Les forêts tropicales fragmentées poussent moins haut, qui aime bien… « challenge » bien, un médicament déjà sur le marché pourrait servir d’antidote au venin de cobra, des greffes sans rejets et sans médicaments immunosuppresseurs.
À la rédaction de Daily Science, nous repérons régulièrement des informations susceptibles d’intéresser (ou de surprendre) nos lecteurs et lectrices. À l’occasion de notre dixième anniversaire, nous relançons deux fois par mois notre rubrique du week-end « les yeux et les oreilles de Daily Science ». Avec, pour celle-ci, et à la demande de notre lectorat, un regard plus international.
Les forêts tropicales fragmentées poussent moins haut
La fragmentation des forêts tropicales, due à l’expansion de l’agriculture ou des routes, réduit la hauteur de la canopée et de la biomasse de 20 à 30 % en lisière des forêts. C’est ce qu’on appelle l’effet de lisière : celui-ci avait été, jusque-là, largement sous-estimé. C’est l’un des résultats d’une nouvelle étude à laquelle ont participé des scientifiques français ainsi que du Centre commun de recherche de l’Union européenne à Ispra (Italie).
Cet effet s’étend encore plus loin dans la forêt, notamment par le biais d’altérations microclimatiques. La hauteur de la canopée et la biomasse peuvent être modifiées jusqu’à 1500 mètres à l’intérieur de la forêt intacte. Cet effet de lisière global menace potentiellement jusqu’à 18 % des forêts tropicales humides.
« L’étude a également confirmé que les perturbations, comme l’exploitation forestière non durable, peuvent diminuer la hauteur de la canopée de 20 % environ sur une période de 20 à 30 ans et que les feux provoquent des dommages beaucoup plus conséquents, avec des diminutions allant de 40 à 60 % de la hauteur de canopée », précise Lilian Blanc, écologue forestier au Cirad et co-auteur de l’étude.
De plus, « le temps de reconstitution de la forêt après perturbation est extrêmement long. Trente ans après perturbations, la forêt retrouve moins de 60 % de la hauteur et de la biomasse correspondant à celles des forêts intactes », ajoute un de ses collègues.
Qui aime bien… « challenge » bien!
Les membres d’un même groupe (des personnes d’une même communauté, d’une même ville ou d’un même pays) sont étonnamment davantage en concurrence les uns avec les autres qu’avec les étrangers. C’est ce que révèle une étude européenne portant sur 15.000 personnes issues de 51 pays.
« Les gens ont tendance à s’unir autour d’une langue, d’une culture, d’une nationalité ou d’une affiliation politique, créant ainsi des “intergroupes” orientés autour d’un point commun », relatent les chercheurs. « Les membres de l’intergroupe («insiders») sont plus enclins à favoriser le bien-être de la communauté et à coopérer pour le bénéfice collectif de leur groupe ».
Les scientifiques pensaient depuis longtemps que les insiders préféraient également entrer en concurrence avec des outsiders plutôt qu’entre eux. Peu d’études ont cependant testé cette hypothèse. Leurs travaux montrent que, si les membres d’un groupe préfèrent la coopération au sein du groupe, ils favorisent également la compétition au sein de ce même groupe. Une attitude qu’on observe aussi chez des insectes sociaux, les oiseaux vivant en groupe et certains mammifères.
Comment les chercheurs sont-ils arrivés à cette conclusion? Une de leurs expériences (réalisée dans ce cas précis en ligne) a été menée de la manière suivante. Les participants ont chacun reçu 10 unités monétaires et se sont vu attribuer un rôle d’attaquant ou de défenseur. Placés par paires, les participants devaient choisir d’investir dans une cagnotte commune ou de conserver les unités. Un mauvais choix entraînait une perte d’argent. Au cours de ce jeu, les participants savaient si leur adversaire était du même pays, d’un pays différent ou d’un pays anonyme.
Les chercheurs s’attendaient à ce que la confiance soit plus grande et la compétition moins forte entre compatriotes qu’avec des étrangers ou des inconnus. Au contraire, ils ont constaté que les participants investissaient davantage de ressources lorsqu’ils étaient en concurrence avec leurs concitoyens.
Un médicament déjà sur le marché pourrait servir d’antidote au venin de cobra
En étudiant dans le détail les caractéristiques moléculaires du venin de cobra, des scientifiques de Liverpool (Royaume-Uni) et de Sydney (Australie) ont découvert qu’un médicament de la classe des héparinoïdes (un anticoagulant), déjà disponible sur le marché, pouvait faire barrage aux effets du venin sur les tissus situés au niveau de la morsure. Une découverte réalisée sur des cultures cellulaires et sur des souris.
L’attrait de cette découverte réside dans le fait que les composés à base d’héparine ne nécessitent pas de réfrigération comme la plupart des anti-venins à base d’anticorps, ce qui rend les héparinoïdes particulièrement utiles dans les régions isolées dépourvues d’infrastructures médicales.
« Les morsures de serpent tuent environ 138.000 personnes chaque année », rappellent les chercheurs, « principalement des jeunes adultes et des enfants en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud et du Sud-Est. Les morsures de serpent concernent principalement les communautés rurales pauvres, qui n’ont pas souvent accès aux installations médicales permettant de stocker et d’administrer des anti-venins. En outre, les anti-venins actuels ne peuvent pas protéger les tissus locaux proches du site de la morsure contre les effets immédiats du venin, et ne peuvent donc pas empêcher la mort des tissus, les amputations et les handicaps qui en découlent ». D’où l’intérêt de leur découverte.
Des greffes sans rejets et sans médicaments immunosuppresseurs
« Malgré les progrès dans le domaine de la transplantation d’organes, le rejet des greffons reste un obstacle majeur », constatent les chercheurs de l’école supérieure de médecine d’Hanovre (Allemagne). « Près de 25 % des receveurs de greffes de rein perdent leur organe dans les cinq ans, et les résultats sont encore pires pour les receveurs de greffes de poumon », précisent-ils.
Ils ont dès lors exploré la piste du génie génétique pour tenter de limiter ces cas de rejets d’organes par le système immunitaire du receveur. Les receveurs de greffes d’organes doivent en effet prendre des médicaments immunosuppresseurs, ce qui entraîne par ailleurs toute une série d’effets secondaires.
Pour surmonter cet obstacle, Costanca Figueiredo et ses collègues ont inhibé l’expression des antigènes leucocytaires porcins dans les poumons des porcs afin d’éviter les réactions immunitaires, puis ont effectué des transplantations pulmonaires avec sept organes modifiés et sept organes non modifiés, toujours chez de porcs.
Après une période initiale de quatre semaines, l’équipe a interrompu tous les traitements immunosuppresseurs. Bien que tous les porcs du groupe non modifié aient rejeté les greffes dans les trois mois, cinq des sept animaux du groupe modifié ont conservé leurs greffes de poumons pendant le reste de la période d’étude de deux ans. Ces approches « pourraient apporter une solution idéale à de nombreux problèmes rencontrés après la transplantation, en offrant aux receveurs une vie sans rejet et sans immunosuppression, une meilleure survie du greffon et une meilleure qualité de vie », conclut l’équipe.