En raison des contraintes environnementales, les avions se composent aujourd’hui de matériaux légers et souples. Cela permet d’économiser du carburant et donc de moins polluer l’atmosphère.
L’inconvénient ? La flexibilité des matériaux peut entraîner des contacts entre les éléments du turboréacteur, ou des vibrations de grandes amplitudes en bout d’ailes. Une complication sérieuse quand on sait qu’elles peuvent causer la destruction pure et simple de la structure.
Des phénomènes imprévisibles
C’est sur cette problématique qu’ont porté les travaux de Thibaut Detroux, Chargé de recherches FNRS au Département d’Aérospatiale et Mécanique de l’Université de Liège (ULg).
Lauréat de la meilleure thèse de Belgique en ingénierie mécanique, le scientifique a cherché à prédire numériquement la façon dont réagiraient les ailes d’avions, ou d’autres structures aérospatiales, à ces vibrations.
Dangereuses vibrations non linéaires
« Les vibrations en bout d’aile sont surtout liées à un phénomène de vibration particulier : les vibrations non linéaires. Opposées aux linéaires » indique le Dr Detroux.
Si l’on exerce une force X sur la structure, la réponse de la celle-ci sera Y. Dans le cas d’une vibration linéaire, si l’on double cette force X, la réponse de la structure y doublera aussi.
« Avec ce type de vibration, il existe une règle de proportionnalité. Mais dans le cas des vibrations non linéaires, si l’on double la sollicitation exercée, on peut avoir une réponse multipliée par 10, et amener à la destruction du prototype ».
Prédire le comportement des matériaux
Ce type de vibrations entraîne donc des phénomènes complexes. Et prédire la manière dont le matériau va réagir reste difficile.
Ces phénomènes non linéaires, comme on les appelle, sont en réalité liés à la présence d’une « bifurcation ».
« Dans le sens commun, une bifurcation correspond à un carrefour sur une route, où l’on a le choix entre plusieurs directions, explique l’ingénieur. Dans le cadre des vibrations non linéaires, cela correspond à plusieurs scénarios possibles dans la façon dont va réagir la structure ».
Une modélisation à grande échelle
Sa recherche visait à détecter et prédire ces bifurcations à l’aide d’un programme informatique. En vue de prévoir et de caractériser la réponse vibratoire d’une structure.
« Il existait des techniques pour prédire les bifurcations, mais seulement sur de petits systèmes. Le cœur de mon travail a donc été d’adapter ces techniques à de plus grandes structures, c’est-à-dire des modèles industriels comme des F16 et des satellites ».
Une fois le code développé, le Dr Detroux a pu tester et démontrer en laboratoire certains phénomènes liés aux bifurcations. Des expériences menées durant 2 mois au sein des laboratoires de l’Université de Duke (États-Unis).
Les vibrations non linéaires étaient une problématique assez méconnue des constructeurs. Jusqu’à récemment, la solution consistait à consolider la structure afin de la rendre plus rigide. Aujourd’hui, la volonté de construire des appareils plus légers entraîne chez les industriels un regain d’intérêt.
« Cet intérêt nous a poussés à créer en novembre 2016 la spin off NOLISYS, précise le chercheur. Nous apportons aux industriels une meilleure compréhension du phénomène et envisageons ensemble des solutions afin d’améliorer leur structure et ainsi éviter l’apparition de ces phénomènes ».
Au-delà de la consultance, la spin off propose aussi des formations, ainsi que la vente d’un logiciel de simulation. Basé en partie sur les travaux du Dr Detroux.
NOLISYS a déjà pu apporter son expertise à diverses sociétés aéronautiques. Dont Safran Aero Boosters, la SONACA, ou encore Airbus Defence and Space.