Chaque semaine, à la rédaction de Daily Science, nous repérons sur le web diverses informations susceptibles d’intéresser (ou de surprendre) nos lecteurs. Nous les relayons ici sous forme de brèves dotées d’hyperliens. Découvrez notre dernière sélection. Elle est, cette semaine, très « Nature », comme en attestent les publications scientifiques belges de ces derniers jours dans les diverses déclinaisons de la fameuse revue !
Les plantes ont la mémoire de la soif (UCL)
Les plantes optimisent leur croissance en se « souvenant » du stress hydrique (déficit en eau) qu’elles ont subi pour ajuster les mouvements d’eau dans les racines. C’est ce que révèlent des chercheurs des équipes de François Tardieu de l’Institut national (français) de recherche agronomique (Inra) et de François Chaumont à l’Université catholique de Louvain grâce à un dispositif de mesures précises de la croissance d’un grand nombre de plantes en conditions naturelles. Publiés dans Nature Communications le 5 novembre 2014, ces travaux expliquent comment les plantes anticipent des déficits en eau et optimisent leur croissance.
Les plantes réagissent aux fluctuations naturelles du climat. Leur teneur en eau est le plus souvent adéquate la nuit et déficiente l’après-midi et ce, d’autant plus que le sol et l’air sont secs. C’est pourquoi, même si le sol est partiellement desséché, les plantes semblent en bon état le matin, fanent l’après-midi et récupèrent la nuit. La croissance des organes suit également ce rythme : maximum la nuit et minimum pendant la journée. Par ailleurs, en observant les plantes en lumière continue, on constate que presque toutes leurs fonctions physiologiques sont régies par des rythmes circadiens (oscillations journalières), semblables à ceux des animaux (sur des périodes de 24 heures).
Ainsi, l’ouverture de « robinets » moléculaires de l’eau, les aquaporines, et donc la perméabilité à l’eau des racines, est maximale à l’aube et minimale au coucher du soleil. Ces aquaporines facilitent donc le transport de l’eau dans la plante lorsque la demande hydrique augmente le matin. Ceci provoque des oscillations journalières de la croissance des feuilles sous lumière continue.
Des travaux menés par des chercheurs de l’Inra et de l’Université catholique de Louvain révèlent un nouveau phénomène : l’amplitude des oscillations journalières de la croissance des feuilles dépend du stress hydrique que la plante a subi auparavant. L’explication du phénomène est la suivante : si la plante a été confrontée à un stress hydrique (par exemple, journées ensoleillées et sol sec), l’expression des aquaporines varie fortement au cours de la journée tandis qu’elle varie peu après des journées nuageuses dans un sol humide. Les mouvements d’eau et la croissance foliaire suivent également ces oscillations qui dépendent de l’histoire récente de la plante. En tenant compte des conditions hydriques subies les jours précédents, les plantes peuvent ainsi anticiper le degré d’oscillations qui a le plus de chances d’être favorable à leur croissance.
Un nouveau protagoniste de la survie cellulaire (ULg)
Quel est le point commun entre des tumeurs solides, certaines surdités congénitales et la polyarthrite rhumatoïde ? La dérégulation de la fonction de la protéine KIAA1199. Dans une étude publiée elle aussi, cette semaine, dans Nature Communications, une équipe des chercheurs, menée par le Professeur Alain Chariot du GIGA-Université de Liège, dévoile le lien entre cette protéine et un récepteur appelé EGFR, acteur clé de la progression tumorale. Un lien qui pourrait avoir son importance dans les trois pathologies.
« Nos travaux vont susciter l’intérêt de plusieurs chercheurs intéressés par les mécanismes à la base des pathologies cancéreuses et inflammatoires et des lésions de l’oreille interne. Il s’agit d’un bel exemple de recherche fondamentale qui met en lumière un acteur moléculaire et les conséquences d’une dérégulation de sa fonction dans des pathologies à priori très éloignées », commente Alain Chariot. Le webmagazine Reflexions de l’ULg en dit davantage sur le sujet.
Amélioration des plastiques conducteurs de courant à Mons
A priori, les matières plastiques sont plutôt de bons isolants électriques. Toutefois, lorsque ces polymères subissent divers traitements, ils peuvent se muer en conducteurs électriques. On parle alors de polymères conjugués. Ceux-ci sont connus depuis les années 1970. Ces nouveaux matériaux ont bien sûr évolué depuis. Ils peuvent présenter des propriétés semi-conductrices qui intéressent l’industrie électronique. Toutefois, les polymères conjugués souffrent encore de divers problèmes.
