Série (2/3) : « Devoirs de vacances » (Partie 1)
Cet été, Daily Science vous propose des découvertes hors des sentiers battus. Sciences, techniques ou encore environnement et histoire sont au rendez-vous.
Cela remonte aux années 1970 et c’est presque… la Préhistoire. L’émergence de la micro-informatique, l’informatique interactive, personnelle, conviviale et centrée sur l’utilisateur final n’a même pas un demi-siècle. Avant cela, il fallait être quasiment informaticien pour utiliser les quelques gros et rares calculateurs professionnels. Des machines dans lesquelles les données étaient injectées via, notamment, des cartes perforées et la programmation réalisée via une série d’interrupteurs…
« L’avènement de la micro-informatique va avoir un impact considérable sur nos existences », lance Marie d’Udekem-Gevers, professeure émérite de la faculté d’informatique de l’UNamur. « Qui pourrait imaginer aujourd’hui se passer de son ordinateur, mais aussi de sa tablette ou de son smartphone ? », interroge-t-elle. « Tous nos objets high-tech ont bénéficié de la révolution liée à la micro-informatique des années 1970 à 1990. Tous ont bénéficié des innovations et des élucubrations géniales de quelques visionnaires de l’époque », résume-t-elle en substance.
L’année 1971 marque le début de l’odyssée du microprocesseur
La nouvelle exposition temporaire proposée au Computer Museum NAM-IP, à Namur, pointe les éléments clés de cette (r)évolution. D’une part, il y a l’invention en 1971 du microprocesseur qui va faire fondre la taille des machines et permettre l’émergence des micro-ordinateurs. L’avènement de l’interface graphique va faire, lui aussi, accélérer leur développement. « Avant cela, on communiquait avec l’ordinateur via des lignes de codes », reprend la commissaire scientifique de l’exposition « Micro-ordinateur, még@révolution ». Avec l’interface graphique, on commence à manipuler intuitivement des objets graphiques avec un système de pointage. »
L’exposition réserve quelques surprises. Notamment en ce qui concerne le tout premier micro-ordinateur commercialisé dans le monde. Il était… français. Le « Micral N », dont une maquette est visible à Namur, a été conçu et construit par François Gernelle. Cette « boîte » bardée de voyants lumineux se pilotait au moyen d’une série d’interrupteurs disposés sur sa face avant. On est encore loin du clavier, de la souris et certainement de l’écran tactile.
Parmi les pionniers passés dans l’oubli, on pointera aussi le « DAI (Data Applications International) Imagination machine »: une machine belge dont une version de 1982 est à découvrir dans l’exposition temporaire.
Osborne: un portable à la mémoire impressionnante, pour amateurs musclés
« La première version du DAI, fabriqué en 1977, ne disposait cependant pas d’écran. Il fallait la brancher sur un appareil de télévision et régler le bon canal pour visualiser ce qu’on faisait », précise Christophe Ponsard, du Cetic (Centre d’Excellence en Technologies de l’Information et de la Communication, situé à Charleroi) et collaborateur au Computer Museum NAM-IP.
Les mythiques Commodore 64, TRS 80 et autres Apple II (avec leurs lecteurs de ‘floppy disks’ ou leur lecteur de cassettes) qui verront le jour à la fin des années 1970, raviront aussi les visiteurs nostalgiques.
On découvrira aussi avec délectation un exemplaire de l’Osborne 1, le tout premier ordinateur « portable » américain. Le « petit » et son écran de 5 pouces qui ne disposait pas de batterie. Mis sur le marché en 1981, il faisait tout de même 10,7 kilos. Et il affichait des performances « décoiffantes » avec ses 64 ko de RAM et ses 4 ko de ROM.
Une révolution en trois temps
« On distingue trois grandes périodes en ce qui concerne le développement des micro-ordinateurs », reprend la Pre d’Udekem-Gevers. « Jusqu’en 1977, les machines présentent des entrées/sorties sommaires et ne disposent pas vraiment de mémoire. Ensuite, jusqu’à la fin des années 1980, avec les interfaces graphiques, le développement de mémoires et la multiplication des logiciels, on entre dans une période de développement intense. »
En 1983, IBM proposait son PC « XT » et son écran monochrome vert. L’année suivante voyait débuter la commercialisation du premier Macintosh. Premier ordinateur grand public proposant une véritable interface graphique. L’utilisateur ne devait donc plus encoder des commandes, mais pouvait interagir avec la machine via une souris permettant de pointer des icônes sur l’écran. Toujours en 1984, IBM lançait son PC « AT » (pour « Advanced Technology »). La course battait son plein.
À partir des années 1980, l’émergence de logiciels qui sont devenus usuels (traitement de texte, tableurs, base de données, logiciels de traitement d’image…), l’évolution des systèmes d’exploitation et l’utilisation ludique (les jeux) des « micros » vont booster leur popularité.
« Mais ce n’est qu’au cours des années 1990, avec la standardisation croissante du matériel, des logiciels et des interfaces que la micro-informatique percole largement dans la société », conclut la commissaire de l’exposition. Qui attire aussi l’attention des visiteurs sur certains enfants naturels de la micro-informatique, comme les calculatrices de poche programmables ou encore les cartes à puces. « Des technologies voisines qui se sont développées en parallèle », conclut Pre d’Udekem-Gevers.