Vitold Belevitch, acteur majeur du développement de l’informatique en Belgique

30 juin 2015
par Raphaël Duboisdenghien
Durée de lecture : 4 min
«Vitold Belevitch, Essai de Réminiscience», par Pierre-Jacques Courtois, éditions Academia-L’Harmattan, 29 euros.
«Vitold Belevitch, Essai de Réminiscience», par Pierre-Jacques Courtois, éditions Academia-L’Harmattan, 29 euros.

L’œuvre scientifique et la personnalité du créateur du premier centre belge de calcul méritent d’être mieux connues. Pierre-Jacques Courtois les décrit dans «Vitold Belevitch, Essai de Réminiscience», aux éditions Academia-L’Harmattan dans la collection des Acteurs pour l’Université (29 euros).

 

«C’est avant tout à Charles Mannebach, Hendrik Casimir et Vitold Belevitch que l’on doit les débuts de l’informatique en Belgique et non, comme certains l’ont prétendu, à des éléments théoriques ou techniques qu’auraient fournis la téléphonie et son industrie», explique le professeur émérite de l’Université de Louvain (UCL).

 

La machine monumentale épargne des calculs fastidieux

 

L’objectif premier de Vitold Belevitch est de créer un système fiable capable d’épargner des calculs mécaniques fastidieux. En 1951, le Fonds National de la Recherche Scientifique (FNRS) et l’Institut pour l’Encouragement de la Recherche Scientifique dans l’Industrie et l’Agriculture (IRSIA) subventionnent la construction d’une machine mathématique électronique.

 

La conception et la réalisation du calculateur belge sont confiées aux laboratoires anversois d’électronique de la Bell Telephone dont les applications nécessitent des calculs numériques et des approximations de nombres réels en virgule fixe. Belevitch est choisi pour diriger et orienter le projet par la société qui l’emploie depuis la fin de ses études d’ingénieur en 1942.

 

Presque tout est à imaginer pour les ingénieurs, mathématiciens et physiciens. Le calculateur est terminé en 1956. Long de 13 m et haut de 2,50 m, il utilise quelque 1.000 triodes, 1.200 tubes à cathode froide, 400 relais, 1.000 diodes au sélénium, 500 diodes au germanium. Le processeur n’effectue que des additions et des multiplications. La mémoire principale est un tambour magnétique. Toute l’information est codée en notation décimale. Malgré le manque de fiabilité des composants et la chaleur dégagée par les tubes électroniques, la machine est utilisée jusqu’au début des années 1960.

 

En 1952, à l’UCL où il a obtenu un doctorat en sciences appliquées à 24 ans, Belevitch enseigne aux ingénieurs électriciens la théorie des circuits de télécommunication. Le FNRS et l’IRSIA créent, en 1955, le Comité d’Étude et d’Exploitation des Calculateurs Électroniques (CECE) pour assurer la maintenance de la machine, prospecter l’intérêt pour la Belgique d’utiliser et de développer des calculateurs. Nommé directeur, Belevitch quitte Bell Telephone.

 

Une dizaine d’universitaires entretiennent et programment le calculateur. Son accès est gratuit pour les institutions scientifiques nationales. Le tarif de 5.000 francs belges par heure-machine est appliqué à l’industrie privée. Le centre accueille de jeunes scientifiques effectuant leur service militaire.

 

Recherches fondamentale et appliquée convergent

 

Sa mission étant accomplie, le CECE est dissous en 1962. Belevitch prend la direction du Philips Research Laboratory Brussels qui a occupé quelque 70 chercheurs dans les années 1980. Tout en poursuivant ses travaux en théorie des circuits électriques et mathématiques appliquées. Il laisse à ses collaborateurs beaucoup de liberté. Et la possibilité d’organiser leurs recherches, particulièrement en informatique.

 

«Belevitch mènera de front deux prodigieuses carrières professionnelles, l’une scientifique, l’autre industrielle», raconte Pierre-Jacques Courtois qui a été l’un de ses proches collaborateurs dans son laboratoire bruxellois. «Toutes deux seront harmonieusement ancrées sur des recherches, à la fois fondamentales et appliquées du plus haut niveau. Sa vie professionnelle sera caractérisée par cette double activité participant à l’analyse de systèmes de télécommunication et de traitement de l’information. Pendant plus de cinquante ans, il s’efforcera de concilier sa passion pour les mathématiques avec son attrait pour la conception de systèmes.»

 

L’«Essai de Réminiscience», mot forgé par Belevitch, se penche sur l’intuition et les clairvoyances mathématiques du chercheur qui voyait le résultat avant de l’avoir calculé. Le livre expose ses recherches. Ses grandes découvertes. Son approche originale du circuit électrique dont le comportement est identifié par les rétroactions énergétiques sur l’environnement. Ses travaux en linguistique mathématique.

 

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