Dix ans de variations du rayonnement IR terrestre scrutées depuis l’espace

18 novembre 2021
Par Daily Science
Temps de lecture : 3 minutes

En absorbant une partie du rayonnement de la Terre émis vers l’espace, les gaz à effet de serre jouent un rôle clé dans l’équilibre énergétique de notre planète. Leurs rejets croissants dans l’atmosphère (principalement de CO2 et de CH4), en lien avec les activités humaines, entraînent une perturbation de cet équilibre, avec pour conséquence un dérèglement du climat. En analysant 10 années de mesures par satellites, des scientifiques de l’Université libre de Bruxelles en collaboration avec une équipe française, ont pu quantifier avec une précision inégalée les changements dans le rayonnement terrestre sortant, et les relier directement aux variations des concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre. Ces résultats ouvrent la voie à de nouvelles méthodes d’évaluation de l’impact des changements de la composition de l’atmosphère sur notre climat.

L’excès nuit en tout

Le climat de notre planète est étroitement lié aux flux d’énergie entrant et sortant du système Terre-atmosphère : une partie du rayonnement solaire qui nous parvient est directement réfléchie vers l’espace. La fraction restante est d’abord absorbée puis réémise par la surface de la Terre et l’atmosphère vers l’espace sous forme de chaleur.

En traversant l’atmosphère, celle-ci est piégée en partie par les gaz à effet de serre qui maintiennent la surface de la Terre à une température moyenne d’environ 15°C.

Depuis le début de l’ère industrielle, l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre dans notre atmosphère perturbe l’équilibre énergétique de notre planète en capturant une partie croissante du rayonnement émis par la Terre, avec pour conséquences une augmentation des températures de surface.

Le bilan énergétique du système Terre-atmosphère sous la loupe

Une évaluation précise de l’impact de l’augmentation des gaz à effet de serre et de ses effets rétroactifs sur le flux sortant est essentielle pour améliorer notre compréhension du système Terre-atmosphère et pour la modélisation du climat présent et futur.

Des mesures par satellites à basse résolution spectrale (dites « à large bande ») sont utilisées depuis plus de 40 ans pour étudier le bilan énergétique du système Terre-atmosphère. Cependant, celles-ci ne sont pas adaptées lorsqu’il s’agit de quantifier l’impact individuel de chacun des gaz sur le rayonnement sortant.

Une meilleure évaluation peut être obtenue par l’utilisation de mesures par satellite à plus haute résolution spectrale. En effet, en absorbant le rayonnement terrestre, chacun des gaz dans l’atmosphère laisse une empreinte unique dans le spectre qui peut alors être exploitée pour surveiller la mise en œuvre des mesures internationales qui visent à diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

45 milliards de données analysées

« Dans le cadre du projet ERC-advanced IASI-FT, nous avons analysé 45 milliards de mesures journalières obtenues entre 2008 et 2017 par le sondeur infrarouge à haute résolution spectrale IASI (pour Interféromètre Atmosphérique de Sondage dans l’Infrarouge) à bord des satellites Metop », explique Simon Whitburn, chercheur au sein du laboratoire « Spectroscopy, Quantum Chemistry and Atmospheric Remote Sensing » (SQUARES) de l’ULB.

« Nous avons pu évaluer avec précision, avec l’équipe du LATMOS (Université de la Sorbonne), les changements dans le rayonnement terrestre sortant. Les variations des concentrations des principaux de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (essentiellement H2O, CO2 et CH4) sont visibles, mais également la diminution des CFC-11 et CFC-12, deux molécules destructrices d’ozone visées par le protocole de Montréal et dont le signal est détectable dans les spectres IASI», souligne-t-il.

L’archive établie sur 10 ans constitue la première base de données qui permet de suivre les augmentations/diminutions des concentrations de chaque gaz à effet de serre indépendamment et en tout point du globe. Elle peut être utilisée, notamment, pour valider les modèles climatiques et vérifier si la mise en œuvre des réglementations internationales pour tendre vers une décarbonisation de l’atmosphère fonctionne.

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