Immersion glaciaire pour décoder l’évolution du climat sur plus d’un million d’années

24 octobre 2024
par Daily Science
Temps de lecture : 3 minutes

La COP29, qui se déroulera du 11 au 22 novembre 2024 à Baku en Azerbaïdjan, espère attirer l’attention du monde sur les défis climatiques. A l’approche de cet évènement d’importance, Lisa Ardoin, doctorante au laboratoire de Glaciologie de l’ULB, s’apprête à partir pour une expédition majeure en Antarctique où elle représentera la Belgique au sein d’une équipe internationale.

Remonter dans le temps

En Antarctique, une équipe scientifique aura pour mission de forer une carotte de glace vieille de plus de 1,5 million d’années et acheminer les résultats en Europe. Une entreprise qui pourrait fournir des clés essentielles pour comprendre l’évolution du climat mondial. L’expédition fait partie de la mission Beyond EPICA Oldest-Ice Core, un projet européen ambitieux. L’objectif ? Forer à 2,7 km de profondeur dans les glaces antarctiques afin de recueillir un enregistrement climatique continu, bien plus ancien que le record actuel de 700 000 ans.

“Nous espérons atteindre une période jamais encore documentée directement, située entre 900 000 et 1,2 million d’années. Cette fenêtre temporelle nous permettra de mieux comprendre les variations des cycles climatiques et leurs relations avec les gaz à effet de serre”, précise Lisa Ardoin.

Une logistique tirée au cordeau

La réalisation de ce projet nécessite une logistique rigoureuse, car chaque jour sur la glace est précieux. Les conditions météorologiques et la gestion du transport des échantillons posent des défis considérables. “Les carottes de glace doivent être conservées à des températures extrêmes et leur transport doit être minutieusement planifié”, explique la chercheuse.

Lors de la mission précédente, plus d’un kilomètre de carottes a été acheminé avec succès en Europe, pour être ensuite découpé et traité à l’AWI, à Bremerhaven, en Allemagne. Ce transport complexe et coûteux impose de maximiser chaque minute sur place.

Des archives climatiques

Au-delà du simple record, ces carottes de glace sont une source inestimable d’informations pour la climatologie. Elles offrent un aperçu unique des variations passées de température et de la composition de l’atmosphère, piégeant dans leurs bulles d’air les gaz à effet de serre du passé. Ces données permettent de retracer les changements climatiques majeurs et cycles du carbone.

“Ces glaces sont les archives les plus précieuses que nous ayons pour analyser directement le climat du passé,” insiste Lisa Ardoin.

D’autres disciplines, telles que l’histoire ou la vulcanologie, profitent également de ces données à haute résolution.

Une expérience hors du commun

Dans le cadre de sa thèse de doctorat, Lisa Ardoin, géologue de formation, s’intéresse aux glaces, et plus particulièrement à celles en contact avec le sol sous les calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique. Son expertise sera un atout si le socle rocheux de l’Antarctique est atteint cette année. Sa mission, longue de trois mois sur place, s’étalera du 9 novembre 2024 au 7 février 2025.

À 28 ans, elle s’apprête à vivre une expérience unique sur un terrain aux conditions météorologiques extrêmes qu’elle découvrira pour la première fois. « L’altitude sera un défi », dit-elle, car à Concordia, bien que située à 3 000 mètres, l’atmosphère raréfiée donne l’impression d’être à 4 000 mètres.
Passer les fêtes de fin d’année loin de ses proches en sera un autre… Mais pour la chercheuse, la mission en vaut la peine. « C’est une chance incroyable d’être sur le terrain et de contribuer à des recherches qui vont profondément améliorer notre compréhension du climat. »

Le projet de recherche Beyond EPICA a démarré en 2019 et doit durer 7 ans. Il est coordonné au niveau européen par Carlo Barbante, professeur à l’université de Venise. L’ULB et 11 centres de recherche de 10 pays européens sont impliqués, ainsi que 2 agences logistiques (IPEV en France et PNRA en Italie).

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