Les yeux et les oreilles de Daily Science (119)

31 mai 2019
Temps de lecture : 7 minutes

Léonard de Vinci souffrait-il de troubles de l’attention et d’hyperactivité, le prix Galien 2018 récompense des travaux sur le ciblage du métabolisme des cellules cancéreuses, la recette de l’Institut bruxellois de statistique et d’analyse pour (bien) évaluer l’impact d’une politique publique

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Léonard de Vinci souffrait-il de troubles de l’attention et d’hyperactivité ?

A Londres, le Pr Marco Catani, du Département des sciences médico-légales et neurologiques du développement (Institut de psychiatrie, de psychologie et de neurosciences du King’s College), soupçonne Léonard de Vinci, dont on commémore cette année le 500e anniversaire du décès, d’avoir souffert de ce qu’on appelle aujourd’hui de troubles de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Une pathologie non encore décrite à l’époque.

Selon le chercheur, le génial artiste et inventeur florentin présentait divers signes faisant penser à certains critères caractéristiques de cette pathologie. « Le temps excessif consacré à la planification des idées et le manque de persévérance semblent avoir été particulièrement préjudiciables à la finalisation de tâches qui avaient d’abord attiré son enthousiasme », écrit-il. « La lutte chronique de Léonard de Vinci pour traduire son extraordinaire créativité en résultats concrets et tenir ses engagements était proverbiale de son vivant». Cette procrastination étant à ses yeux un indice parmi d’autres alimentant sa thèse.

« Le TDAH est un trouble du comportement caractérisé par la procrastination continue », indique le Pr Catani, « mais aussi par l’incapacité d’accomplir les tâches, l’errance mentale et l’agitation du corps et de l’esprit ». Autant d’indices qu’il décèle dans la littérature consacrée à Léonard de Vinci. « De nos jours, un diagnostic de TDAH ne tient pas compte du niveau d’habileté intellectuelle et est de plus en plus reconnu chez les étudiants universitaires et les adultes ayant une carrière réussie. On peut soutenir que, si elles sont canalisées positivement, certaines caractéristiques du TDAH peuvent présenter un avantage : l’errance mentale peut alimenter la créativité et l’originalité ; l’agitation peut aller vers la recherche de nouveauté et l’action pour le changement », estime-t-il encore.

Trois des chefs-d'œuvre de Léonard de Vinci : La Dernière Cène, une œuvre réalisée par Léonard de Vinci en 3 ans mais dont l'utilisation d'une technique de fresque incorrecte a entraîné une détérioration rapide, indique le chercheur. En bas à gauche : la célèbre Mona Lisa, une oeuvre sur laquelle de Vinci a travaillé pendant… 16 ans, et à droite, la peinture inachevée de Saint Jérôme dans le désert.
Trois des chefs-d’œuvre de Léonard de Vinci : La Dernière Cène, une œuvre réalisée par Léonard de Vinci en 3 ans mais dont l’utilisation d’une technique de fresque incorrecte a entraîné une détérioration rapide, indique le chercheur. En bas à gauche : la célèbre Mona Lisa, une oeuvre sur laquelle de Vinci a travaillé pendant… 16 ans, et à droite, la peinture inachevée de Saint Jérôme dans le désert.

« Nous suggérons que la documentation historique soutient les difficultés de Léonard de Vinci avec la procrastination et la gestion du temps comme caractéristiques du TDAH, une condition qui pourrait expliquer certains aspects de son tempérament et la forme étrange de son génie « dissipatif ». Les difficultés de Léonard de Vinci étaient omniprésentes depuis l’enfance, ce qui est une caractéristique fondamentale de la maladie. Il y a aussi des preuves incontestables que Léonard de Vinci était constamment en mouvement, toujours occupé, mais aussi sautant souvent d’une tâche à l’autre. Comme beaucoup de personnes souffrant de TDAH, il dormait très peu et travaillait continuellement, nuit et jour, en alternant des cycles rapides de courtes siestes et de réveils ». L’article scientifique complet du Pr Catani est en accès libre.

