La détection d’un anévrisme n’est jamais une bonne nouvelle. Cette boursoufflure qui apparaît sur un vaisseau sanguin entraîne sa fragilisation. Si l’anévrisme se rompt, cela génère un saignement indésirable qui peut être particulièrement dangereux. Notamment, si la rupture d’anévrisme se situe au niveau de l’aorte, l’artère principale qui part du cœur pour irriguer tout l’organisme.
« Quand cette boursoufflure se manifeste chez un patient de plus de 80 ans et qu’elle se situe au niveau de la crosse aortique, le défi qui s’impose aux cardiologues est encore plus grand », indique le Pr Parla Astarci, responsable de l’Institut cardiovasculaire des Cliniques Saint-Luc (UCLouvain).
Alternative à une chirurgie à cœur ouvert
« Traditionnellement, on opère ce genre d’anévrisme via une intervention chirurgicale lourde, à cœur ouvert, et qui dure six à sept heures », précise-t-il. « Cela implique d’arrêter le cœur et de refroidir le patient qui bénéficie d’une circulation sanguine extra-corporelle. Une intervention risquée chez un patient de cet âge. »
Dans ce genre de pathologie, les médecins placent généralement un stent, un petit ressort, qui tapisse l’intérieur de l’artère touchée par cette boursoufflure. Une fois l’artère gainée, l’arrivée du sang est bloquée dans l’anévrisme, formant un caillot. Résultat: l’anévrisme se bouche, éliminant le risque de rupture.
Stent multibranche
L’anévrisme qui vient d’être opéré à Saint-Luc par le Pr Astarci et ses collègues se situait sur la crosse aortique. « La crosse aortique est le point de départ de plusieurs artères, de plusieurs branches, comme les carotides et celles des bras. En clair, elle nourrit en sang la tête et les membres supérieurs », précise le chirurgien.
« Avec ses différents embranchements, la crosse aortique constituait jusqu’alors une zone complexe et difficilement accessible pour les approches mini-invasives, passant par les voies endovasculaires. Nous avons cependant choisi d’opter pour cette technique endovasculaire. Nous insérer chez notre patient de 83 ans, un gros stent de ce genre, avec ses orifices et ses branches. C’est une première. »
« Cela nous a permis de ne pas devoir arrêter son cœur. Nous sommes passés par ses artères au niveau du bras droit et de l’artère fémorale droite. Tout le matériel a ainsi été amené à destination et installé. L’opération a été réalisée sous une anesthésie générale légère. L’intervention n’a pas duré plus de deux heures et demie. Et elle a été couronnée de succès. »
Une intervention à 35.000 euros
Cette première réalisée en Belgique concerne tant le matériel utilisé que la technique déployée au niveau de la crosse aortique. « Le patient se porte bien. Il a pu rentrer chez lui sur ses deux jambes, sept jours après l’intervention. Il poursuit sa convalescence à domicile. Nous le reverrons dans quelques jours », précise le médecin.
Cette intervention mini-invasive, sans ouverture du thorax, ouvre donc des perspectives de prise en charge pour les patients âgés. Mais elle a aussi un coût. « Cette prothèse et cette technique coûtent quelque 35.000 euros », précise le Pr Astraci. « Pour cette première, les coûts ont été pris en charge par l’hôpital. Pour les patients suivants, ce type de prothèse et de technique devra faire l’objet de financements. Et, à terme, d’une prise en charge par la sécurité sociale. »
« Si le stent à branches a déjà été utilisé dans des chirurgies abdominales, il s’agissait d’une première en chirurgie dans le cadre d’une intervention thoracique », précise encore le médecin.
Des patients plus jeunes, pourraient-ils également bénéficier de ce type d’intervention? « Sans doute », estime encore le Pr Astarci, qui conclut: « mais pour ceux-ci, une intervention plus classique s’avère sans aucun doute plus indiquée. »