Onze chercheurs belges de plus soutenus par l’ERC

29 décembre 2022
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 5 minutes

Le malheur des uns fait le bonheur des autres. Assez étonnamment, cette formule s’applique aussi au financement de la recherche en Europe. Il s’agit ici des bourses de recherche allouées par l’ERC, le Conseil européen de la Recherche (European Research Council).

En 2022, onze scientifiques actifs dans une institution scientifique ou une université en Belgique, et qui n’avaient pas été financés par l’ERC ont néanmoins été sélectionnés lors du deuxième tour. Il s’agit d’une forme de repêchage exceptionnel (dans le sens noble du terme) effectué dans une liste de chercheurs dont le projet de recherche avait été évalué comme excellent mais qui, faute de moyens suffisants, n’avaient dans un premier temps pas été financés.

En 2022, au total, ce sont 43 chercheurs belges qui auront bénéficié d’une bourse Starting, Consolidator ou Advanced du Conseil européen de la Recherche. Un excellent millésime.

Réallocation de bourses suisses et britanniques

Chaque année depuis 2007, l’ERC alloue des fonds importants à des centaines de chercheurs et équipes de recherches via ses différentes bourses. Les scientifiques actifs au sein de l’Union européenne sont les principaux bénéficiaires de ce système. Des chercheurs actifs dans d’autres pays, qualifiés d’états associés, peuvent également y prétendre. Mais cette année, deux de ces pays associés posaient problème: le Royaume-Uni et la Suisse.

Les lauréats des concours lancés en 2021 pour les subventions portant sur les bourses de démarrage (Starting Grants), les bourses consolidées (Consolidator Grants) et les bourses de recherche avancée (Advanced Grants), ont été annoncés par l’ERC au cours du premier semestre 2022. Depuis lors, la majorité des candidats retenus ont accepté le financement et signé leur convention de subvention. Des conventions qui portent sur des sommes allant d’un million à deux millions et demi d’euros sur cinq ans.

Mais depuis, et suite à des problèmes de négociations politiques entre l’Union européenne et le Royaume-Uni ainsi que la Suisse, des financements théoriquement alloués à des chercheurs basés dans ces pays n’ont pas pu être confirmés. Ce sont ces bourses qui ont été réallouées à des chercheurs placés sur listes de réserve.

Désaccords politiques et retard dans les conventions

Deux facteurs expliquent cette situation inhabituelle pour l’ERC et les chercheurs théoriquement finançables. « Les négociations entre l’UE et la Suisse sur l’association de ce pays au programme Horizon Europe ont été suspendues. Depuis lors, la Suisse est considérée comme un pays tiers non associé au programme. Par conséquent, les institutions hôtes en Suisse n’ont plus été considérées comme éligibles pour un financement de l’UE. Les lauréats de l’ERC dont les institutions d’accueil étaient suisses pouvaient toujours choisir de conserver leurs subventions, à condition de transférer leurs propositions à une institution d’accueil éligible », explique l’ERC.

« Depuis la création de l’ERC, les priorités de l’agence européenne de financement de la recherche fondamentale d’excellence mettent l’accent sur les jeunes générations de chercheurs, mais aussi sur leur mobilité », explique le Pr Jean-Pierre Bourguignon, qui fut Président de l’ERC de 2014 à 2021.

De passage à Bruxelles à l’invitation de l’Académie royale des sciences de Belgique pour une matinée d’études sur les grandes infrastructures de recherche, il a fait le point sur l’action de l’ERC. « C’est la notion de portabilité (des subventions de recherche) qui est ici concernée. Un scientifique qui décroche une telle bourse de recherche alors qu’il travaille dans une institution, une université, garde cette bourse, même s’il décide de changer d’institution », précise-t-il.

La situation vis-à-vis du Royaume-Uni  est quasi identique à celle de la Suisse. « Parmi les candidats retenus pour ces trois bourses, il y avait également plusieurs chercheurs accueillis par des universités et des instituts de recherche basés au Royaume-Uni », indique-t-on à l’ERC.

« La plupart d’entre eux n’étaient pas en mesure de signer des conventions de subvention. Et ce, parce que le Royaume-Uni est un pays en cours d’association à Horizon Europe. Et qu’il n’était pas encore associé au programme au moment de la signature de ces conventions de subvention. Par conséquent, ses institutions n’étaient pas considérées comme éligibles pour accueillir des subventions de l’ERC. »

43 chercheurs financés en Belgique 

C’est ce qui explique les possibilités de repêchage pour ces trois types de financement.

« Le financement de l’ERC qui a été refusé par les chercheurs basés en Suisse et au Royaume-Uni au cours de l’année 2022 est devenu disponible pour les chercheurs dont les propositions ont été évaluées comme excellentes, mais qui ont été initialement mises sur des listes de réserve en raison du manque de fonds », explique le Conseil européen de la Recherche.

« Dans le cas des subventions de démarrage, le conseil scientifique de l’ERC a également décidé d’allouer un budget supplémentaire d’environ 120 millions d’euros pour répondre au nombre plus élevé que prévu de candidats, ce qui permet de financer davantage de candidats. »

D’où le financement de onze projets de recherche complémentaires soumis par des scientifiques basés en Belgique. Sept bénéficient d’une bourse de démarrage. Les quatre autres d’une bourse consolidée (2) ou d’une bourse de recherche avancée (2).

Avec ces onze bourses supplémentaires, ce sont donc au final 43 projets de recherche belges qui sont financés en 2022 par l’un ou l’autre de ces trois instruments de l’ERC.

« Depuis la création de l’ERC en 2007, la Belgique devrait bientôt atteindre les 500 scientifiques financés par l’ERC », précise le Pr Bourguignon. Un chiffre qui sera sans doute atteint en 2023. Au 15 juin 2022, l’ERC recensait 477 chercheurs belges ayant bénéficié d’un de ses contrats de recherche.

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