En faisant le ménage en grand, on tombe parfois sur des trésors. Ou sur un fil d’Ariane qui y mène. Lors de la préparation de l’exposition inaugurale du musée de l’université de Mons, le MUMons, des photographies datant de 1905 ont été découvertes. Parues dans l’ouvrage de l’École des Mines de Mons (ancien nom de la Faculté Polytechnique), elles sont en réalité des cartes postales éditées par les établissements Nels de Bruxelles, firme réputée et spécialisée dans la production de clichés photographiques sous forme de cartes postales.
« En y regardant de plus près, sur certains clichés, nous avons remarqué de nombreuses belles planches pédagogiques accrochées aux murs du laboratoire de paléontologie », explique l’équipe du MUMons. « Que sont-elles devenues ? Se trouvent-elles toujours à l’UMons plus de cent ans après ? Pour en avoir le cœur net, nous avons interrogé Nicolas Dupont, chercheur dans le service de Géologie fondamentale et appliquée de la Faculté Polytechnique. À notre grande surprise, plusieurs dizaines de ces planches sont toujours conservées au sein de ce service. »
Des siphonophores plus vrais que nature
Parmi ces planches, certaines s’apparentent à des chefs-d’œuvre. C’est le cas de celle représentant des siphonophores réalisée par Comingio Merculiano (1845-1915), illustrateur à la station zoologique de Naples à partir de 1885. Sa spécialité ? Dépeindre le monde marin.
« Les couleurs vives et les détails nets créent une magie de qualité, mêlant enseignement et fascination de la diversité du monde naturel. Le rendu des animaux vivants chez Merculiano était tellement inégalable, que les scientifiques qui le supervisaient se reposaient entièrement sur l’artiste. »
« Les animaux marins représentés sur cette planche sont des siphonophores. Ce sont les cousins des méduses, anémones et coraux. Tous font partie de la famille des cnidaires. Ils vivent en colonies et peuvent atteindre plusieurs dizaines de mètres de long. »
Des caches salvateurs
« En étudiant cette affiche plus en profondeur, nous avons observé un détail intrigant. Des petites étiquettes blanches occultent des inscriptions. En passant un rayon lumineux sous la planche, nous avons pu les lire. Il s’agit d’informations en allemand sur l’éditeur de l’affiche: “Verlag von Quelle & Meyer in Leipzig” et “Maison d’édition Quelle & Meyer à Leipzig”. »
Deux hypothèses peuvent expliquer la présence de ces caches. Empêcher les soldats allemands, qui occupaient la Faculté Polytechnique durant la Première Guerre mondiale, de les emporter en Allemagne. Mais aussi éviter leur destruction par les membres du Comité de ravitaillement ou les alliés, stationnés au poste de commandement britannique dans la Faculté Polytechnique à la fin de la Première Guerre mondiale.
Des os qui valent de l’or
« Sur la planche représentant un iguanodon, imprimée et éditée par Theodor Fischer à Cassel, nous avons un tout autre type de représentation. Il s’agit d’un dinosaure herbivore de l’ordre des ornithischiens. Il se caractérise par un bassin similaire à celui d’un oiseau. Son nom signifie “reptile aux dents d’iguane”. »
L’iguanodon a fortement marqué le territoire belge suite à une découverte exceptionnelle à la fin du XIXe siècle. Le village de Bernissart situé près de la frontière française connaît à l’époque un grand développement industriel. Dès les années 1840, plusieurs fosses y sont creusées pour y extraire du charbon. Et c’est en 1878 que des mineurs y ont fait une découverte insolite dans la fosse Sainte-Barbe.
« Ça avait tout l’air d’être de l’or. Mais en réalité, il s’agissait de pyrite incrustée dans des os. Ce minéral aux reflets dorés est surnommé “l’or des fous”. »
Des stars sorties des oubliettes
Au total, plus d’une trentaine de squelettes d’iguanodons ont été retrouvés à 322 m de profondeur, puis identifiés par le paléontologue Pierre Joseph Van Beneden. Une découverte majeure en paléontologie.
« Ces planches pédagogiques, représentant les stars de Bernissart, ne semblent plus avoir été utilisées depuis de nombreuses années ; elles avaient été enroulées et stockées depuis lors. Pour pouvoir les étudier plus en détail, les préserver et les valoriser, nous avons entrepris un inventaire minutieux de cette imagerie pédagogique. »
Une fois l’inventaire terminé, le public pourra admirer ces planches entoilées sur le catalogue en ligne des collections de l’UMons.