L’âgisme bienveillant : quand protéger revient à discriminer

30 octobre 2025
par Daily Science
Temps de lecture : 2 minutes

Dans la vie quotidienne, l’âgisme – stéréotypes, préjugés ou discriminations envers quelqu’un en raison de son âge – ne se manifeste pas uniquement par des propos négatifs. Il prend aussi des formes plus douces : décider ou parler à la place d’une personne âgée, éviter de lui confier des responsabilités, la surprotéger dans l’espace public. Cette bienveillance apparente peut infantiliser, réduire les marges de choix et nourrir l’idée que l’âge est avant tout synonyme de fragilité et de dépendance.

L’âgisme « bienveillant » infantilise et invisibilise les aînés

Les professeurs Vassilis Saroglou et Stefan Agrigoroaei, chercheurs à l’Institut de recherche en sciences psychologiques de l’UCLouvain, démontrent dans une nouvelle publication que cet âgisme bienveillant est une forme de discrimination. Trop protéger nos aînés revient à les déprécier.

Cette forme d’âgisme bienveillant se distingue de l’âgisme hostile (perception des aînés comme difficiles, accaparant des ressources, exerçant pouvoir et influence, empiétant sur l’espace social des plus jeunes), mais les mécanismes sont similaires. Et tous deux sont aussi dépréciatifs et discriminants pour les personnes âgées.

Anxiété face à la mort

Les chercheurs ont évalué les attitudes de jeunes adultes et d’adultes d’âge moyen (belges francophones), en lien avec leurs traits psychologiques (valeurs, croyances, émotions, personnalité).

Résultats ? Tout d’abord, l’âgisme bienveillant est plus fréquent que l’hostile, mais tous deux reposent sur des profils psychologiques déjà associés à d’autres préjugés comme le racisme, le sexisme et l’homophobie. Ces profils incluent le conformisme/l’autoritarisme, la vision hiérarchique des groupes, la valorisation de l’expansion de soi (pouvoir, réussite à tout prix) et une faible flexibilité dans ses propres conceptions du monde.

Ensuite, une caractéristique psychologique commune aux personnes âgistes, qu’elles soient bienveillantes ou hostiles, est l’anxiété face à la mort de la personne âgée ou à la perspective de leur propre mort. L’âgisme fonctionnant alors comme une stratégie d’évitement.

Troisième résultat, le traditionalisme de personnes religieuses pourrait renforcer l’âgisme, mais leur compassion haute les oriente davantage vers une forme bienveillante plutôt qu’hostile.

Dans la famille, à l’hôpital, au travail ou dans l’espace public, l’âgisme bienveillant est moins visible et moins remis en question, tout en ayant des effets bien réels sur l’estime de soi, la santé et la participation sociale des aînés. En prendre conscience, décortiquer ses origines et les caractéristiques psychologiques qui y sont associées pourrait permettre de faire un grand pas en avant pour tenter de l’enrayer.

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