les étoiles simples et les étoiles multiples», explique Dr Gosset, responsable de la chaîne spectroscopique d’étoiles multiples dans le projet Gaia.
« Les étoiles multiples sont des objets qui sont dans des systèmes d’étoiles binaires ou multiples. L’équipe de Liège s’intéresse aux systèmes binaires en tant que tels, mais, pour ce présent catalogue, le but est limité à la reconnaissance des systèmes multiples afin de les éliminer du traitement spectroscopique. Cela nous permettra de livrer un catalogue final avec des objets bien définis.
À l’Institut d’Astronomie de la KULeuven, les partenaires du projet dirigent l’équipe qui se charge de la classification des étoiles variables détectées par Gaia. Les étoiles variables sont des astres qui présentent des variations de luminosité à cause de modifications périodiques de leur taille et de leur température.
Les chercheurs de l’université d’Anvers, de leur côté, ont contribué aux mesures des vitesses radiales et à l’étude de la variabilité stellaire.
Reconstruire l’histoire de la galaxie
Les données astrométriques de Gaia sont intéressantes à plus d’un titre. Elles constituent un vivier d’informations de grande qualité qui va permettre aux scientifiques d’en apprendre davantage sur la structure, l’histoire et même l’évolution de notre galaxie, la Voie lactée. Le présent catalogue de Gaia contient aussi des mesures des vitesses et des directions des mouvements des étoiles durant leur trajet autour du centre de notre galaxie.
Grâce à cela, les astronomes pourront étudier la rotation de la Voie lactée. Ils pourront aussi retracer le parcours de chacune de ces étoiles sur plusieurs millions d’années dans le passé et prédire leurs trajectoires futures. Ainsi, ils pourront modéliser l’évolution de la forme des constellations stellaires au cours du temps.
Chose exceptionnelle dans cette nouvelle carte : elle inclut les distances des étoiles, ce qui en fait un gigantesque atlas en trois dimensions. Les distances des étoiles sont connues pour être difficiles à estimer. En effet, l’univers est vaste : l’étoile la plus proche du Soleil se situe 40.000 milliards de kilomètres. Gaia est capable de mesurer les distances d’étoiles qui sont plus de cinq mille fois plus éloignées.
D’autres catalogues Gaia en gestation
La très grande quantité que données produites par Gaia (plus d’un million de Gigabytes pour toute la mission), nécessite une énorme puissance de calcul et une expertise scientifique internationale étendue.
Des équipes de scientifiques travaillent sur différentes parties des données de Gaia ou sur des logiciels construits pour traiter ces données. Les résultats de ces traitements sont diffusés partiellement à des moments donnés, chaque nouvelle diffusion contenant plus de données et de découvertes que la précédente.
Une première diffusion de données mineure avait eu lieu le 14 septembre 2016. La diffusion actuelle, la seconde diffusion de données de Gaia, contient non seulement les distances de plus d’un milliard d’étoiles, mais aussi de nouvelles informations telles que les vitesses radiales des étoiles, leur température, couleurs, diamètres et luminosité, ainsi qu’un inventaire d’astéroïdes. La troisième diffusion de données aura probablement lieu au début des années 2020.