Plutôt que de suivre le cours de l’UCLouvain sur l’écriture de projets de recherche (Research training seminar), des étudiants de l’UCLouvain ont décidé de passer tout de suite à la pratique. Ils se préparent depuis un an à participer au concours international de biologie synthétique. Leur projet ? Offrir aux nourrissons nourris au lait en poudre une formule chimique se rapprochant davantage du lait maternel.
« Nous avons eu le choix l’année dernière », explique Camille Cardarelli, une des étudiantes de ce groupe. « Plutôt que de suivre le cours sur l’écriture de projets de recherche, nous avions la possibilité de monter un projet commun en biologie synthétique, de le réaliser et de présenter ces résultats à la finale du concours international iGEM. C’est ce que nous avons choisi de faire. »
S’attaquer à un problème concret
Du 28 au 31 octobre 2025, neuf étudiants de l’UCLouvain fouleront les allées du concours international iGEM (International Genetic Engineering Machine), à Paris. Il s’agit d’un concours mondial dans le cadre duquel des étudiants s’attaquent à des problèmes concrets à l’aide de la biologie synthétique. Mais il ne s’agit pas seulement de recherche, il s’agit aussi d’entrepreneuriat, de communication et d’avoir un impact réel.
Face à plus de 400 équipes venues du monde entier, les étudiants de l’UCLouvain défendront leur projet à la croisée de la biotechnologie, de la santé infantile et de l’innovation alimentaire. Leur mission : permettre à des bactéries de fabriquer des molécules jusqu’ici quasiment impossibles à produire à grande échelle. Leur nom? HMOs ou Human Milk Oligosaccharides.
Des sucres aux super-pouvoirs
Ces HMOs sont des sucres complexes naturellement présents dans le lait maternel. Leur rôle dépasse de loin celui de simples nutriments. Ils participent au développement du cerveau, à la construction de la barrière intestinale et à l’équilibre du microbiote des nourrissons. En bref, ils sont essentiels pour un bon départ dans la vie. Le problème ? Les laits infantiles en poudre, destinés à remplacer (ou compléter) l’allaitement, n’en contiennent que six… alors qu’on en trouve près de 200 dans le lait maternel. La faute à des processus industriels incapables, jusqu’à présent, de reproduire cette diversité de manière efficace et rentable.
C’est là que l’équipe de l’UCLouvain entre en scène. Leur idée : créer un duo de bactéries capables de coopérer pour produire ces sucres complexes. « Comme deux ouvriers qui se passeraient le relais sur une chaîne de montage, chaque bactérie serait programmée pour réaliser une partie du travail », précise l’équipe.
« C’est un peu comme si, au lieu de demander à un seul ouvrier de construire une voiture de A à Z, on répartissait les tâches entre deux spécialistes. C’est plus rapide, plus précis et surtout, plus durable » , explique Camille Cardarelli.
Plus qu’une simple médaille en ligne de mire
Le concours iGEM, ce n’est pas seulement de la science. Le concours, lancé par le MIT à Boston il y a près de 20 ans, met aussi à l’épreuve les talents en communication, en gestion de projet, en entrepreneuriat et en collaboration interdisciplinaire. Les équipes doivent chercher des financements, documenter tout leur parcours, vulgariser leur projet auprès du grand public et, bien sûr, convaincre un jury international exigeant.
À Paris, les neuf jeunes scientifiques de l’UCLouvain espèrent décrocher une médaille lors du concours. Mais ce n’est pas l’objectif ultime. Leur vrai pari, c’est d’ouvrir une voie innovante pour la production de ces HMOs aujourd’hui si rares dans le lait infantile industriel. Certes, ils ne prétendent pas résoudre le problème du jour au lendemain. Le chemin est encore long avant de pouvoir produire à grande échelle les dizaines de HMOs manquants. Mais leur prototype bactérien, s’il fonctionne, pourrait inspirer d’autres chercheurs, voire des entreprises du secteur agroalimentaire, à poursuivre dans cette voie.
« Ce qui nous anime, ce n’est pas seulement la perspective de produire quelque chose d’utile. C’est aussi l’idée de faire partie d’un mouvement mondial, de contribuer à une science ouverte, collaborative, au service de la société », dit encore Camille Cardarelli.
Et puis, il y a le plaisir d’apprendre ensemble, de se confronter à des défis réels, de découvrir les coulisses du monde de la recherche. Le tout avec le soutien de leurs professeurs, de l’UCLouvain et de la communauté scientifique belge. « C’est un projet qui nous a fait grandir. Et peu importe la médaille, on sortira de cette aventure avec une énorme expérience en poche », conclut-elle.