Constructions en terre, Burkina Faso. © Jehanne Paulus.
Constructions en terre, Burkina Faso. © Jehanne Paulus.

Retour à la terre

28 juin 2016
par Daily Science
Durée de lecture : 4 min

Etudes de granulométrie par laser, études de sédimentométrie, modélisations informatiques, « limites d’Atterberg », tests en laboratoire… La terre, le matériau « terre », a été étudiée sous toutes ses formes par l’ingénieure Jehanne Paulus (Faculté des sciences appliquées, ULg), qui vient de remporter le « Prix Ingénieurs sans Frontières-Philippe Carlier ».

 

Son but? Tenter de comprendre pourquoi ce matériau facilement accessible, relativement aisé à mettre en œuvre et bon marché est de plus en plus délaissé en Afrique de l’Ouest, et plus particulièrement à Ouagadougou, la capitale du Burkina.

 

« La terre est un matériau disponible en quantité et est omniprésente », indique-t-elle. Un tiers de l’Humanité vit aujourd’hui dans une habitation en terre crue. Mieux encore, 17% des constructions inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO sont en terre ».

 

L’attrait de la brique comprimée

 

Fabrication de briques en terre comprimée. © Jehanne Paulus
Fabrication de briques en terre comprimée. © Jehanne Paulus (Cliquer pour agrandir)

La base de ces constructions est souvent la brique de terre comprimée. Composées d’un mélange de terre et d’eau, plus éventuellement d’additifs (du sable, du ciment ou de la chaux qui réduisent sa sensibilité à l’eau et augmentent la résistance du matériau), ces briques sont comprimées à l’aide de presses manuelles ou mécanisées.

 

Leur fabrication ne nécessite pas d’énergie de cuisson et elles permettent une grande liberté architecturale. « Enfin, leur usage favorise aussi le développement de l’économie locale tout en présentant un impact écologique faible », précise l’ingénieure-architecte. Côté confort de vie, ces briques affichent une grande inertie thermique, ce qui permet de réguler la température dans les bâtiments.

 

Des pistes pour revaloriser ce type d’architecture

 

Mais alors, pourquoi, au vu de ces qualités, les habitants de Ouagadougou délaissent-ils ce mode de construction pour lui préférer le béton? Et quelles seraient les démarches à entreprendre afin de revaloriser l’architecture de terre, et principalement celle en briques de terre comprimée ?

 

Afin de répondre à ces questions, Jehanne Paulus a mené des recherches techniques à Liège mais aussi de terrain, à Ouagadougou. C’est ce travail qui vient d’être primé par l’association « Ingénieurs sans Frontières ».

 

Presse à briques. © Jehanne Paulus.
Presse à briques. © Jehanne Paulus.

 

Ses conclusions sont claires. Si la construction en terre n’est plus acceptée par les Ouagalais, c’est parce qu’elle est considérée comme «le matériau du pauvre».
Les constructions actuelles en briques de terre comprimées sont mal conçues, note encore l’architecte; ce qui constitue autant de mauvais exemples.  Ajouté à la méconnaissance du matériau, aux problèmes de la stabilisation et à la conception non adaptée: des défis à relever, clairement identifiés.

 

Sa proposition, pour redresser la situation, passe par la promotion de bâtiments pilotes correctement conçus. « C’est-à-dire avec des murs de 44 cm d’épaisseur non enduits et une toiture de 29 cm en voussettes protégées par une sur-toiture, et via des formations de maçons ainsi que des cours dans les universités », préconise-t-elle.
 

 

Des projets de qualité

 

Le jury du Prix Ingénieurs sans Frontières-Philippe Carlier n’a pas chômé, cette année. De nombreux candidats étaient en lice.

     

  • Guillaume CHOME (UCL) : « Suivi des cultures en milieu villageois soudano-sahélien par télédétection à très hautes résolutions : analyse de la détection des niveaux de fertilisation »

  • Sandrine COLLET, Nicolas DUFOUR, Aurélie ROUSSEAU (UCL): « Koobo : Création d’une entreprise sociale visant à récupérer les sols dégradés au Burkina Faso à l’aide de techniques agroécologiques innovantes »

  • Yorick COOMANS de BRACHENE (UCL) : « Assessment of qualitative parameters including polyphenol oxidase activity for different drying methods in Amazonian cocoa processing targeting optimization and standardization »

  • Loïc FOSSION (Institut Gramme) : « Conception, réalisation et mise en place d’un moulin à canne à sucre en Haïti »

  • Yannick FRIPPIAT (ULB) : « Développement d’un biofiltre pour le traitement des odeurs générées par un procédé de recyclage du plastique au Burkina Faso »

  • Simon LHOEST (Gembloux Agro-bio Tech-ULg) : « Contribution au monitoring de populations d’hippopotame commun (Hippopotamus Amphibius L.) par l’utilisation de la technologie drone (Parc National de la Garamba, République Démocratique du Congo) »

  • Mathilde LHOTE (ULB) : « Séchage d’ananas : Etude expérimentale en laboratoire et amélioration de séchoirs solaires en Ouganda »

  • Maximilien RICHALD (Institut Meurice) :« Étude préliminaire de catalyseurs à base de charbon actif et d’oxyde de titane pour l’oxydation photo catalytique des ions cyanure »

  • Charlotte VAN ENGELAND (ULB): « Développement d’une méthode de prédiction de la productivité d’un système de RiverBed Filtration »

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