© ASIM / ESA

ISS : nouveau point de vue pour ASIM, le chasseur d’orages

10 janvier 2022
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 4 minutes

Des centaines d’elfes, de farfadets, mais également de jets bleus : la moisson scientifique de l’instrument ASIM, installé sur la structure externe de la Station spatiale internationale (ISS) est impressionnante. « Et elle est loin de se terminer », indique l’ingénieure Alice Michel, du B.USOC, le centre belge de contrôle des opérations spatiales. C’est depuis ce centre situé à Uccle, relevant de l’Institut royal d’aéronomie spatiale de Belgique (IASB), que le déplacement de l’instrument ASIM prévu ce 10 janvier va être supervisé. Une manœuvre réalisée dans l’espace, à l’extérieur de l’ISS, la Station spatiale internationale. C’est également via le B.USOC que les données de l’instrument sont recueillies et transférées aux chercheurs depuis quatre ans.

ASIM (Atmosphere-Space Interactions Monitor) est un instrument de l’ESA utilisé par des chercheurs danois et norvégiens. Il est en orbite depuis 2018. Initialement, il ne devait fonctionner que deux ans. « Mais son efficacité et sa bonne santé ont amené ses gestionnaires à prolonger sa vie active de deux années, puis encore de deux autres années », explique Mme Michel.

Une rotation de 90 degrés

Ces prolongations posent un problème aux gestionnaires de l’ISS. La plateforme externe du module européen Columbus de la station spatiale, sur laquelle est installé ASIM depuis quatre ans, doit être libérée pour accueillir un nouvel instrument scientifique.

C’est ainsi que le détecteur spatial d’orages et d’éclairs va être déplacé de quelques mètres sur l’ISS. « Cela lui assurera encore deux années d’observations scientifiques », souligne l’ingénieure. « L’instrument sera disposé à 90 degrés par rapport à sa position d’observation actuelle. De quoi offrir de nouvelles perspectives sur les événements atmosphériques étudiés. »

En orbite, c’est un petit exploit qui se joue ce lundi. Quatre heures de manipulation, par le bras robotique Canadarm2 de la Station spatiale internationale, seront nécessaires pour effectuer cette relocalisation d’ASIM, sous la surveillance du centre de contrôle belge.

Rotation de 90° de ASIM, l’instrument européen chasseur d’orages © ASIM / ESA

Détection d’événements lumineux fugaces

ASIM détecte des événements lumineux se produisant dans notre haute atmosphère, liés à des zones d’orage. Ces phénomènes lumineux transitoires (ou « TLE »,  Transient Luminous Events) sont de plusieurs types.

Sur cette vidéo accélérée (© ESA), tournée au-dessus de l’Afrique du Nord, de la Turquie et de la Russie en 2016 par l’astronaute britannique Tim Peake de l’ESA, on observe divers phénomènes lumineux liés aux orages sur Terre :

Les elfes se forment à une altitude d’environ 90 km et s’élargissent en une fraction de seconde comme de petites vagues formées par le jet un caillou dans l’eau. Elles se manifestent dans le rayonnement visible et ultraviolet.

Les farfadets (« red sprites » en anglais) ressemblent à des méduses cosmiques. Ce sont des flashes lumineux visibles dont la zone la plus brillante se situe à une altitude variant de 65 à 75 km. En dessous de cette zone rouge, apparaissent des structures bleutées ressemblant à des filaments qui descendent souvent jusqu’à une altitude de 40 km.

Enfin, les jets bleus sont des petits flashes lumineux de couleur bleue en forme de cône qui s’observent au sommet des nuages d’orage et qui disparaissent à une altitude de 40 à 50 km. Des jets bleus géants ont aussi été observés. Ceux-ci atteignent des altitudes bien plus élevées.

Bouffées de rayons gamma

Outre ces événements lumineux transitoires, un autre type de phénomènes énergétiques intéresse également les scientifiques. Il s’agit des TGF (« Terrestrial gamma ray flashes »). En 2019, une équipe de chercheurs a montré que ces bouffées de rayons gamma apparaissaient lors d’orages présentant des champs électriques élevés.

En 2020, c’est une autre bouffée de rayons gamma qui a été détectée par ASIM. Un événement trouvant son origine dans… une autre galaxie.

« Les buts scientifiques de base liés à l’exploitation de l’instrument ASIM visent à fournir une observation statistique la plus complète possible des TLE et des TGF », rappelle Alice Michel.

« Dans ce cadre, la prolongation de la mission est intéressante. Cela permet d’augmenter le nombre d’observations pour améliorer les statistiques, mais aussi de permettre la comparaison de données provenant d’autres instruments installés sur d’autres satellites ».

Et comme le montrent les deux publications scientifiques mentionnées ci-dessus, « d’en apprendre davantage sur les liens entre ces événements et la foudre ainsi que sur les caractéristiques des orages susceptibles de les générer », conclut-elle.

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