Le Centre belge d’expertise sur le climat a ouvert ses portes

30 novembre 2022
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 5 minutes

L’ancienne maison de fonction du directeur de l’IRM (Institut Royal Météorologique) connaît une nouvelle jeunesse. Entièrement rénovée, elle abrite désormais le Centre belge d’expertise sur le climat. Situé à Uccle, sur le site du Pôle espace qui héberge l’Institut Royal Météorologique, l’Observatoire Royal de Belgique et l’Institut Royal d’Aéronomie spatiale de Belgique, le Centre Climat, doté d’un budget annuel de deux millions d’euros, va jeter des ponts entre scientifiques, experts, décideurs politiques et secteur privé.

« Le Centre Climat a pour objectif d’être une référence en matière de politique climatique. Il va concentrer la meilleure expertise en Europe pour informer la décision politique en matière climatique », indique Thomas Dermine, le Secrétaire d’État (PS) en charge de la Politique scientifique fédérale (Belspo), laquelle est chargée de chapeauter le Centre Climat.

Coordonner au mieux la recherche

« Il devra faire le lien entre toutes les expertises dans le pays en matière de climat », continue le Secrétaire d’État. « Cela concerne notamment les ESF (Etablissements scientifiques fédéraux) ainsi que les acteurs académiques. Quand on fait l’inventaire de nos actifs de recherche, de l’expertise qui existe déjà aujourd’hui en Belgique dans le domaine, on peut dire que nous disposons d’une des densités les plus fortes en matière de recherche climatique. »

« Le but de ce nouveau Centre est de coordonner au mieux la recherche dans ce domaine. Ceci pour multiplier les projets de recherche, pour renforcer les collaborations avec les autres acteurs de la recherche. Et ce, que ce soit en Belgique ou dans le cadre de programmes européens. Mais aussi pour regrouper les bases de données et les rendre accessibles, en coopération avec le secteur privé et au service de tous », poursuit-il.

Urgence climatique et connaissances scientifiques 

Les deux directrices du Centre, la Pre Valérie Trouet (Université d’Arizona) et la Docteure en sciences Ella Jamsin, respectivement, directrice scientifique et directrice opérationnelle du centre, n’ont pas caché leur intérêt pour cette nouvelle structure.

« Il ne fait aucun doute que ce Centre Climat génère déjà beaucoup d’enthousiasme. Y compris de mon côté. Et il y a trois raisons à cela : l’urgence climatique, mais aussi ma passion pour les sciences et ma conviction qu’une partie de la solution se trouve du côté des interactions entre toutes les composantes de la société », explique Dre Jamsin.

Face à la perspective de vivre dans un monde à quelque 2,5 degrés plus chaud qu’aujourd’hui d’ici la fin de ce siècle, ainsi que face à toutes les incertitudes qui en découlent, elle a pu constater au cours de ces dix dernières années combien l’urgence climatique induisait une certaine anxiété chez les gens.

Les directrices Ella Jamsin et Valérie Trouet reçoivent les clés du Centre Climat des mains du Secrétaire d’Etat à la Politique Scientifique, Thomas Dermine © Christian Du Brulle

Favoriser les interactions sociétales

Sa passion pour les sciences? « Je suis physicienne de formation, avec un doctorat de l’ULB. Ensuite, j’ai travaillé pour des entreprises, des organisations non gouvernementales ainsi que dans différentes universités en Belgique, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas. Ces expériences m’ont permis de rencontrer de nombreux scientifiques. Les travaux sur les transitions sociétales m’ont beaucoup intéressée ces dernières années. »

De ces travaux et de son expérience de terrain, est venue sa conviction que c’est dans les interactions entre humains que se trouve la capacité à dépasser les défis de notre siècle.

« La crise climatique ne se prête pas à la catégorisation. On ne peut pas régler la question du climat sans s’intéresser au vivant, à l’économie, à la finance, à la psychologie ou encore aux comportements », dit-elle. « Il est essentiel que ces différents domaines d’expertise interagissent. Cela signifie que tous ces acteurs doivent se rencontrer et apprendre à parler un même langage. Il faut qu’ils puissent tisser des liens entre leurs différents domaines d’expertise. Travailler avec le monde scientifique pour faciliter les échanges et accroître leurs impacts sur l’action climatique au sein du nouveau Centre Climat est très inspirant.»

Les pistes suisses

Le scientifique suisse Bertrand Piccard, président de la Fondation Solar Impulse, qui depuis cinq ans œuvre à la dissémination des ressources déjà disponibles et utiles à la transition énergétique, était présent à l’inauguration du Centre Climat.

Il a rappelé que la transition est une opportunité pour l’économie, et ce pour le plus grand bénéfice de l’écologie. « Arrêtons de vivre avec des solutions qui datent d’il y a 120 ans et des débuts de l’ère du pétrole », a-t-il dit en substance.

« Pour lutter contre le réchauffement climatique, les solutions existent. Il faut réconcilier économie et écologie. Il faut mettre en œuvre les solutions actuelles. Pourquoi n’est-ce pas le cas? », demande celui qui a bouclé le premier tour du monde en avion solaire. « Parce que l’on pense encore trop que la lutte contre les changements climatiques est chère, difficile et mauvaise pour l’économie. Or, tout cela est faux. » Et il identifie aussi un autre problème, législatif celui-là. « La législation n’a pas évolué aussi vite que les connaissances. »

En France, il a proposé « 50 solutions prêtes à être votées ». Et un « guide des solutions disponibles ». De quoi sans aucun doute inspirer le nouveau Centre Climat qui coordonnera les activités de recherche de plus d’une centaine de scientifiques en Belgique.

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