Dans Nature de cette semaine, une équipe du Laboratoire de chimie des nouveaux matériaux de l’Université de Mons, emmenée par Vincent Lemaur, co-signe un article détaillant une recherche sur une famille de polymères conjugués. Cette recherche identifie l’origine de certaines failles moléculaires de cette matière synthétique et propose des pistes pour la production de tels matériaux dépourvus de ces problèmes intrinsèques. (Approaching disorder-free transport in high-mobility conjugated polymers)
La couche d’ozone joue (temporairement) au yoyo (ULg)
Alors que la couche d’ozone commence à montrer les premiers signes d’un rétablissement progressif sous l’effet des mesures internationales limitant les émissions de CFC (chlorofluorocarbures), la quantité de chlore (principal destructeur de l’ozone) observée dans la stratosphère a à nouveau augmenté dans l’hémisphère Nord entre 2007 et 2011. Ce constat, d’abord fondé sur des mesures effectuées à la station du Jungfraujoch (Suisse) a ensuite été confirmé, notamment à l’aide de données satellites.
Dans la revue Nature, une équipe internationale de chercheurs menée par Emmanuel Mahieu, chercheur du F.R.S. – FNRS au Groupe infrarouge de physique atmosphérique et solaire (GIRPAS), Département d’Astrophysique, Géophysique et Océanographie de l’Université de Liège, rassure : le phénomène est temporaire et les mesures environnementales montrent leur efficacité.
Après avoir observé de manière inattendue une ré-augmentation de la concentration en HCl dans la stratosphère de l’hémisphère Nord entre 2007 et 2011, Emmanuel Mahieu a émis l’hypothèse que cette ré-augmentation n’avait pas pour origine de nouvelles émissions non identifiées de gaz chlorés mais était due à une variation de la circulation atmosphérique dans l’hémisphère Nord. Cette hypothèse a été confirmée par les modèles mis au point par le Pr Martyn Chipperfield de l’Université de Leeds et Thomas Reddmann du Karlsruhe Institute of Technology. Ces modèles interdisciplinaires tiennent compte simultanément des interactions entre composants de l’air, rayonnement solaire, données météo, vents, températures, pression atmosphérique, etc.
Ces modèles ont montré que les zones caractérisées par une augmentation inattendue d’HCl avaient, en effet, connu un ralentissement de la circulation de l’air et donc, une augmentation du temps de transport des composants à haute altitude. Ainsi exposées plus longuement aux UV, les molécules CFC ont généré de plus grandes quantités d’HCl d’abord et de chlore ensuite vers des couches plus basses de l’atmosphère.
« Ceci explique pourquoi, sans émission plus importante de gaz chlorés au sol, la stratosphère a temporairement subi une nouvelle invasion de l’atome de chlore destructeur de la couche d’ozone », explique Emmanuel Mahieu. « Nous ignorons les raisons de ce ralentissement momentané de la circulation atmosphérique, mais ce qui est rassurant, c’est que nous ne sommes pas face à un phénomène qui s’étend au reste du globe après transport et homogénéisation de l’atmosphère. Dans son ensemble, la concentration en chlore continuera de baisser », conclut le chercheur liégeois.
Convulsions fébriles et épilepsie
En Flandres, les Universités de Leuven et d’Anvers publient également cette semaine dans Nature (Genetics). Ces équipes ont participé à l‘identification de mutations génétiques impliquées dans le déclenchement de crises d’épilepsie et de convulsions liées à la fièvre. Cette dernière pathologie affecterait entre 2 et 4 % des enfants dans le monde.
Cap sur l’Antarctique pour six chercheurs de l’ULB
Plusieurs chercheurs de l’Université libre de Bruxelles partent ce mois-ci en campagne en Antarctique. Cinq chercheurs du Laboratoire de Glaciologie s’envoleront cette semaine pour la région du Dronning Maud Land, dans l’est de l’Antarctique, à environ 120km de la station Princesse Elisabeth.
Coordonnée par Frank Pattyn, co-directeur du Laboratoire de Glaciologie de l’ULB, cette mission devrait récolter les données qui permettront de reconstruire le bilan de masse du dernier millénaire dans cette région de l’Antarctique et l’état de la calotte actuelle. Ils vont aussi installer un radar interférométrique et plusieurs GPS afin de mesurer en continu le mouvement de la glace et de mesurer la fonte de la plateforme glaciaire. Ces données seront transmises via satellite une fois par jour pendant un an. A suivre sur le compte Twitter de la plateforme glaciaire, @TweetinIceShelf A noter encore: l’expédition s’inscrit dans le projet ICECON, soutenu par la Politique scientifique fédérale (Belspo).
A la fin du mois, une autre chercheuse de la Faculté des Sciences , le Dr Vinciane Debaille, du Laboratoire G-Time, partira pour deux mois à la base américaine de McMurdo. Elle campera dans les montagnes transantarctiques pour collecter des météorites dans les champs de glace. Elle est invitée par les Etats-Unis à participer à leur programme de collecte de météorites en Antarctique (Ansmet). Sa mission pourra être suivie en direct sur le blog de l’expédition.