L’année de l’innovation pour les festivals

29 décembre 2020
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 5 min

Avec des artistes comme David Guetta, Dimitri Vegas & Like Mike ou encore Martin Garrix, mais aussi 250 figurants et des décors exceptionnels, cela promet d’être le plus grand festival musical de l’année! «Tomorrowland 31.12.2020» proposé pour le réveillon de Nouvel An devrait, en effet, attirer la toute grande foule.

Des centaines de milliers de personnes sont attendues. Une folie en ces temps de Covid et de consignes sanitaires marquées par des confinements à répétition?

Nouveau concept « en ligne »

« Certainement pas », explique Philippe Ben Mohamed, responsable « numérique » (head of digital) à Tomorrowland. « Après une année qui nous a privés de véritables festivals en présentiel, nous nous réinventons. Il s’agit d’un nouveau concept, proposé exclusivement en ligne. A consommer donc chez soi, en même temps que les autres festivaliers, et dans le monde entier.

Quatre scènes distinctes et en parallèle, des spectacles à suivre entre 20 heures et 3 heures du matin dans chaque fuseau horaire de la planète. Avec un feu d’artifice virtuel à minuit. Les amateurs de musique ne seront pas déçus. »

« Re-inventing live shows 2020 »

Lors de l’événement en ligne « re-inventing live shows 2020 », organisé voici quelques jours par le service « Recherche » de Wallonie-Bruxelles International et le KIKK (Namur), Philippe Ben Mohamed a détaillé la manière dont cette innovation a pu, ou plus exactement a dû, voir le jour. Une question de survie pour cet organisateur belge de festivals mondialement connus.

« Cela a été une réflexion immédiate quand nous avons annulé le festival traditionnel de l’été. Le numérique s’est imposé », précise Philippe Ben Mohamed. « Et à tous les niveaux: spectacles, billetterie, participation au festival, enregistrement des prestations qui seront proposées lors de cet événement. »

Face aux nouvelles contraintes imposées par la pandémie et les mesures prises partout dans le monde pour la contrecarrer, le mot d’ordre a donc été innovation.

Un anniversaire reporté pour le KIKK festival

A Namur, le KIKK Festival qui propose, depuis début novembre, des événements partout dans la ville (des prestations artistiques, des conférences, des ateliers, un « marché » et des rencontres professionnelles autour de la thématique des arts numériques), a également dû se montrer créatif pour son… dixième anniversaire. « Après la première vague, nous avons  revu nos ambitions à la baisse, histoire de ne pas prendre de risques avec le virus », explique Marie du Chastel, curatrice du KIKK festival.

« Nous avons donc travaillé sur une version allégée et modifiée du festival 2020, rebaptisée pour l’occasion 9.5, afin de garder le chiffre symbolique de 10 pour fêter notre anniversaire en grand, l’an prochain. Mais au fil du temps,  et surtout à l’approche du mois de novembre, les mauvaises nouvelles sanitaires nous ont amené à annuler complètement le festival 9.5 de cette année. Vu son articulation en de multiples lieux, ce qui est aussi une de ses marques de fabrique, il ne nous a pas semblé possible de le maintenir sous une forme exclusivement numérique. Rendez-vous donc l’an prochain! »

Relever les défis technologiques, de marketing, de réseaux…

« Une des forces du KIKK festival est de mettre en relation des professionnels du numérique lors de la tenue de l’événement », rappelle-t-on chez WBI. Sa conférence virtuelle organisée en décembre pour les professionnels du secteur a permis de maintenir ces possibilités de collaborations en introduisant des réunions (toujours virtuellement) « B2B ». Il y a été question des défis technologiques, de marketing, de réseaux…

Les participants à cet événement en ligne étaient principalement wallons avec, entre autres, Hovertone qui présentait ses solutions d’interactions sans le toucher. Une innovation également utile pour les musées. Ou encore D-event, qui propose de sécuriser et d’aider l’organisation d’événements virtuels via la technologie du « blockchain ».

De quoi envisager 2021 sous de meilleurs auspices? « Nous connaissons mieux ce virus désormais, nous savons comment il se comporte, ce qu’il représente comme défis », souligne Arnaud Meulemeester, du studio d’art numérique Dirty Monitor, basé à Charleroi.

Des clients avides de projets…

« Nous créons des performances vidéo et des projections 3D dans le monde entier. Bien sûr, depuis le mois de mars, notre activité a été fortement impactée par la situation. De mars à mai, tous nos projets ont été suspendus. Personne ne savait quoi faire. De mai à juin, nous avons terminé ce qui était en cours, principalement en Belgique. En juillet, nous avons fermé, comme chaque année, pour les vacances », détaille Arnaud Meulemeester.

« Depuis la mi-août, nous avons reçu beaucoup de demandes pour de nombreux projets, principalement en dehors de l’Europe. Les gens ont eu beaucoup de temps pour réfléchir à de nouvelles idées. Ils nous ont consulté, réclamant notre avis, des conseils, un devis, des études techniques, une proposition artistique, etc.»

« Il est, par contre, difficile de faire ensuite valider un projet. Les clients ne veulent pas planifier un événement pour être ensuite obligés de l’annuler quelques mois plus tard à cause de la situation. Par ailleurs, les ressources financières disponibles ne sont plus les mêmes. Y compris pour les grands événements ».

« Nous avons donc dû nous adapter. Nous avons utilisé nos compétences créatives et les connaissances de notre équipe pour nous concentrer sur la réalité virtuelle. Nous mettons également le focus sur les événements qui seront diffusés à la télévision, avec un petit public sur place. Nous travaillons aussi sur un concept de studio virtuel, similaire à celui utilisé dans l’émission télévisée « Mandalorian Star Wars ». Nous aimerions également travailler sur la création d’événements virtuels similaires à ce qui est mis en place par Tomorrowland, avec plusieurs partenaires de Wallonie. »

Le choc de 2020 pour le secteur des festivals et de l’événementiel aura donc montré ceci: la résilience de ses acteurs passe par une bonne dose d’innovation, y compris dans la conception même de leurs métiers. Rendez-vous en 2021!

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