La prospective est un exercice délicat. Quand il s’agit d’imaginer le vivant à des échéances lointaines, c’est encore plus compliqué. Les étudiants de l’UCL se sont pliés à l’exercice. Sous la houlette de deux professeurs de biologie, Jean-François Rees et Anne-Catherine Mailleux, ils ont imaginé les animaux qui peupleront la Terre d’ici 100.000 ans, voire un million d’années. Le résultat est assez surprenant. Leur vision de la planète est plutôt sombre…
“Les invertébrés proposés sont des organismes endoparasites aux robots qui dominent la Terre”, expliquent-ils. “Par conséquent, leur milieu de vie est terrestre. La planète connait une période très chaude, avec des températures pouvant avoisiner les 70°C. La salinité de l’océan atteint 200 g/litre…”
De vieux pneus au menu
Bien entendu, cet exercice d’apparence ludique est strictement scientifique. « L’objectif était de développer deux compétences essentielles à tout bon chercheur : la rigueur et la créativité », indique-t-on à l’Université Catholique de Louvain.
Parmi ces bestioles imaginaires qui rampent, grimpent ou nagent, on retrouve Augustus caoutchoutis, organisme dont le régime alimentaire est composé de pneus, Gulam ferrum, capable de percer des boîtes de conserve, ou encore l’Hallowaire, étrange créature qui ne vit qu’une seule nuit, celle d’Halloween.
Au total, une dizaine de spécimens sont à découvrir dans cette exposition proposée à la Halle universitaire. Outre une série de descriptifs rigoureusement scientifiques et un épais dossier reprenant les travaux des étudiants, on appréciera de pouvoir découvrir les sculptures de ce bestiaire imaginaire. Des sculptures dues à l’artiste Yves Renkin.
L’Expo « Zoooooo les animaux du futur » est à découvrir à Louvain-la-Neuve jusqu’au 14 avril. Elle sera ensuite visible à Woluwe-St-Lambert pendant un mois avant de prendre la direction de Mons, mi-mai.
Augustus et le caoutchouc
Une des créatures de l’exposition a été baptisée Augustus caoutchoutis. Pourquoi? Voici ce qu’en disent les étudiants.
« Dans un million d’années, ce ver de 35 à 50 cm de long, vivra dans les décharges sous-marines de pneus. Ces décharges auront été constituées au fil du temps, quand les véhicules à roues ont été abandonnés au profit d’aéroglisseurs magnétiques. Lors de l’élévation du niveau de mers, ces décharges devenues sous-marines ont été colonisées par les animaux ».
« La pollution massive des océans durant le pétrolifère supérieur (- 1.000.000 années) a entraîné la raréfaction des proies. Caoutchoutis doit sa survie à une alimentation incluant le caoutchouc des pneus. Malheureusement, le caoutchouc est difficile à dégrader et Caoutchoutis est incapable de produire des enzymes capables de décomposer ce polymère. Pour y parvenir, le ver se nourrit de méduses et d’anémones, dont il extrait une enzyme, la caoutchoutase, qui lui permet de digérer… le caoutchouc ».
« Si la digestion du caoutchouc fournit à Caoutchoutis une partie de l’énergie dont il a besoin, cela libère aussi de nombreuses substances toxiques présentes dans ses menus, tel le cadmium. Sa résistance élevée à ces contaminants résulte d’un système excréteur éliminant très efficacement les métaux lourds… »