Le premier satellite Météosat de troisième génération (MTG) vient de prendre le chemin de l’orbite géostationnaire. Lancé dans la nuit de mardi à mercredi depuis Kourou, en Guyane française, par Arianespace, ce concentré de technologies construit par Thales Alenia Space pour le compte de l’ESA (Agence spatiale européenne) et d’EUMETSAT ouvre la voie à des observations météorologiques d’une qualité exceptionnelle.
Meteosat Third Generation-Imager 1 (MTGI1) est en réalité le premier satellite d’un nouveau système de trois engins qui devraient fournir aux prévisionnistes des observations d’une précision jamais atteinte. C’est aussi la constellation de satellites météorologiques en orbite géostationnaire la plus complexe et innovante jamais construite.
Voir l’invisible depuis 36.000 km d’altitude
Une fois pleinement déployée, elle permettra pour la première fois aux météorologues européens de surveiller le cycle complet de développement d’une cellule orageuse, de la perturbation atmosphérique initiale actuellement invisible par les anciens satellites aux premiers éclairs.
Le premier de cette flotte, MTGI1 est doté d’un imageur « combiné flexible » (FCI ou « Flexible Combined Imager ») qui va « photographier » toutes les dix minutes l’ensemble du disque terrestre observé depuis une orbite géostationnaire située juste au-dessus de l’Afrique. Un second MTGI devrait augmenter cette capacité en fournissant toutes les 2,5 minutes une image détaillée de la situation au-dessus de l’Europe.
Ces deux MTGI disposent également d’un instrument révolutionnaire. Pour la première fois, un détecteur de foudre va pouvoir suivre en direct et en continu le développement d’éclairs, et donc d’orages, depuis cette même orbite.
Plongée au cœur de l’atmosphère
« Cette détection précoce des orages et surtout des orages violents au fur et à mesure qu’ils se développent, c’est là une des grandes avancées que les satellites MTG vont pouvoir apporter aux prévisions météorologiques », commente Donny Aminou, responsable du programme MTG de l’ESA.
« La combinaison de ces deux instruments va nettement améliorer la qualité des prévisions et permettre de mieux comprendre le comportement de l’atmosphère, y compris en ce qui concerne les changements climatiques », indique de son côté Sylvain Le Moal, responsable du pôle valorisation des données satellitaires chez Météo-France.
Le troisième satellite de ce système comportera, pour sa part, un détecteur infrarouge et l’instrument européen Sentinel-4.
Un satellite qui remplace des milliers de ballons sondes
« Ce sondeur infrarouge en orbite géostationnaire est une première qui va notamment permettre d’obtenir des profils de température et d’humidité de l’atmosphère en 3D toute les heures, voire les demi-heures», détaille de son côté Pierre Armand, directeur du programme MTG chez le constructeur du satellite, Thales Alenia Space.
« C’est comme si on lançait des milliers de ballons sondes partout sur Terre et depuis les mers. Avec l’ajout de la quatrième dimension (le temps qui s’écoule entre les mesures) cela va permettre d’améliorer considérablement la qualité des prévisions météorologiques à court terme comme sur le long terme », dit-il.
« MTG est le système le plus complexe et le plus innovant jamais construit », confirme Susanne Dieterle, responsable système d’EUMETSAT. « Les quantités de données qui seront envoyées aux utilisateurs sera 50 fois supérieure à ce que fournissent actuellement les MSG, les satellites du système Météosat de seconde génération ».
L’air que nous respirons suivi à la trace
D’autant que le troisième mousquetaire de ce système opérationnel est également équipé de l’instrument européen Sentinel-4. Ce dernier viendra compléter les données des MTG avec des observations réalisées dans l’ultraviolet et l’infrarouge proche. De quoi détecter et quantifier la nature des aérosols présents dans l’atmosphère au dessus de l’Europe, comme l’ozone, le dioxyde d’azote ou les oxydes de soufre. Et donc mieux surveiller, toutes les 60 minutes, la qualité de l’air que nous respirons.
Avec les satellites du système MTG, les météorologues disposeront plus rapidement d’informations toujours plus précises sur l’évolution de l’atmosphère et les phénomènes extrêmes qui s’y préparent. Et ce pour vingt ans. Chaque engin dispose d’une durée de vie en orbite de huit ans et demi minimum. Leur lancement va s’échelonner sur plusieurs années. Outre MTGI1 qui vient d’être expédié en orbite, le sondeur MTGS devrait le rejoindre à 36.000 km de la Terre, en 2024. Le troisième satellite, MTGI2, devrait, lui, être lancé en 2026. Leurs doublures prendront le relais progressivement.