Les sécheresses étant de plus en plus intenses et fréquentes, elles contraignent les chercheurs à trouver de nouvelles stratégies afin d’adapter les cultures à ce nouvel environnement. Une piste consiste à sélectionner des plantes dont le système racinaire optimise l’absorption de l’eau contenue dans le sol. Afin de l’investiguer, Guillaume Lobet, professeur à la Faculté des bioingénieurs et au Earth Life Institute (ELI) de l’UCLouvain, vient de décrocher un financement européen ERC Consolidator Grant.
Un lien entre diamètre des racines et capacité d’absorption hydrique
Son projet, dénommé DROOGHT (Improving cereal yield predictions under drought: root diameter as a predictor of plant water uptake across scales), vise à identifier les caractéristiques structurelles des racines qui contrôlent l’absorption de l’eau par les plantes en cas de sécheresse. Cette étude formule l’hypothèse qu’il existe un lien entre le diamètre des racines et la capacité de la plante à absorber l’eau.
Simple ? En apparence seulement. « Pour des raisons techniques, le diamètre des différentes racines est un trait qui n’est pas souvent estimé par les outils d’analyse d’images traditionnels », détaille le lauréat ERC. « D’autre part, sur base de cette information, on doit disposer de modèles informatiques qui permettront, à partir d’un élément relativement simple, de l’extrapoler à une information complexe. »
Simuler le flux d’eau qui passe d’une cellule à l’autre
Voilà dix ans que l’équipe de scientifiques de l’UCLouvain développe une série d’outils qui permettent de faire le lien entre ce trait simple et une fonction extrêmement importante pour la plante, le prélèvement d’eau.
« Aujourd’hui, on n’est pas encore parvenu à faire une connexion complète entre ce trait et le champ, mais on dispose de tous les outils nécessaires. Des connexions ont déjà été établies entre certains d’entre eux. L’objectif du projet est d’établir une connexion complète entre ces différents outils qui, pour certains, n’existent qu’au sein de notre laboratoire», détaille le chercheur.
Concrètement, les scientifiques vont observer les flux d’eau dans la plante – ici le blé, dont l’organisation des tissus et racines est similaire à celle d’autres céréales -, ce qui peut se faire à différentes échelles. Par exemple, on peut quantifier précisément la manière dont l’eau va passer du sol à la racine, composée elle-même de vaisseaux chargés du transport de l’eau.
« Des modèles vont nous permettre de représenter, de manière informatique, le réseau de cellules qui forment la racine. Sur ce réseau, on pourra ensuite simuler, sur base de règles physiques, le flux d’eau qui passe d’une cellule à l’autre », explique Guillaume Lobet.
Passer d’une racine à l’autre et atteindre les feuilles
Un autre outil sera, non pas une représentation des différentes cellules qui forment une racine, mais des modèles informatiques qui représentent l’entièreté du système racinaire. Dans ce cas, les scientifiques simuleront la façon dont l’eau passe d’une racine à l’autre pour arriver jusqu’aux feuilles.
Autrement dit, au lieu d’avoir des centaines de cellules connectées pour former une racine, il s’agira ici d’un modèle composé de milliers de racines connectées pour former une plante. « Ce sont déjà deux types de modèles ou d’échelles que l’on pourra relier. »
Par la suite, ces observations pourront être étendues à d’autres céréales comme le maïs, le riz, le sorgho, l’orge… le blé étant une plante suffisamment commune pour pouvoir transférer les résultats.
Le projet DROOGHT est porté par l’UCLouvain, l’Institut Agrosphere (Forschungszentrum Juelich, Allemagne) où Guillaume Lobet est également professeur, en collaboration avec l’INRAE de Montpellier et le Centre wallon de recherches agronomiques (CRA-W).