Le Pr Didier Viviers, archéologue et ancien recteur de l’Université Libre de Bruxelles, vient d’être élu Secrétaire Perpétuel de l’Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique. Une fonction qu’il occupera dès le 1er janvier prochain. Il succédera au Pr Hervé Hasquin. Rencontre.
Pr Viviers, vous succédez au Pr Hasquin à la tête de l’Académie royale de Belgique, lui aussi recteur honoraire de l’Université Libre de Bruxelles. Y a-t-il une mainmise de l’ULB sur cette institution?
Didier Viviers : Clairement non. Je constate que sur les quatre candidats à la fonction de Secrétaire Perpétuel de l’Académie, trois étaient issus de l’ULB. C’est le hasard des générations et des personnalités du moment.
La dynamique que l’Académie a connue sous l’impulsion de Hervé Hasquin rend ce mandat d’autant plus complexe et intéressant. Il impose des compétences de gestion, un carnet d’adresses et une pratique du milieu académique. Avant de présenter ma candidature, je m’étais renseigné auprès de confrères et de consœurs. Je me suis rendu compte que nombre d’entre eux n’étaient pas nécessairement disponibles ou qu’ils étaient sortis de la carrière.
Comment devient-on « Secrétaire Perpétuel » de l’Académie royale de Belgique ?
L’élection s’est déroulée en deux temps. Un premier vote a fait émerger deux candidats sur les quatre. Au second tour, j’ai été élu.
Plusieurs candidats s’étaient manifestés, cela a donné lieu à de passionnants débats sur la vision de chacun concernant l’Académie du XXIe siècle, une vision qui somme toute n’était pas diamétralement opposée. Chaque candidat doit être remercié pour sa contribution.
Ces débats ont également fait émerger des attentes que je m’efforcerai de faire éclore.
Vous êtes actuellement prorecteur de l’ULB, allez-vous pouvoir concilier cette fonction avec celle de Secrétaire Perpétuel de l’Académie?
Je vais me concentrer pleinement à l’Académie et quitterai donc mes diverses fonctions à l’université. Je souhaite simplement continuer à donner deux cours aux étudiants de première année (Histoire de l’Antiquité) et aux étudiants de maîtrise (Archéologie du paysage urbain). Cela ne me semble pas incompatible ni être une source potentielle de conflits d’intérêts avec mes nouvelles responsabilités. Ma volonté est clairement de dépasser le cadre de mon institution d’origine et de m’ouvrir à une dimension plus large, au service de tous.
Existe-t-il des clivages confessionnels au sein de l’Académie?
L’originalité de l’Académie, c’est qu’elle est multidisciplinaire. Elle regroupe des scientifiques, des chefs d’entreprises, des artistes, des personnes qui occupent des fonctions au sein de grandes institutions. Elle est pluraliste et entretient de nombreux liens avec des institutions culturelles. Donc non, il n’y a pas de clivage confessionnel en son sein. Maintenir ce pluralisme et cette multidisciplinarité est pour moi une priorité.
Secrétaire Perpétuel, c’est en réalité un mandat limité dans le temps…
En effet. Le mandat du Secrétaire Perpétuel est limité à cinq ans. Il peut être reconduit une fois. Il existe cependant une limite d’âge supérieure : 75 ans.
Quelles sont vos priorités pour l’Académie?
Le rôle d’une Académie du XXIe siècle, c’est de créer du lien. Il existe aujourd’hui une multitude d’institutions scientifiques et culturelles. Chacune œuvre dans son domaine. Il manque par contre d’institutions capables de créer du lien entre les disciplines, entre des horizons professionnels parfois très différents. C’est le rôle de l’Académie.
Face à la globalisation qui noie les choses, notre première mission est de créer du lien et la plus-value que ces liens vont générer. Et ceci est notamment vrai pour les universités. Nous sommes plongés dans un univers de compétition qui fait qu’on perd trop facilement le sens de la collaboration entre institutions.
Si le monde a besoin de liens, il a aussi besoin de critiques. C’est une autre mission importante de l’Académie.
De même, nous devons aussi nous préoccuper de la diffusion des savoirs. C’est le cas avec le Collège Belgique, par exemple, qui propose des leçons librement accessibles au public sur de multiples thématiques.
Je souhaite accentuer la mission du Collège Belgique. À la diffusion des savoirs, des résultats de la recherche, je souhaite que cette initiative instille aussi davantage de notions liées à la méthode et à la critique.
J’aimerais aussi que le Collège Belgique touche davantage d’étudiants. Nous pourrions par exemple mettre sur pied des cycles de six leçons de deux heures chacune articulées autour d’une même thématique. Ces cycles seraient accessibles au public. Ils entreraient aussi dans le cursus des étudiants. Cela mettrait davantage en contact l’avenir de l’intelligence de notre société avec le public qui désire se tenir au courant des dernières avancées de la Science. Et cela créerait des liens intergénérationnels.
Enfin, n’oublions pas la dimension artistique qui anime aussi l’Académie royale de Belgique. L’Art, c’est fondamental. Nous organisons déjà des concerts. Nous allons à l’avenir nous rapprocher d’autres institutions culturelles afin de multiplier les occasions de nous rencontrer, de générer du lien…
NOTE:
Lors de la « campagne électorale », le Pr Viviers proposait un site web détaillant ses propositions pour l’Académie. Ce site est toujours disponible en ligne.