Trente-deux cerveaux brillants recrutés en Wallonie

12 octobre 2022
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 4 minutes

Élaborer un système de surveillance du béton des ponts par des drones. Remplacer les protéines animales de l’alimentation par des insectes. Détecter rapidement et efficacement des maladies auto-immunes via des capteurs photoniques sur des puces microfluidiques. Ou encore, simuler, puis mettre au point, un matériau en carbone pour détecter en continu la présence de certains gaz dans des environnements spécifiques.

Tous ces projets ont au minimum quatre points communs. Ils mobilisent chacun un chercheur ou une chercheuse de haut niveau venu(e) de l’étranger disposant au moins d’une expérience postdoctorale. Ils impliquent à la fois un partenaire académique (université, haute école ou centre de recherche agréé) et une entreprise. Ils se déroulent en Wallonie et sur une période longue. Enfin, ils relèvent tous, comme 28 autres projets du même type, du programme Beware 2 (BElgian WAllonia REsearcher), cofinancé par la Région wallonne (SPW EER) et l’Union européenne.

Un programme ambitieux plombé par la pandémie

Au total, ce sont 32 chercheurs de haut vol qui, depuis 2020, ont posé leurs valises en Wallonie dans le cadre de cet ambitieux programme. « Une expérience extraordinaire », assure Mahmoud Eissa, un ingénieur civil égyptien désormais attaché à l’Université de Liège ainsi qu’à l’entreprise Qualitic, après un passage par le Japon. Un chercheur qui se réjouissait aussi voici quelques jours à Louvain-la-Neuve d’avoir pu bénéficier de ce programme alors que la planète baignait en pleine pandémie et que les déplacements n’étaient pas des plus aisés.

« Ce programme BEWARE visait à recruter 75 scientifiques étrangers », confirme Didier Flagothier, qui est à la tête du service des programmes de recherches internationaux au SPW EER (Economie, emploi, recherche). « Mais à cause de la pandémie, la mobilité de ces chercheurs a connu quelques difficultés. Ainsi, un chercheur australien, bien que sélectionné, n’a pas pu quitter l’Australie confinée ».

Des scientifiques en poste jusqu’en 2025

Si, au final, la moitié seulement du nombre de chercheurs potentiellement recrutables dans le cadre de ce programme a pu arriver en Wallonie, ce n’est pas faute d’en avoir fait la promotion. « Tous nos canaux d’information ont été sollicités, et ils ont très bien travaillé », souligne Didier Flagothier. « Je pense, notamment, aux relais européens comme le service Euraxess qui facilite la mobilité des chercheurs, mais aussi au travail des agents de liaison scientifiques de Wallonie-Bruxelles International

Les chercheurs recrutés resteront en poste jusqu’en 2025, mais il n’y a plus de nouvel appel à candidatures. Réunis à Louvain-le-Neuve voici quelques jours pour « l’événement final » de ce programme, l’heure était au bilan.

Mise en réseau au niveau régional

Utile ce programme? Assurément. Y a-t-il moyen de mieux faire? Certainement. Par exemple, en mettant d’emblée les chercheurs Beware en réseau.

« Nous travaillons chacun dans nos université et entreprises », commente Sivaramakhrisnan Ganesan. Ce chercheur indien est attaché au Centre de recherche Multitel, à Mons, ainsi qu’à l’entreprise D-TEK. Il travaille sur le système photonique de détection des maladies auto-immunes.

« Nous gagnerions à nous rencontrer plus tôt dans le cadre de ce programme. Si chacun travaille sur son propre projet, certaines technologies que nous étudions et développons sont de même nature. Nous pouvons aussi avoir, pour certains, des besoins techniques communs, qui existent peut-être ailleurs en Wallonie. En nous rencontrant et en échangeant avec les autres chercheurs de ce programme, nous pourrions gagner encore en efficacité », estime-t-il.

Une suggestion qui n’est pas passée inaperçue. Si un troisième programme Beware devait voir le jour, après 2025, cette dimension « réseau » reviendra sans aucun doute sur le tapis.

D’autant que lors de la soirée de clôture du programme Beware 2, Pavlo Bazilinskyy, le trésorier de l’association des anciens bénéficiaires des outils européens de mobilité des chercheurs « MSCA », dont relève le cofinancement du programme Beware, a pointé toute la pertinence de ce type de réseaux.

« Il est utile pour développer la recherche, la mobilité mais aussi la carrière des chercheurs. Sans oublier la transformation de leurs recherches en nouveaux produits et services, via la mise sur pied de start-ups », confirme celui dont l’association totalise quelque 20.000 membres.

Des bénéfices pour tous: chercheurs, universités et entreprises

Si un de objectifs majeurs du programme Beware 2 est bien de développer la compétitivité des entreprises wallonnes grâce à la recherche, qu’en est-il des partenaires académiques? La professeure Carine Michiels, vice-rectrice à la Recherche à l’Université de Namur applaudit.

« Ce programme a permis d’établir des collaborations durables et de qualité avec de nouvelles entreprises wallonnes, majoritairement des TPE/PME, de favoriser des contacts et le montage de projets d’envergure avec ces entreprises, d’envisager le montage de nouveaux projets suite aux résultats obtenus, et de mener à des transferts technologiques vers le tissu économique wallon et d’accroître sa visibilité internationale et celles de ses équipes de recherche », résume-t-elle dans la brochure dressant le portrait de quelques chercheurs « Beware 2 ».

Et à l’UNamur, on sait de quoi on parle. Un de ses précédents chercheur Beware, le Dr Tarek Barakat, libanais d’origine, a développé une solution technique pour dépolluer les fumées des poêles à bois. Une avancée qui a fait l’objet d’un dépôt de brevet et qui a, depuis, bénéficié d’un nouveau financement wallon FIRST Spin-Off. Son objectif: faire la preuve de la validité technique de son innovation et mettre sur pied une entreprise spécialisée en solutions catalytiques pour l’épuration de l’air.

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