
On a en tête des images d’extraterrestres, pacifiques ou agressifs. Curieux de nous connaître. Ou désireux de conquérir notre planète. De nous réduire en esclavage… Dans «Le grand livre de l’exobiologie» richement illustré, 28 astrophysiciennes, astrophysiciens, chimistes, biologistes, géologues, un épistémologue, et un historien des sciences ont imaginé un voyage dans le temps et dans l’espace aux éditions Belin-Éducation. Sous la direction d’Hervé Cottin et Muriel Gargaud. De courtes vidéos prolongent le livre.
Aucune trace de vie
«C’est dans la seconde moitié du XXe siècle que la science s’est emparée sérieusement de la question de la vie extraterrestre», expliquent le spécialiste en exobiologie Hervé Cottin de l’Université Paris-Est Créteil et l’astrophysicienne Muriel Gargaud de l’Université de Bordeaux. «Le mot exobiologie a été proposé au début des années 1960 par le biologiste moléculaire états-unien Joshua Lederberg, prix Nobel de médecine en 1958. À l’époque, la préoccupation principale était de prévenir toute contamination de la Terre par de potentiels organismes extraterrestres qui pourraient être rapportés depuis la Lune par les futures missions spatiales.»
«Si à ce jour aucune trace de vie, actuelle ou passée, n’a été détectée sur Mars ou ailleurs, l’exobiologie est devenue l’un des nouveaux horizons du savoir à conquérir. Et l’un des moteurs pour le progrès des connaissances scientifiques.»
Une chimie similaire existerait
Deux chercheuses belges ont participé au périple commencé avec la formation des planètes, il y a environ 4,5 milliards d’années. Emmanuelle Javaux et Kristin Bartik, membres de l’Académie royale de Belgique.
L’eau à l’état liquide est indispensable à toute forme de vie… «L’exigence de l’état liquide ne fait généralement pas partie de la définition d’un système vivant», explique l’ingénieure chimiste Kristin Bartik. «Il y est possible d’atteindre des concentrations plus élevées qu’en phase gazeuse. Et les espèces moléculaires peuvent diffuser plus facilement qu’à l’état solide. La probabilité de contact entre molécules est de ce fait plus grande. Laissant entrevoir de plus la possibilité de leur organisation.»
La chimie du vivant est la chimie du carbone. «La capacité du carbone à former une quasi-infinité de structures chimiques excède celle de la plupart des autres éléments en raison en particulier de son électronégativité», précise la professeure à l’École polytechnique de l’ULB. «Plus un élément est électronégatif, plus il attire vers lui les électrons au sein d’une liaison chimique. La stabilité des liaisons covalentes impliquant le carbone et les autres éléments qui lui sont associés en chimie organique explique aussi que des architectures extrêmement complexes puissent être formées.»
Pour la chercheuse, «une chimie similaire à celle qu’on pense nécessaire pour l’émergence de la vie sur Terre existerait partout dans les systèmes planétaires à travers l’Univers.»
Les premiers eucaryotes
La paléobiologiste Emmanuelle Javaux se focalise sur l’évolution de la vie pendant les 4 premiers milliards d’années. «La diversité biologique est principalement microbienne et donc, en majorité, microscopique, depuis l’origine de la vie.»
Cette diversité microbienne s’observe dans les 3 domaines du vivant actuel. Les bactéries unicellulaires sans noyau dont les ribosomes traduisent le code génétique en protéines par l’intermédiaire de l’ARN messager, l’acide ribonucléique messager, le composant qui a permis d’administrer les vaccins lors de la pandémie de covid-19. Les archées avec une cellule sans noyau. Les eucaryotes aux cellules avec noyau. Leur grande majorité est constituée de protistes. D’organismes qui jouent des rôles cruciaux dans les écosystèmes aquatiques et terrestres. Ils contribuent à la production d’oxygène. À la fixation du carbone.
«Le plus ancien fossile que l’on puisse comparer à un eucaryote actuel est une algue rouge multicellulaire appelée ‘Bangiomorpha pubescens’», indique la professeure au département de géologie de la Faculté des sciences à l’ULiège. «Elle a été identifiée sur la base de détails morphologiques, de son mode de division et de son habitat. Il s’agit de filaments microscopiques qui vivent attachés aux fonds marins, sous une faible profondeur d’eau, dans une zone encore éclairée par le Soleil. Ils sont datés, avec une bonne précision, à un peu plus d’un milliard d’années.»
Cela implique pour la chercheuse que l’ancêtre unicellulaire de cette algue est apparu plus tôt. Et que les algues se sont diversifiées plus tôt. Les eucaryotes photosynthétiques, algues puis plantes, dérivent d’un événement ancien, l’endosymbiose primaire. Lorsqu’un protiste a incorporé une cyanobactérie capable de photosynthèse.
Les fossiles eucaryotes permettent de retracer «la temporalité, les causes et modes d’évolution et de diversification du domaine des eucaryotes. Et son rôle dans les écosystèmes anciens».