PODCAST
Série : Prix Quinquennaux du FNRS (5/6)
Lauréat du prix Quinquennal en sciences exactes appliquées (Prix Dr. A. De Leeuw-Damry-Bourlart), François-Xavier Standaert est Directeur de recherches FNRS au sein du Crypto Group de l’UCLouvain. Selon le jury, ce scientifique est « l’un des meilleurs chercheurs au monde dans le domaine du matériel cryptographique et des systèmes embarqués. Il est à l’origine de principes fondamentaux permettant la construction de matériel informatique résistant aux fuites et la mise en œuvre de protocoles et d’algorithmes cryptographiques dans des logiciels.»
Que représente un prix tel que le Prix Quinquennal qui lui est attribué? Va-t-il influencer sa manière de travailler, la suite de ses travaux, de sa carrière, peut-être même l’orientation de ses recherches ?
« Je ne crois pas », dit-il. « De la même manière que ne pas obtenir de prix, cela ne change pas fondamentalement mes orientations ou ce que je pense intéressant. Pour moi, l’intérêt des choses est assez indépendant de l’intérêt un peu conjoncturel que d’autres peuvent avoir pour ma recherche ou ne pas avoir pour ma recherche.»
« Une carrière scientifique est faite de moments de reconnaissance et de moments d’absence de reconnaissance. Les deux sont intéressants et permettent d’avancer. Un prix de ce type donne cependant une visibilité qui est fort différente de la visibilité purement académique.»
Un groupe de recherche est un lieu de liberté académique
« Ce qui n’est pas forcément confortable, d’ailleurs », estime-t-il. « Ce n’est pas directement évident de vulgariser, de parler à un autre public. Et je pense que c’est vrai que pour des sujets plus techniques ou moins exposés médiatiquement. Il peut être utile de rappeler qu’ils sont intéressants au niveau scientifique, qu’ils sont pertinents au niveau sociétal, qu’ils sont parfois porteurs d’opportunités économiques. Tout le monde connaît, par exemple, les enjeux de la recherche liée au cancer. Ce n’est pas forcément le cas pour la recherche en cryptographie ou en sécurité matérielle. J’espère que ce prix aidera à établir un peu mieux la cryptographie comme domaine d’enseignement à l’avenir. A titre personnel, je suis assez convaincu que c’est un sujet important pour les étudiants et les étudiantes, ingénieurs notamment. Et que ce domaine ouvre la voie vers un avenir professionnel stimulant intellectuellement, soit d’un point de vue académique, soit industriel.»
Mais qu’est-ce qui continue à le motiver encore tous les jours pour ce type de recherche? « Je pense que c’est ce moment très plaisant d’éclaircissement conceptuel qui arrive parfois. Il faut être patient, ça ne vient pas tous les mois, voire toutes les années. Cela arrive même parfois après des années d’efforts, et c’est très agréable de voir alors apparaître quelque chose clairement. Il y a aussi tout ce dialogue qu’on peut avoir avec une communauté scientifique qui a des points de vue très divers, avec le monde industriel qui pose quand même pas mal de défis, et avec les différents organes de la société civile. Et puis il y a vraiment le fait de maintenir un groupe de recherche qui est un lieu de liberté académique, qui permet des interactions fructueuses qui servent de tremplin pour des vies professionnelles intéressantes, épanouissantes pour les chercheurs et les chercheuses. »
« Ce que j’aime dans la recherche fondamentale, c’est le fait de réfléchir de façon complètement gratuite à des phénomènes et d’essayer de les comprendre en profondeur. Ce qui me semble être à la fois très humain et très fragile dans le monde actuel, parce qu’il n’y a pas vraiment d’utilité commerciale directe à tout cela.»