Covid-19 : jeunes et femmes davantage en détresse psychologique

27 janvier 2021
par Daily Science
Durée de lecture : 4 min

Depuis près d’un an, tous les aspects de la vie sociale ont été affectés par des mesures sanitaires – visites des personnes à domicile, modalités de travail, voyages, rencontres entre amis – d’une ampleur telle que l’on se trouve face à une expérimentation nationale sans précédent. Vincent Lorant, chercheur à l’Institut de recherche santé et société à l’UCLouvain et des collègues de l’Université d’Anvers se sont penchés sur l’impact de ces mesures sur la santé mentale de la population. 6337 personnes ont participé aux quatre temps de l’enquête « Covid et moi ». Un tiers d’entre eux a connu au moins trois épisodes de détresse entre mars et novembre 2020. Les plus jeunes et les femmes sont les plus touchés.

Méthode

Les chercheurs ont collecté des données à quatre reprises auprès des mêmes participants: en mars, trois jours après la mise en œuvre du premier confinement, en avril, au pic épidémique de la première vague, en juin, lors du déconfinement, et en novembre, lors de la deuxième vague.

La détresse psychologique a été mesurée à l’aide d’un outil validé scientifiquement (le General Health Questionnaire-12 items), permettant d’identifier les personnes à risque de détresse psychologique dans la population générale.

« Pour les analyses, nous avons utilisé des méthodes d’analyse statistique qui permettent de répartir les changements mesurés de détresse psychologique selon trois grandes sources :  la variation liée à la temporalité de l’épidémie (mars, avril, juin et novembre ; cela concerne tous les individus);  la variation intra-individuelle (liée à des caractéristiques personnelles changeantes de chaque individu, par exemple l’isolement ou l’exposition à la COVID-19);  et la variation inter-individuelle (liée à des caractéristiques stables tel que l’âge, le genre, la situation sociale, etc.) », mentionnent les chercheurs.

Près de la moitié des sondés en détresse psychologique

« Au début du confinement et pendant la première vague de la pandémie, 48% (mars) et 46% (avril) des individus étaient à risque de détresse psychologique tandis qu’avec le déconfinement, en juin, ce taux baissait à 32 % », explique le Pr Lorant.

« Lors de la reprise de l’épidémie et des mesures sanitaires plus strictes en novembre, la détresse psychologique touchait à nouveau 47% de la population. »

« Aux deux extrêmes, tout au long de la crise sanitaire, 27% des individus n’ont jamais atteint le seuil de de détresse psychologique tandis que 15% des répondants ont été en situation de détresse psychologique lors des quatre temps de l’enquête. »

Les vulnérabilités psychologiques oscillent fortement pour un individu donné d’une vague à l’autre, et pas nécessairement au même moment. De plus, différents individus présentent différentes vulnérabilités en lien avec des facteurs ne variant pas dans le temps.

Âge et genre

En investiguant l’âge et le genre, les scientifiques ont constaté que les femmes et les jeunes ont connu un plus grand nombre d’états de détresse psychologique entre mars et novembre.

La relation avec l’âge est très caractéristique et pratiquement linéaire : plus on est dans une tranche d’âge jeune, plus le nombre moyen d’épisodes de détresse psychologique entre mars et novembre est élevé.

« Les populations jeunes ont eu deux fois plus d’épisodes que les populations plus âgées. Les femmes ont en moyenne un demi-épisode en plus par rapport aux hommes », analyse le chercheur.

Plusieurs facteurs variants dans le temps ont été investigués, faisant apparaître que 24% des différences de détresse psychologiques s’expliquent par l’isolement, le faible support social et la fréquence des activités, contre moins de 1% pour l’exposition à la Covid-19.

De la nécessité d’être informé et aidé

Forts de leur analyse, les chercheurs suggèrent aux autorités de prendre deux grandes catégories de mesures pour contrer les effets néfastes des mesures de suppression : des mesures ’ciblées’ qui aident les publics plus vulnérables tout au long de la période et des mesures ‘à la carte’ qui permettent à différents individus d’obtenir de l’aide à certains moments.

« Lors de la deuxième vague d’enquête en avril, 43% de l’échantillon a, en effet, cliqué sur un lien pour obtenir des informations d’aide », concluent les chercheurs.

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