La séduction des médecines alternatives est grandissante. Et la satisfaction de leurs usagers importante. «Ces pratiques répondent clairement à une attente», admet Jean-Louis Vanherweghem, ancien doyen de la Faculté de médecine de l’Université Libre de Bruxelles.
«Elles pourraient coexister avec la médecine occidentale régulière. Une coexistence pacifique qui n’exclut ni la critique ni la vigilance.» Le spécialiste des maladies rénales jette un regard critique sur la médecine actuelle et les pratiques parallèles dans «Le choc des médecines», paru aux éditions EME.
«L’efficacité de la médecine moderne est indéniable», souligne le membre de l’Académie royale de médecine qui a terminé sa carrière comme chef de service à l’hôpital Érasme. «Mon initiation sommaire à la médecine traditionnelle chinoise m’a ouvert à d’autres modes de pensée médicale. La popularité des médecines alternatives doit être une leçon pour les praticiens de la médecine régulière. Pour soulager un être humain qui souffre, les sciences et les techniques ne suffisent pas.»
Les racines du mal
La consultation médicale est à la base de la relation de confiance. En pratique, le médecin la gâche souvent. Pressé, il encadre le patient par des questions précises. Exige des réponses brèves. Oublie l’interrogatoire classique. Néglige l’examen physique au profit d’un credo technologique.
«La popularité des homéopathes réside, probablement en grande partie, dans le temps et la minutie qu’ils consacrent à cette partie initiale de leur rencontre avec un patient. Pragmatiquement, l’homéopathie peut être acceptée pour répondre à la demande des patients dans des affections le plus souvent bénignes pour lesquelles la médecine occidentale régulière n’offre pas de traitement démontré efficace. L’homéopathie peut même, dans ces cas, rendre service en évitant d’user de médicaments inappropriés aux effets secondaires possibles. Par exemple, le recours aux antibiotiques dans des infections virales. Le seul risque de l’homéopathie est de priver le patient d’un traitement efficace de la médecine régulière.»
La difficulté de la médecine moderne de donner suite aux plaintes de la grande majorité des personnes qui ne se sentent pas bien ouvre la voie aux pratiques alternatives. Comme la stimulation des points d’acupuncture avec des aiguilles pour traiter lombalgies, tendinites, migraines, arthroses.
«L’acupuncture, même si elle agit par l’effet placebo, peut aider de nombreux patients. D’autant plus que ce traitement a peu de complications lorsqu’il est réalisé par des praticiens expérimentés. Suivant des études, la stimulation des points d’acupuncture provoquerait une élévation des endorphines dans le système nerveux.»
Attention, dangers
L’herboristerie chinoise… «Le problème majeur rencontré avec ces plantes médicinales traditionnelles est l’incertitude qui règne quant à la qualité des produits délivrés. Il faut rappeler la toxicité rénale sévère et l’effet cancérigène sur les voies urinaires des aristoloches largement utilisées en médecine traditionnelle chinoise.»
La phytothérapie… «De nombreuses plantes contiennent des produits dont la toxicité est mésestimée. Ainsi, la réglisse contient une molécule qui provoque de l’hypertension artérielle. L’aconit peut causer des troubles mortels du rythme cardiaque. D’autres plantes contiennent des molécules qui peuvent interférer avec des médicaments. Le Ginkgo biloba, comme l’aspirine, potentialise l’effet des anticoagulants et peut conduire à des hémorragies graves chez les patients traités par ces médicaments.» Se tourner vers la manipulation ostéopathique pour les dorsalgies et les lombalgies qui ne sont pas causées par une hernie discale, de l’ostéoporose, un cancer…
«On peut s’interroger, comme pour toute thérapeutique, sur son efficacité réelle», observe Jean-Louis Vanherweghem. «On doit se contenter d’études ouvertes qui comparent un traitement ostéopathique à d’autres traitements. Sans faire un relevé exhaustif des études de ce type, on peut en retenir que les manipulations n’ont pas obtenu de résultats particulièrement plus favorables que d’autres traitements. Cependant, les patients traités par ostéopathie se disaient plus satisfaits. Et, de fait, avaient consommé moins d’anti-inflammatoires.»