D'ici début juillet, toutes les vaches du territoire doivent être vaccinées contre la maladie de la langue bleue et la maladie hémorragique épizootique © Laetitia Theunis

Vacciner ovins et bovins pour endiguer l’épidémie de langue bleue

26 mars 2025
par Laetitia Theunis
Temps de lecture : 5 minutes

D’ici le 1er juillet 2025, tous les moutons (ovins) nés avant le 31 décembre 2024 devront être vaccinés  contre les sérotypes 3 et 8 de la maladie de la langue bleue (FCO3 et FCO8), aussi appelée fièvre catarrhale ovine. Les vaches (bovins) devront en sus être vaccinées contre la MHE (maladie hémorragique épizootique). L’ancien gouvernement fédéral a débloqué un budget de 40 millions d’euros pour financer cette massive campagne de vaccination obligatoire et soutenir les éleveurs. De quoi protéger les animaux des formes graves de ces maladies et limiter au maximum le coup dur financier.

Comme une traînée de poudre

En octobre 2023, un premier foyer de langue bleue, aussi appelée fièvre catarrhale ovine (FCO), a été découvert dans une exploitation de la province d’Anvers. Depuis, l’épidémie s’est répandue rapidement à l’ensemble du pays. Elle affecte les ruminants d’élevage, principalement les bovins, mais aussi les ovins (moutons), les caprins (chèvres), les camélidés (alpaguas) ; et les ruminants sauvages (cerfs).

La maladie de la langue bleue est causée par un virus qui comprend 26 sérotypes (ou souches) différents. C’est le sérotype 3 (FCO3) qui a été détecté en Belgique à l’automne 2023. Un foyer de ce sérotype a été signalé aux Pays-Bas le 3 septembre 2023, où le virus s’est rapidement répandu à travers le pays avant d’atteindre notre territoire. Au préalable de cette épizootie néerlandaise, ce sérotype n’avait jamais été détecté en Europe de l’Ouest, à l’exception de quelques cas en Sardaigne et en Sicile en 2017.

«Quant au sérotype 8 (FCO8), il circule déjà en France et sa progression vers la Belgique est redoutée dès cet été », précise l’Union Professionnelle Vétérinaire (UPV).

Foyers de langue bleue en Belgique au 1er juin 2024 © Sciensano

Une maladie aux conséquences lourdes

Concernant la FCO3, les taux de mortalité et de morbidité sont alarmants. A la mi-septembre 2024, on dénombrait 23.000 ovins et 36.000 bovins morts des suites de la langue bleue depuis l’apparition du virus en Belgique. « Chez les ovins, 10 à 20 % des animaux tombent malades, avec un taux de mortalité pouvant atteindre 70 %! Chez les bovins, la mortalité est moindre (tout de même jusqu’à 10 % ), mais la maladie a des répercussions négatives majeures sur la reproduction des animaux (problèmes d’infertilité, NDLR), engendre un risque accru d’avortements ainsi qu’une diminution de la production laitière, entraînant des pertes économiques considérables. À titre de comparaison, les effets de la FCO3 sur le bétail sont bien plus dévastateurs que ceux du Covid-19 chez l’Homme », explique l’Union Professionnelle Vétérinaire.

La maladie de la langue bleue est une maladie vectorielle, transmise à un animal sain uniquement par la piqûre d’un moustique du genre Culicoïdes après que celui-ci ait piqué un animal malade. Originaires du Sud de l’Europe, ces insectes trouvent des conditions propices à leur développement en Belgique en raison du réchauffement climatique.

Un autre virus à l’horizon

Ils sont également responsables de la transmission de la maladie hémorragique épizootique (MHE) qui affecte les ruminants, avec une nette préférence pour les bovins et les cervidés. Chez ces derniers, la mortalité peut être très importante et atteindre 90 %!

Cette maladie, non transmissible à l’humain, est causée par l’orbivirus, un virus très proche de celui de la langue bleue responsable, chez les vaches, de symptômes similaires : fièvre, anorexie, écoulements dus à l’érosion de la cavité buccale et du mufle, boiterie, détresse respiratoire. Si elle est mortelle dans moins de 1 % des cas, elle impacte, par contre, négativement la production laitière et la reproduction. La grande majorité des animaux se rétablit au bout de quelques jours ou semaines de repos et de soins.

« Les autres ruminants, ovins (moutons) et caprins (chèvres) peuvent être porteurs du virus, mais ne présentent généralement pas de symptômes », mentionne le SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement.

Découvert pour la première fois aux États-Unis en 1955, le virus de la MHE s’est ensuite propagé en Asie, en Australie et en Afrique. Il a été identifié pour la première fois en Europe en 2022, d’abord en Italie, puis en Espagne. Actuellement, il n’est pas présent en Belgique. Toutefois, depuis septembre 2023 des foyers du sérotype 8 sont recensés dans le sud-ouest de la France. L’hypothèse la plus communément admise pour expliquer cette épizootie est le transport par le vent, depuis l’Afrique du Nord et sur de longues distances, de moucherons infectés par le virus, lesquels ont trouvé, dans leurs terres d’adoption, un environnement et un climat propices à leur survie et à leur développement.

Vaccination obligatoire

Dans le contexte du changement climatique, les autorités belges redoutent que cette maladie constitue dès cet été une menace pour les élevages belges. C’est pourquoi il est exigé des éleveurs qu’ils protègent leur cheptel, tant contre la MHE, que contre les FCO3 et FCO8, avant la pleine reprise d’activité des moustiques.

« Durant les deux premiers mois de l’année, en Wallonie, plus de 500 vétérinaires et éleveurs ont déjà réalisé 1.200.000 injections. A l’échelle de la Belgique, c’est le double», annonce l’Union Professionnelle Vétérinaire. « Les bovins nécessitant une protection contre les trois maladies, cela représente trois séries de deux injections par animal. » Quant aux ovins, ils ne reçoivent que deux doses, spécifiquement contre les deux sérotypes de la maladie de la langue bleue.

A noter enfin que ni la FCO ni la MHE n’affecte la qualité de la viande ou du lait. « Les produits d’origine animale (viande, lait) provenant d’animaux infectés restent parfaitement sûrs à consommer par l’humain et peuvent l’être sans crainte », rassurent l’UPV et le SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement.

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