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17 janvier 2018
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 5 minutes

SERIE (3) / Diplomatie scientifique

La diplomatie scientifique prend parfois des aspects surprenants. Comme l’ouverture de ses laboratoires de R&D à des partenaires internationaux… De prime abord, l’idée peut sembler économiquement suicidaire. À l’autopsie, c’est loin d’être le cas.

En Wallonie, on l’a bien compris. Voici cinq ans, en 2013, à l’initiative de l’Agence Wallonne à l’Exportation et aux Investissements étrangers (AWEX), un nouveau réseau international d’innovation ouverte de ce genre était mis sur pieds. Son nom: OWIN (Open Worldwide Innovation Network).

« À l’époque, il regroupait trois membres, explique Amaëlle Haulet, sa directrice. « Aux côtés de l’AWEX, on retrouvait le bureau de commercialisation des technologies de l’Université Texas A&M et l’entreprise Coway de transferts technologiques de l’Université Tsinghua, située à Pékin (Chine). Depuis, un quatrième pays a rejoint OWIN (en 2016), l’état du Queensland australien. » Notons qu’à côté de ces membres « effectifs », on retrouve encore toute une série de membres associés.

Innovation ouverte

« L’idée maîtresse du réseau est de permettre à ses membres de pouvoir bénéficier des talents de chacun pour développer son potentiel d’innovation », précise Madame Haulet. « C’est ce que nous appelons de l’innovation ouverte. »

Amaëlle Haulet, directrice d'OWIN.
Amaëlle Haulet, directrice d’OWIN.

L’innovation ouverte? Le concept se rapproche de celui des publications scientifiques (open access) ou encore aux données en accès libre (open data). Il s’agit de favoriser et d’accélérer les processus d’innovation des partenaires du réseau grâce à la mise en commun, au partage. Une révolution dans le domaine. Jusqu’à l’émergence de ce concept d’open innovation au début des années 2000, les entreprises étaient plutôt frileuses à l’idée de partager leur savoir-faire. Le secret industriel était alors la norme unique.

Avec l’innovation ouverte, la collaboration devient la règle. Elle permet d’exploiter de bonnes idées nées dans une entreprise qui n’en a pas une utilité immédiate. L’innovation devient globale au sein du réseau.

« Le réseau OWIN entre clairement dans le concept de diplomatie scientifique », estime de son côté Philippe Lachapelle, qui fut à l’origine de ce réseau en 2013. Le Dr Lachapelle est directeur des partenariats technologiques et stratégiques à l’AWEX. Il est à l’origine de la longue et fructueuse collaboration mise en place depuis plus de dix ans entre la Wallonie et l’Université Texas A&M aux Etats-Unis. « OWIN est un laboratoire virtuel. Un laboratoire où la prise de décision commune est de mise et au service de tous ses membres. C’est une structure qui génère un effet de réseau, y compris avec le monde politique. En cas de conflit entre deux pays, ce réseau permet de garder ouverts certains canaux de communication et d’échanges ».

Bénéficier de ressources locales pertinentes

« L’innovation ouverte prônée par le réseau OWIN ne se limite pas aux seuls nouveaux produits », reprend Amaëlle Haulet. Ouvrir ses laboratoires à des tiers, cela signifie aussi, pouvoir partager ses process, son business model etc. Et on le voit, cela livre de bons résultats. J’en veux pour preuve l’exemple de cette entreprise belge active dans les biotechnologies qui a d’abord développé ses activités aux États-Unis avant d’adapter son business model pour gagner la Chine. Le réseau lui a permis d’accélérer sa croissance ».

OWIN vise à développer un écosystème de l’innovation en incluant différents pays, mais aussi différents types de partenaires. Aux États-Unis, plusieurs universités l’ont déjà rejoint. Mais on y retrouve aussi un bureau d’avocats d’Austin (« Michael Best »), au Texas, qui dispose de plus de 200 bureaux dans le pays. Ces spécialistes interviennent notamment pour des questions de brevets, de propriété intellectuelle. Ils sont particulièrement attentifs aux start-ups.

« Le réseau OWIN est une sorte de gigantesque laboratoire », précise Madame Haulet. « Un laboratoire dédié à l’innovation où on teste différents modèles, où le droit à l’erreur est admis. C’est un réseau de connaissance qui va au-delà du simple business. La confiance qui s’y développe est bien entendu bénéfique pour tous, y compris les entreprises ».

Mais aussi les universités, y compris en Wallonie et à Bruxelles. « Notre modèle est tellement séduisant que nous sommes aussi approchés ces derniers temps par plusieurs entreprises basées en Flandre », conclut Amaëlle Haulet.

 

En Fédération Wallonie-Bruxelles, l’Open Access devient la norme

Il n’y a pas que l’innovation qui « s’ouvre » sur le monde. Les publications scientifiques suivent également cette tendance. En Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), cela devient même obligatoire.

En décembre 2017, le gouvernement de la FWB a en effet adopté un avant-projet de décret en ce sens. Il obligera à terme les chercheurs qui ont bénéficié, ne fût-ce qu’en partie, d’un financement public, de publier en accès libre les résultats de leurs travaux.
 
« En favorisant le partage des résultats de la recherche ayant fait l’objet d’un financement public, le décret ‘ Open Access’ permet la libre circulation du savoir et favorise ainsi l’innovation », indique le Ministre Marcourt. Mr Marcourt est en charge de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en FWB. Il est à l’origine de ce décret.

« Accroître la visibilité des chercheurs, de leurs travaux et des institutions d’enseignement supérieur tout en favorisant l’accessibilité du savoir par l’ensemble de la population sont les objectifs sous-jacents de ce nouveau texte législatif», précise encore le ministre.

Le décret prévoit notamment que les chercheurs déposent dans une archive numérique institutionnelle leurs publications scientifiques issues de leurs recherches réalisées avec le soutien de fonds publics. 

Ce dossier a bénéficié du soutien du Fonds pour le journalisme de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

 

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