Figurine de Rascar Capac © Panoramique Terre Productions/Xavier Rambaud 

Rascar Capac fait son cinéma

13 décembre 2019
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

Il y a deux ans, Rascar Capac, la plus fameuse des momies précolombiennes du Musée Art & Histoire de Bruxelles, passait au scanner.

Depuis, elle fait du cinéma! Plus exactement, elle accompagne à l’écran les chercheurs bruxellois qui tentent d’en apprendre davantage sur ses origines. Le film documentaire historico-scientifique baptisé « Tintin et le mystère de la momie Rascar Capac », et réalisé par Frédéric Cordier, est désormais ficelé. Il sera proposé ce 21 décembre sur Arte. Il détaille les dernières découvertes liées à cette momie. Et les surprises sont au rendez-vous. Elles résultent notamment de l’utilisation de diverses techniques scientifiques mises en œuvre par les chercheurs, à Bruxelles ainsi qu’en France.

Rascar fait son apparition dans « Les sept boules de cristal », en 1948

Petit rappel historique. Rascar Capac est sorti de l’anonymat en 1948. À l’époque, la momie précolombienne du Musée Art & Histoire de Bruxelles ne répondait qu’au doux nom d’AAM5939, son numéro de classement dans les collections. Quand Hergé, le créateur et le dessinateur des aventures de Tintin, la présente dans ses albums «Les sept boules de cristal» et «Le Temple du Soleil», il la baptise « Rascar Capac ». Pour le dessinateur, cette momie ne serait autre que les restes d’un empereur inca. Mais est-ce bien le cas? Rascar vivait-il à l’époque des Incas? Était-il pourvu d’un statut social particulier ?

Pour répondre à ces questions, l’équipe de recherche dirigée par le conservateur des collections Amériques du musée, Serge Lemaitre, et l’archéologue Caroline Tilleux, a étudié la momie sous toutes ses coutures.

Il y a, par exemple, eu le passage de Rascar Capac dans le CT-scan des Cliniques universitaires Saint-Luc en 2017, des datations au carbone 14 de fragments de peau à l’IRPA (Institut royal du Patrimoine artistique), des analyses toxicologiques et archéoentomologiques sur des pupes retrouvées dans des fragments de textiles ainsi que des analyses archéobotaniques réalisées à l’Institut royal des sciences naturelles de Belgique, à Bruxelles.

Les chercheurs ont aussi étudié divers objets archéologiques arrivés au musée Art et Histoire de Bruxelles au milieu du XIXe siècle, en même temps que « Rascar ».

Rascar Capac sous le scanner © Panoramique Terre Productions/Xavier Rambaud

Cap sur Arica, au Chili

Les résultats de ces différentes analyses ont également conduit les enquêteurs dans le nord du Chili, dans une région côtière bordant le désert d’Atacama. Grâce au recoupement de données récoltées sur place, il leur a été possible d’identifier la provenance de la célèbre momie ainsi que la période dans laquelle elle s’inscrit.

Son corps a, semble-t-il, été inhumé dans l’un des cimetières côtiers de la ville d’Arica, à la fin du XVe ou au début du XVIe siècle.

Le CT-Scan montre qu’il s’agit d’un homme, dont l’âge a pu être estimé entre 30 et 40 ans. « Il semblait appartenir à une communauté dont les ressources principales et le commerce étaient tournés vers la pratique de la pêche », précise le Dr Lemaitre.

Rascar Capac au musée Art et Histoire de Bruxelles © Panoramique Terre Productions/Xavier Rambaud

Les objets archéologiques associés à Rascar Capac ainsi qu’à deux autres corps momifiés, parvenus au musée au même moment que lui, sont reliés à cette activité (harpons, hameçons, hampes, pointes de flèche, radeaux et pagaies miniatures, etc.).

Toutes ces informations permettent de cerner un peu mieux la fameuse momie. Il ne s’agit donc pas d’un roi inca. L’imagination d’Hergé, qui l’affuble d’une couronne et de bracelets en or dans ses bandes dessinées, symboles d’un statut social élevé, a dépassé la réalité. Rascar n’était sans doute qu’un « petit » pêcheur (1m52), de la côte Pacifique, au nord de l’actuel Chili…

Pour les scientifiques du musée, la cause est entendue. Pour les lecteurs des albums Tintin, le mythe restera sans doute intact!

 

Note: Le film « Tintin et le mystère de la momie Rascar Capac », de Frédéric Cordier, sera diffusé le 21 décembre sur ARTE, à 22h15 et fera aussi l’objet d’une diffusion sur une des chaînes de la RTBF en janvier 2020.

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