 

Le prix Galien 2018 récompense des travaux sur le ciblage du métabolisme des cellules cancéreuses

Le Prix Galien est un prix scientifique qui récompense les meilleures recherches en pharmacologie. Cette année, le prix de pharmacologie a été attribué, pour la Belgique et le Luxembourg, au Dr Cyril Corbet, chercheur au sein du pôle de pharmacologie et de thérapeutique (Institut de recherche expérimentale et clinique) de l’UCLouvain.

Le chercheur est récompensé pour ses travaux sur le ciblage du métabolisme des cellules cancéreuses et les opportunités thérapeutiques associées à l’acidification du microenvironnement tumoral.

L’acidose est une caractéristique majeure de la plupart des cancers, rappelle l’UCLouvain. L’acidification du microenvironnement tumoral (10 fois plus acide que les tissus sains) résulte principalement de l’organisation chaotique des vaisseaux sanguins dans une tumeur qui perturbe l’élimination des protons, « déchets » du métabolisme cellulaire. L’acidose ne se limite cependant pas aux régions hypoxiques (où la glycolyse est accrue) et peut aussi apparaître dans des compartiments de la tumeur où le taux d’oxygène est suffisant pour supporter la respiration cellulaire.

Les recherches de Cyril Corbet ont permis de démontrer que l’accumulation de protons n’est pas qu’un effet collatéral de la croissance exacerbée des cellules cancéreuses mais qu’elle finit par influencer à son tour le métabolisme de ces cellules. Les travaux du chercheur UCLouvain ont montré que les cellules tumorales exposées à une acidose chronique passent d’un métabolisme dépendant du glucose vers une utilisation préférentielle de la glutamine et des acides gras.

Ses recherches ouvrent la voie vers des traitements visant à bloquer le métabolisme tumoral induit par l’accumulation de protons dans le microenvironnement tumoral. Ils apportent la démonstration qu’en intégrant la notion d’acidose tumorale, des composés capables d’interférer avec le métabolisme de la glutamine et du lactate mais aussi la capture et la synthèse des lipides se révèlent particulièrement efficaces pour bloquer la croissance des tumeurs chez la souris.

Les travaux de Cyril Corbet, en reproduisant in vitro les conditions d’acidose tumorale dans des tests de criblage à haut débit de nouveaux agents thérapeutiques et de réévaluation dans la sphère oncologique de certains médicaments développés pour d’autres indications, laissent entrevoir de nouvelles stratégies dans la lutte contre le cancer.

La recette de l’Institut bruxellois de statistique et d’analyse pour (bien) évaluer l’impact d’une politique publique

Plusieurs méthodes existent pour évaluer quantitativement l’impact d’une politique publique. Parmi celles-ci, la méthode contrefactuelle est une des plus utilisées. Cette méthode permet de mesurer l’impact d’une politique publique en comparant la situation existante à une situation fictive qui aurait eu lieu en l’absence de la politique publique. Cette méthode fait appel aux outils économétriques.

Ce type d’évaluation ne peut toutefois être réalisé que sous certaines conditions. Dans le Focus de l’IBSA n°29 « Évaluer l’impact d’une politique publique au moyen d’une méthode contrefactuelle : quelles conditions ? », l’Institut bruxellois de statistique et d’analyse revient sur ce type d’évaluation.

Mais à propos, une évaluation d’impact, qu’est-ce que c’est ? Il s’agit d’un type particulier d’évaluation qui cherche à démontrer le lien de cause à effet entre une politique publique donnée et les résultats observés. Cette méthode distingue ainsi le rôle de la politique publique des autres facteurs contextuels. Pour cela, l’évaluation d’impact « est structurée autour d’un type particulier de question : quel est l’impact ou l’effet causal d’un programme sur un résultat donné ? »

© IBSA
© IBSA

Il n’y a pas dans la littérature de définition univoque de ce qu’est un impact. Dans ce Focus, le terme impact fait référence aux effets identifiés qui peuvent être directs, indirects, voulus ou non, à court ou à long terme. La figure ci-dessus, tirée du Focus 29 de l’IBSA, présente le cycle de vie d’une politique publique et le moment durant lequel l’impact est mesuré.

 

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