Anne-Sophie Thiry publie «Et s’il était possible d’être un parent équilibré?» aux éditions Racine. Forte de la formation qu’elle propose aux professionnels de l’éducation au centre d’accompagnement à la parentalité «L’Autrement Dit» dans le village de Morhet en province de Luxembourg. La thérapeute se déplace en Belgique, en France et au Grand-Duché de Luxembourg pour organiser des ateliers, des journées pédagogiques.
«En proposant d’accompagner le parent dans cette épreuve quotidienne à laquelle ressemble parfois, et même parfois souvent ou souvent parfois, l’acte d’éduquer un enfant, cet ouvrage se révèle salutaire», juge le psychopédagogue Bruno Humbeeck, docteur en Sciences de l’éducation de l’Université de Rouen (France), chercheur en pédagogie familiale à l’Université de Mons (UMons). «Il permet de cheminer pas à pas avec le parent et de l’accompagner, sans brutalité. En mettant de la légèreté là où la lourdeur empêcherait d’avancer.»
Non, non, c’est non!
Différentes lectures du livre sont possibles. Suivre l’accompagnement progressif pendant un mois à raison d’un paragraphe par semaine. Ou se plonger dans le chapitre le plus urgent. Comme quand un petit enfant dit «non» à tout moment. Et que ses parents abusent aussi de ce «non».
«Entre l’âge de 18 mois et 3 ans, l’enfant franchit une étape importante dans son développement», rappelle Anne-Sophie Thiry. «Il prend conscience de son individualité. Il est un être à part entière, détaché de maman et de papa. Il peut s’opposer et provoquer des réactions chez les autres enfants et même chez les adultes. Il prend conscience de son pouvoir! C’est l’âge du non. Le petit teste, vérifie ce à quoi il a accès.»
Et si l’enfant rencontre souvent un «Non! Tu ne peux pas!» de l’adulte? La thérapeute conseille de remplacer les négations par des consignes. Comme «Marche doucement!». Ou «C’est sale, j’ai peur que tu sois malade en mangeant cela.» Tout en se souvenant que «tenir bon» rassure l’enfant ou l’ado qui a besoin de sentir que l’adulte est cohérent.
Punir ou ne pas punir?
Quand faudrait-il punir? «Le tout est dans la nuance, l’ajustement, l’intention et l’équilibre», explique la détentrice d’un diplôme de Thérapie émotionnelle comportementale et cognitive de l’Université Lille 3. «On se sent bien vulnérable, en tant que parent, dans toutes ces situations où la relation avec nos enfants est difficile. On se sent tellement démuni, poussé à bout.»
Il s’agit de mettre les enfants ou les ados face à leurs responsabilités. Si Théo casse involontairement un verre, on peut l’aider. Profiter de la situation. S’il est jeune, il serait préférable de lui dire que ça coupe. Et résister à la tentation de lui faire la morale. Si Adeline maltraite sa sœur qui a pris son téléphone portable, il faudrait l’inviter à dire autrement ce qui lui a déplu. En s’excusant. En prêtant un objet en retour afin de rétablir la relation entre elles.
Pour la thérapeute, l’important est de se positionner dans une autorité juste. Ni hystérique ni réactive. Équilibrée et équilibrante pour chacun. On peut étouffer sa colère, son irritation, en les ignorant. En respirant profondément. En s’offrant un petit moment de coupure pour regarder le paysage. Écouter de la musique.
Faire fleurir la créativité
Comment faudrait-il gérer le temps consacré à la tablette, le téléphone portable, l’ordinateur, la télé, les jeux en ligne?
«Avouons-le, nous, pourtant adultes, éprouvons souvent des difficultés à veiller au temps qui passe. Et même si nos écrans affichent l’heure en permanence, nous pouvons perdre la notion du temps.»
Que faire alors avec les enfants? Décider ensemble des jours de la semaine où il est permis de jouer, regarder la télé. Dire à l’enfant que ce n’est pas pour l’ennuyer mais pour le préserver. Avec un ado, convenir du temps d’accès au smartphone. Et s’il n’y arrive pas? Reposer la règle. Expliquer que le temps dévolu au lendemain est consommé. Et s’il râle?
«C’est normal, j’accueille sa frustration et je tiens bon. Je rappelle la raison pour laquelle je pose ces limites. Je prévois des moments pour s’ennuyer, faire fleurir la créativité. Ou ne rien faire, rêvasser. Sans télé ni écran.»
Le mirage du parent parfait
Pour débarrasser les parents de leur culpabilité et les empêcher de sombrer dans le surmenage parental, Anne-Sophie Thiry leur propose de ne pas courir après le mirage du parent parfait. D’avoir de l’empathie, de la bienveillance envers eux-mêmes. Pour être simplement d’«assez bons parents», comme le suggérait le pédopsychiatre britannique du siècle passé Donald Winnicott.