© Thierry Hubin/IRSNB
© Thierry Hubin/IRSNB

Sur les traces des derniers habitants de la mer du Nord

10 avril 2018
par Daily Science
Temps de lecture : 5 minutes

La mer du Nord n’a pas toujours été…  une mer. Lors de la dernière glaciation, le niveau des eaux était nettement plus bas qu’aujourd’hui et on allait à pieds secs du continent vers l’Angleterre.

Pêche archéologique au Brown Bank

Les archéologues ont même longtemps soupçonné que la « plaine méridionale » de la mer du Nord devait abriter des milliers de personnes pendant la préhistoire. Des soupçons qui, au fil de ces dernières décennies, ont été confortés par des découvertes archéologiques inattendues. Dans les filets des chalutiers qui travaillent du côté du « Brown Bank », situé entre Great Yarmouth (Royaume-Uni) et les Pays-Bas, des ossements, des pierres et des restes humains ont régulièrement été remontés des profondeurs marines.

Doggerland.
Doggerland.

Les archéologues en sont désormais persuadés. Bien que cachés dans les sédiments, d’autres trésors archéologiques les attendent encore. Leur rêve? Découvrir du côté du Brown Bank un site préhistorique englouti. Un site âgé de quelque 10.000 ans.

Carottage sédimentaires

Le « Brown Bank » est une falaise de sable engloutie de 30 km de long. C’est là que les chercheurs belges, britanniques et hollandais qui embarquent aujourd’hui sur le navire océanographique belge « Belgica » vont travailler pendant une dizaine de jours.

Sites de découvertes de pièces archéologiques en Mer du Nord.
Sites de découvertes de pièces archéologiques en Mer du Nord.

Les équipes du projet de recherche européen « Lost Frontiers », de l’Université de Gand, de l’Institut flamand de la mer (VLIZ), de l’Université d’Utrecht et des services géologiques hollandais vont effectuer des carottages dans les sédiments du Brown Bank et réaliser toute une série d’analyses géophysiques en vue de récolter de nouveaux indices d’occupation humaine dans la région.

Ce projet est financé par le Conseil européen de la recherche. Il vient compléter le projet « Lost Frontiers », dirigé par l’Université de Bradford, pour lequel des archéologues cartographient le paysage préhistorique de la Mer du Nord connu sous le nom de « Doggerland ».

Mieux comprendre les migrations préhistoriques

L’équipe de Lost Frontiers y a identifié des plaines, des collines, des marais et des vallées fluviales sur plusieurs milliers de kilomètres, mais il reste malgré tout difficile de trouver des traces d’activité humaine.

 

Sélection d’artefacts préhistoriques du Brown Bank. a) hache de pierre polie; b) bois de cerf perforés; c) mâchoire humaine.
Sélection d’artefacts préhistoriques du Brown Bank. a) hache de pierre polie; b) bois de cerf perforés; c) mâchoire humaine.

La plaine méridionale de la mer du Nord – en plein cœur du Doggerland – pourrait donc bien apporter les pièces manquantes à leur puzzle.

D’ailleurs, l’acquisition de nouvelles données géophysiques dans la région pourrait aussi éclairer la manière dont Doggerland est devenu une île et ainsi aider à mieux comprendre les migrations humaines dans cette région pendant la période Pléistocène tardive – début de l’Holocène.

« La possibilité de mettre en œuvre des recherches sur le terrain susceptibles de localiser un site préhistorique sur le Brown Bank constituerait un événement majeur », estime le professeur Vincent Gaffney de l’Université de Bradford. « Jusqu’à présent, la majorité du Doggerland est restée une terra incognita du point de vue archéologique. Si nous pouvons commencer à situer des villages sur la carte actuellement vide du Doggerland, nous entamerons un nouveau chapitre de l’exploration archéologique ».

Un village sur les rives d’un lac englouti

Des études récentes de chercheurs de l’université de Gand ont réduit encore l’étendue de la recherche. Ils ont identifié des systèmes fluviaux traversant le sud de la Mer du Nord à la fin de la dernière période glaciaire. Cette information leur a permis de délimiter une zone particulière du Brown Bank, où se trouvait jadis, selon eux, un grand lac, qui aurait pu abriter un village sur sa rive.

Au cours de la première phase du projet, les équipes belges et britanniques commenceront par explorer la zone à bord du navire de recherche belge, le RV Belgica. Ils réaliseront des relevés géophysiques autour du banc de sable pour permettre une cartographie détaillée de la zone. Les résultats de ce travail seront utilisés pour identifier les zones prometteuses pour les recherches ultérieures.

Pendant la deuxième phase, l’équipe extraira des carottes de sédiment de ces cibles et les analysera pour déterminer l’environnement du paysage du Brown Bank et comprendre son potentiel en termes de peuplement humain avant d’avoir été recouvert par la Mer du Nord.

 

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