En quelques jours, trois recherches pointent des liens potentiels entre la composition du microbiote intestinal et la santé mentale.
La première de ces découvertes a été faite en Belgique. On la doit au Pr Jeroen Raes, qui avait déjà mis en évidence en 2011 l’existence de plusieurs types de flores intestinales (un peu comme il existe divers groupes sanguins). Le Pr Raes, qui entretemps est passé de la VUB à la KULeuven, montre aujourd’hui que certaines bactéries dans le microbiote intestinal sont systématiquement moins nombreuses chez les personnes dépressives. « Ceci ne signifie pas qu’il existe un lien de cause à effet, mais bien une corrélation entre ces deux observations », précise-t-il.
La relation entre le métabolisme microbien de l’intestin et la santé mentale est un sujet complexe dans la recherche sur les microbiomes. La communication entre le cerveau et les microbes de l’intestin a surtout été explorée dans des modèles animaux. La recherche chez l’humain a pris du retard. C’est ici que les travaux de Jeroen Raes sont intéressants.
Le chercheur et son équipe ont analysé des échantillons de selles provenant de plus de 1054 personnes inscrites au Flemish Gut Flora Project (FGFP). Ils ont ainsi pu observer que deux familles de bactéries (Coprococcus et Dialister) étaient systématiquement moins nombreuses chez les personnes dépressives, y compris celles qui étaient sous traitement par antidépresseurs. Un constat « confirmé » lors de l’analyse des données provenant d’un autre groupe de 1063 personnes (une cohorte néerlandaise du projet « LifeLinesDEEP »).
Une signature de la schizophrénie
La seconde étude portant sur les liens potentiels entre la composition du microbiote et la santé mentale est chinoise. « La diversité et la composition des bactéries dans le microbiome intestinal des patients atteints de schizophrénie sont très différentes de celle des patients sains », rapportent les chercheurs, qui ont travaillé sur des souris. Leurs travaux ont également révélé que le transfert du microbiote de spécimens atteint de schizophrénie à des souris exemptes de germes a entraîné des changements comportementaux et neurochimiques et développant des symptômes semblables à ceux de cette maladie.
« Ces résultats suggèrent que les modifications du microbiote intestinal peuvent potentiellement contribuer à l’apparition de pathologies de ce genre en modulant les voies métaboliques microbiotiques, intestinales et cérébrales », estiment-ils.
Des troubles intestinaux annonciateurs de la maladie de Parkinson?
« Enfin, il pourrait aussi exister des liens entre la maladie de Parkinson et certaines populations de microbes dans nos intestins », estime de son côté le Dr Filip Scheperjans, du département de neurologie de l’hôpital universitaire d’Helsinki, en Finlande.
« Au cours des vingt dernières années, il est devenu évident que la maladie de Parkinson est associée à une série de symptômes gastro-intestinaux découlant de changements fonctionnels et structurels de l’intestin, et de ses structures neurales associées », écrit-il, dans une revue de la littérature sur le sujet.
« Ceci est particulièrement intéressant non seulement parce que ces symptômes ont un impact majeur sur la qualité de vie des patients atteints de la maladie de Parkinson, mais aussi parce que l’accumulation d’indices suggère que chez au moins un sous-groupe de patients, ces troubles précèdent les symptômes moteurs et le diagnostic de la maladie de Parkinson de plusieurs années et peuvent donc donner des informations importantes sur l’origine et la pathogenèse de la maladie »…