Avec la sécheresse, le sol wallon se tasse

2 octobre 2019
par Laetitia Theunis
Durée de lecture : 4 min

Le problème n’est pas rare. Durant cet été et en ce début d’automne, de nombreux citoyens ont été confrontés à l’affaissement de leur terrasse. Effondrées dans le sol, étendue de béton et ribambelle de clinkers font pâle figure. Tassement, voilà le nom du phénomène géologique à l’œuvre. Il compte parmi les plus courants des mouvements du sol wallon. Et le changement climatique risque bien de faire flamber son incidence.

Depuis juillet 2016, la sécheresse fait son nid en Wallonie. Cette année, alors que février et mars ont connu une pluviosité supérieure à la moyenne, elle s’est à nouveau emparée du territoire. La canicule de cet été a asséché les argiles, lesquelles se sont contractées. Au contraire, les pluies abondantes espérées durant cet automne devraient les ré-engorger d’eau. Attention, soumis à ces variations extrêmes, le sol bouge.

« Lors des épisodes secs de tassement du sol, particulièrement les sols argileux, puis des épisodes pluvieux qui le font gonfler, nous recevons beaucoup de demandes d’informations pour expliquer les fissurations dans des habitations », explique Daniel Pacyna, responsable de la Direction des Risques Industriels, Géologiques et Miniers du service géologique de Wallonie.

« Les terrasses et les annexes sont régulièrement construites sur des fondations plus légères que celles du volume principal. On observe alors du tassement différentiel : d’un côté, les fondations bien conçues vont très peu se tasser, mais de l’autre coté, le tassement va être de grande ampleur. Si bien que les parties du bâtiment se décollent l’une de l’autre. C’est un grand classique. »

Sécheresse et fortes pluies sont les conditions les plus dangereuses

En cas de sécheresse, les smectites et autres argiles se rétractent. Alors qu’elles perdent de volume, la partie supérieure du sol s’affaisse. Ce mouvement provoque des fissures dans les constructions sises en surface. Une fois la pluie revenue en abondance, les roches se gonflent et les fissures reprennent leur course de plus belle.

Les dégâts sont rarement structurels. Les premiers signaux ? Des carrelages qui se soulèvent et se fendillent, du plâtre et des encoignures de fenêtres qui se fissurent.

Pour les maisons déjà construites, refaire les fondations est impossible. Mais, moyennant des travaux d’un coût élevé, il est possible de les renforcer.

Examen géologique et avis sur permis de bâtir

Quid des bâtiments à construire ? « Avec les changements climatiques en cours, on recommande de ne pas lésiner sur de bons essais de sol pour voir la portance des terrains. S’il est constitué d’argiles particulièrement sensibles, il est crucial de prendre en compte leurs cycles de saturation/désaturation. Et ce, en faisant quelques essais de laboratoire standardisés qui caractérisent le matériau et permettent de savoir de combien une argile peut gonfler. On peut alors adapter les fondations. Par exemple, en réalisant un radier, soit une dalle de béton sur laquelle est installée la maison. » En cas de mouvement de terrain, c’est toute la dalle qui monte ou descend. Adieu fissures.

Le coût ? Comptez de 1500 à 2000 € pour un essai de sol et quelques centaines d’euros pour les tests de laboratoire. « Ce n’est pas excessivement cher et permet d’éviter des travaux ultérieurs… Refaire les plafonnages d’une maison, ça revient vite au coût d’un radier », conseille Daniel Pacyna.

Les dommages sont plus fréquents dans les habitations modernes

Jadis, les constructeurs étaient souvent originaires du coin et connaissaient très bien la qualité des argiles des soubassements. Ils adaptaient les fondations et les bâtiments en fonction. « Relativement peu de maisons anciennes subissent de gros dommages liés au tassement. Les plus fragiles sont les maisons modernes, clés en main, faites ailleurs, construites par des architectes qui ne font pas d’essais de sol ou des essais de sol superficiels et qui pensent, à tort, que la situation observée à un moment donné est représentative de toute l’année, sans accorder d’importance aux variations saisonnières extrêmes », poursuit le responsable de la Direction des Risques Industriels, Géologiques et Miniers.

Les zones les plus à risque sont situées dans le Hainaut, particulièrement dans le nord où des formations argileuses annoncent les Flandres. Mais aussi en région liégeoise avec sa bande de smectite, sur les Hauts-Plateaux vers les Cantons de l’Est et en Ardenne où les roches sont complètement altérées et transformées en argile.

 

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