Culture d'algues. © UNamur
Culture d'algues. © UNamur

Un écosystème pollué demande une grande biodiversité

26 septembre 2016
par Camille Stassart
Durée de lecture : 3 min

En écologie, on sait qu’un environnement stressé influence la biodiversité, laquelle peut à son tour avoir un impact sur l’écosystème. Un projet mené par quatre chercheurs de l’Université de Namur et de l’Université de Gand fait aujourd’hui progresser la connaissance sur le sujet.

 

Des algues stressées

 

Leur recherche s’intéresse à l’impact d’un environnement stressé sur un écosystème et les espèces qui le composent. Ce « stress environnemental » peut être de différentes natures : sécheresse ou salinisation des eaux par exemple. Dans le cas présent, le stress a été induit par l’ajout d’un herbicide, l’atrazine, dans un milieu aquatique. Aujourd’hui interdit en Europe, cet herbicide est toujours utilisé aux Etats-Unis.

 

« Nous avons utilisé ce produit chimique car c’est une substance que nous connaissons aujourd’hui très bien. On était donc certain qu’elle induirait un certain niveau de stress à l’environnement » explique Frédérik De Laender, professeur à l’Unité de Recherche en Biologie Environnementale et Evolutive de l’Unamur, et promoteur du projet.

 

Compétition entre espèces dans un environnement sain

 

L’étude a été réalisée sur des communautés de phytoplancton, des algues vivant en suspension dans l’eau. L’équipe a cultivé dix espèces différentes en laboratoire. « Nous avons par après composé plusieurs communautés en combinant entre-elles les dix espèces. D’abord par deux, puis par quatre, six et enfin en mêlant huit espèces différentes » indique le Pr. De Laender. Formant ainsi des microcosmes avec une grande biodiversité.

 

Dans certains de ces microcosmes, les scientifiques ont ajouté l’agent stressant sélectionné pour l’étude. Ce qui a permis de comparer des communautés saines à d’autres polluées.

 

Dans les microcosmes sains, les chercheurs ont noté que l’augmentation du nombre d’espèces a un effet négatif sur le fonctionnement de l’écosystème. « Plus on ajoutait d’espèces différentes au microcosme, plus elles entraient en compétition. Ce qui a eu pour conséquence d’affaiblir l’écosystème » explique le scientifique.

 

Modification des règles de compétition dans un environnement stressé

 

A contrario, l’équipe a observé dans les systèmes pollués un effet positif de la diversité des espèces. « L’effet positif de la biodiversité dans ces microcosmes s’explique facilement : plus on a d’espèces, plus on a de chances d’avoir une espèce tolérante à la pollution. Dans un écosystème comprenant seulement deux espèces, la probabilité d’en avoir une tolérante est plus faible comparé à une communauté de huit. Où on trouvera toujours une ou deux espèces qui supportent mieux l’agent stressant et qui supplanteront les plus faibles », développe le chercheur.

 

Ces résultats confirment pour la première fois une des grandes hypothèses de l’écologie théorique. À savoir que le rapport de force entre les espèces change lorsqu’un changement dans l’environnement stresse l’écosystème. « Si vous êtes une espèce en compétition avec votre voisin, et qu’un changement environnemental l’impacte et pas vous, le rapport compétitif changera, votre voisin étant plus faible dans ce nouvel environnement ».

 

L’écologie théorique, un axe de recherche d’avenir

 

Aujourd’hui, l’équipe de scientifiques s’attèle déjà à un autre projet portant sur les caractéristiques de diverses espèces d’algues. «  Et comment elles peuvent nous aider à prédire la façon dont la communauté va réagir face à un stress environnemental », précise le Pr De Laender.

 

Ces projets de recherches apportent beaucoup de choses au champ de l’écologie théorique. Un axe de recherches en plein essor et important pour l’avenir. « Si l’on veut utiliser l’écologie dans un contexte de gestion des écosystèmes et de gestion des ressources naturelles, il est plus qu’important de développer des outils et des modèles qui pourront prédire l’évolution de nos écosystèmes pour les années qui viennent » conclut Frédérik De Laender.

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