L’épigénétique joue un rôle clé dans la dépendance aux drogues

9 janvier 2024
par Daily Science
Temps de lecture : 3 minutes

Un mécanisme majeur de l’addiction aux drogues, en particulier celle à la cocaïne, a été mis au jour par des chercheurs de l’ULB Neuroscience Institute. Leur découverte ouvre la voie à de nouvelles voies thérapeutiques.

Le système de récompense piégé

La dépendance aux drogues est définie comme un trouble chronique récurrent caractérisé par la recherche et la prise compulsive de drogues malgré les conséquences néfastes.

Le premier moteur de l’addiction est l’augmentation « artificielle », suite à la prise de drogues, de la concentration de dopamine, le neurotransmetteur associé au système de la récompense, dans la région principale de ce système, le striatum ventral. Cette augmentation artificielle piège ainsi le système de la récompense et induit des modifications dans le cerveau conduisant à l’addiction.

Maged1, un gène clé

Cette maladie psychiatrique est due à des facteurs génétiques et environnementaux. La composante génétique de la vulnérabilité d’une personne à l’addiction est de 40 à 60%. Elle implique des gènes spécifiques liés aux neurotransmetteurs et à leurs actions, tels que la dopamine, les récepteurs opioïdes, nicotiniques et cannabinoïdes.

Dans une étude précédente, l’équipe d’Alban de Kerchove d’Exaerde, chercheur à l’ULB Neuroscience Institute (UNI) et investigateur Welbio au WEL Research Institute, avait démontré, grâce à des modèles murins, le rôle central d’un gène insoupçonné dans la dépendance à la cocaïne : Maged1.

Son inactivation dans l’ensemble du cerveau des souris rendait, en effet, celles-ci totalement insensibles à l’effet de la cocaïne.

Modifications épigénétiques

Dans une nouvelle publication, la même équipe a démontré, contre toute attente que la région du cerveau où ce gène joue son rôle essentiel dans l’addiction était située en dehors … du circuit de la récompense !

Suite à l’identification de cette nouvelle région clé (le thalamus paraventriculaire), les mécanismes qui sous-tendent les effets majeurs du gène Maged1 dans la dépendance à la cocaïne ont été mis à jour.

Ils impliquent des modifications épigénétiques spécifiques. C’est-à-dire des modifications de la structure de l’ADN et non pas des mutations. Ces altérations épigénétiques influencent l’expression d’un grand nombre de gènes. De plus, l’inhibition de USP7, un des nouveaux gènes identifiés comme partenaire de Maged1 pour ces modifications épigénétiques abolit des comportements addictifs.

Les facteurs environnementaux impliqués dans l’addiction induisent également des modifications épigénétiques qui sont stables dans le temps et peuvent expliquer le caractère chronique de cette maladie.

Etude chez l’Homme

Finalement, pour démontrer la pertinence chez l’homme de ces mécanismes identifiés et découverts chez la souris, une étude chez des patients dépendants à la cocaïne a été réalisée en collaboration avec une équipe de psychiatres de l’Université de Paris Cité.

Cette étude chez l’Homme a démontré que des modifications génétiques spécifiques des gènes Maged1 et USP7 sont associées à des conséquences très significatives sur des comportements directement liés à l’addiction à la cocaïne.

L’ensemble de ces résultats constitue un espoir de nouveaux traitements dans la dépendance aux drogues, et particulièrement dans la dépendance à la cocaïne qui, à ce jour, ne bénéficie d’aucun traitement efficace.

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