Cela ressemble à un pacemaker. Toutefois, le dispositif dont il est question ici ne vise pas à stimuler le cœur quelque peu « paresseux » de patients souffrant de battements trop irréguliers ou trop peu fréquents. Il aide surtout à les resynchroniser.
« Chez une partie non négligeable des patients souffrant d’insuffisance cardiaque, c’est, en effet, un problème de mauvaise synchronisation entre la contraction des oreillettes et des ventricules qui est en cause », indique le Dr Pieter Martens.
Le médecin termine actuellement sa spécialisation en cardiologie à Louvain. Dans le cadre de ses recherches, il a concentré ses travaux sur ce problème de synchronisation chaotique du cœur et sur la manière d’y remédier. Ou du moins de mieux utiliser la TRC, la thérapie de resynchronisation cardiaque. Des travaux dont la qualité lui a valu d’être sacré lauréat du Prix Jacqueline Bernheim 2020, décerné par le Fonds pour la Chirurgie cardiaque.
Trop peu d’insuffisants cardiaques bénéficient d’une resynchronisation
L’insuffisance cardiaque est une des principales affections dont souffre le cœur. En ne battant pas de manière optimale, il n’expédie pas suffisamment de sang dans l’organisme, et donc d’oxygène. Parmi les problèmes que cela entraîne, on retrouve des cas d’essoufflement, de vertige, de fatigue…
« La thérapie de resynchronisation cardiaque (TRC) est l’une des thérapies les plus efficaces pour les patients souffrant d’insuffisance cardiaque de ce type», précise le spécialiste. « Malheureusement, elle reste sous-utilisée chez nous. À peine un patient sur quatre qui pourraient y prétendre en bénéficie effectivement ».
D’où ses recherches de thèse qui ont porté sur divers aspects de la mise en place d’une thérapie de resynchronisation cardiaque et sur ses bénéfices.
« Ce problème de synchronisation dans les battements du cœur peut se manifester de diverses manières », explique-t-il. « Il peut, par exemple, s’agir de ratés dans les contractions des ventricules, de dyssynchronie entre les ventricules et les oreillettes ou encore de problèmes survenant au sein même du ventricule gauche, qui éjecte dans l’organisme le sang riche en oxygène provenant des poumons. »
« Bien que la TRC puisse générer une amélioration de l’efficacité ventriculaire », indique le médecin, « elle améliore aussi la situation au niveau des oreillettes. Le degré de stimulation auriculaire droite que les patients peuvent recevoir est propre à chacun et demande à être parfaitement programmé. En étudiant les déformations de l’oreillette gauche, nos recherches ont montré que la stimulation de l’oreillette droite peut également induire une forme de dyssynchronie entre les oreillettes. Ce qui présente d’autres risques pour le cœur. »
Informer la communauté des cardiologues
Dans sa thèse de quelque 300 pages, le spécialiste s’est aussi intéressé aux effets que la TRC pouvait avoir sur le métabolisme cardiaque. Il a également analysé l’impact de la mise en place d’un tel traitement sur toute une série d’interventions ou de problèmes connexes, comme le problème des arythmies, l’impact de certains médicaments sur les patients chez lesquels un dispositif de TCR est implanté ou encore des cas de carences en fer.
On l’a vu plus haut, seul un patient sur quatre bénéficie actuellement de ce type d’aide. Pieter Martens a analysé les critères de sélection des patients susceptibles de pouvoir tirer un bénéfice d’une telle thérapie de resynchronisation cardiaque. Le but de sa thèse visait notamment à améliorer l’utilisation de cette technique dans la pratique clinique quotidienne des cardiologues. Ses recherches ont donc débouché sur la co-rédaction d’un guide de nouvelles « bonnes pratiques » à l’attention des spécialistes (« joint position statement »), avalisé par plusieurs associations européenne de santé cardiaque.
« La thérapie de resynchronisation cardiaque est l’un des traitements les plus efficaces de l’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection réduite », rappelle, dans ce document, le lauréat du Prix Bernheim et ses collègues. « Elle permet d’améliorer la qualité de vie des patients et de réduire les taux d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, ainsi que la mortalité, toutes causes confondues ».
Pour augmenter le nombre de patients susceptibles de bénéficier de cette thérapie, les spécialistes proposent une nouvelle stratégie. Elle passe par une meilleure compréhension des caractéristiques préimplantatoires du dispositif, du remplacement du terme de « non-réponse » du patient au traitement par le concept de « modification de la maladie », ceci afin de juger de son efficacité, mais aussi de la mise en place d’un parcours de soins post-implantatoires d’un tel dispositif.
Autant de conseils que le Dr Pieter Martens ne manquera pas de suivre lui-même au cours des années qui viennent. Dès la fin de sa formation de spécialiste en Belgique, dans quelques semaines, il mettra le cap sur les États-Unis et plus particulièrement sur la Clinique de Cleveland, en Ohio, pour parfaire sa formation. Avant de revenir dans deux ans en Belgique, et de mettre ses connaissances en pratique à l’hôpital du Limbourg oriental, situé à Genk.