Pays membres de l'Otan en Europe, en 2016.

L’affaire Gladio. Quelle affaire Gladio?

13 septembre 2016
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 3 min

PODCAST

 

Que reste-t-il de l’affaire Gladio, ce réseau dormant secret, mis en place en Belgique après la Deuxième Guerre mondiale et dont la santé, alors déjà déclinante (mais on ne le découvrira que plus tard) a défrayé la chronique en 1990? « Pas grand-chose », souligne d’emblée le Pr Hervé Hasquin, historien et Secrétaire perpétuel de l’Académie Royale de Belgique.

 

« Il a bien fallu constater au bout du compte que ce qui paraissait extravagant, surréaliste dans cette « affaire », s’est finalement délité au fil du temps ».

 

Le réseau « Stay Behind » belge

 

Gladio? « C’était un réseau Stay Behind », explique Hervé Hasquin. « Un réseau secret qui devait permettre l’évacuation de personnalités diverses du pays en cas de nouvelle invasion. Le contexte de la guerre froide était une des motivations de sa mise en place ».

 

Le Dr Hasquin a également mené une longue carrière politique. C’est au cours de celle-ci, qu’il a rejoint, en 1991, la Commission d’enquête parlementaire concernant le réseau clandestin Gladio belge. Cette commission a été mise en place quelques semaines après la révélation de son existence en novembre 1990. Hervé Hasquin a été un des rapporteurs de cette Commission.

 

"Le soi-disant Gladio belge", par Hervé Hasquin, éditions de l'Académie.
« Le soi-disant Gladio belge », par Hervé Hasquin, éditions de l’Académie.

« En six mois de travail, la Commission a réalisé des dizaines d’auditions de membres de l’armée, des services de renseignements. Elle a travaillé en étroite collaboration avec des magistrats », précise-t-il.

 

C’est à la lumière des conclusions de cette Commission qu’il vient de publier « Le soi-disant Gladio belge », aux éditions de l’Académie (collection « L’Académie en poche »).

 

« Gladio, c’était en réalité, dans 8 ou 9 pays membres de l’OTAN, la mise en place de réseaux dormants, de réseaux “Stay Behind”. En Belgique, il avait un double ancrage: un à la Sûreté de l’Etat et l’autre à l’armée. Mais l’existence même de Gladio au sein de ces deux départements de l’Etat était quasiment inconnue. C’est là le gage même de l’efficacité d’un tel réseau », précise l’auteur. « Leur destin n’est d’exister et d’agir que lorsque le pays est occupé, pour exfiltrer des personnages importants du royaume, etc. ».

 

« Ce réseau devait par essence resté secret, à côté des réseaux d’espionnage », indique encore le Secrétaire perpétuel de l’Académie royale de Belgique. En Belgique, il s’agissait de préserver l’anonymat absolu d’une centaine de personnes, qui seraient amenées à s’éveiller à l’action en cas d’occupation.

 

Qui étaient les membres du Gladio belge? Écoutez la réponse du Dr Hervé Hasquin.

Au fil des travaux de la Commission parlementaire, le mythe s’est dégonflé. Et pour cause, la menace « soviétique » fondait à ce moment-là comme neige au soleil. Le réseau Stay Behind belge s’est alors effacé. Néanmoins, l’affaire Gladio a tout de même eu un impact sur notre société.

 

Écoutez Hervé Hasquin détailler les principales retombées de l’affaire Gladio dans le paysage belge.

Depuis, les préoccupations des services de renseignement belge ont changé.  « L’après-Gladio a accouché d’une méfiance quasi pathologique à l’égard des méthodes de renseignement. Le souci du politiquement correct, la peur d’être taxé de racisme, de xénophobie ou d’islamophobie ont bridé les capacités d’analyse et d’anticipation de nos services jusqu’il y a peu », analyse Hervé Hasquin.

 

L’historien discerne là une ébauche d’explication quant à la montée du radicalisme en Belgique et des attentats qui ont tragiquement émaillé l’actualité belge, et avant cela, l’actualité française…

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