Pr Willem de Vos, cofondateur de la spin-off The Akkermansia Company © Christian Du Brulle

De la recherche fondamentale au produit commercial : le succès d’ Akkermansia muciniphila

19 septembre 2022
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 3 min

La « petite bactérie appelée à déboucher sur de grands projets », comme nous en parlions voici quatre ans lors de la création de la spin-off du Pr Patrice Cani, a tenu ses promesses. Akkermansia muciniphila, une bactérie présente naturellement dans nos intestins, et dont les effets bénéfiques pour la santé avaient été démontrés par le chercheur de l’UCLouvain et le Pr Willem de Vos, son collègue de l’Université de Waegeningen (Pays-Bas), sera, en effet, une réalité commerciale à l’automne.

Maintenir une bonne santé

Distribuée sous forme d’un complément alimentaire, Akkermansia pourrait aider à conserver un bon taux de telles bactéries dans l’intestin. Et par la même occasion, aider à maintenir une bonne santé.

Elle pourrait aussi être intéressante pour les personnes souffrant de problèmes cardio-métaboliques (résistance à l’insuline, hyperglycémie, cholestérol sanguin élevé et accumulation de graisse viscérale). Chez celles-ci, les chercheurs ont, en effet, remarqué une plus faible présence d’Akkermansia muciniphila dans l’intestin.

Et il en irait de même pour le maintien d’une bonne immunité, d’une glycémie et d’un taux de cholestérol sanguin normal. Tout en évitant une prise de poids excessive.

C’est sur tous ces facteurs que joue la fameuse bactérie désormais mise en boîte.

De la recherche au commerce

En 2018, les Prs Cani et de Vos y croyant dur comme fer avaient lancé A-Mansia biotech, leur spin-off commune. Rebaptisée tout récemment The Akkermansia Company, pour une question de lisibilité marketing, l’entreprise va mettre sur le marché son premier complément alimentaire en septembre.

Les autorisations de mise sur le marché par l’autorité européenne EFSA sont acquises. L’unité de production en Italie est opérationnelle et la spin-off s’est assuré la collaboration de Metagenics.

« Le produit commercial générera des revenus qui seront en partie réinvestis dans la recherche » assure le Pr Patrice Cani.

Une bactérie pasteurisée encore plus efficace

La bactérie Akkermansia, découverte et isolée du microbiote intestinal humain, été caractérisée pour la première fois en 2004, au sein du laboratoire néerlandais du Pr Willem de Vos. « À l’époque, on étudiait toute une série de bactéries intestinales », explique-t-il. « Comme celle-ci nous a semblé intéressante, nous avons réalisé diverses recherches complémentaires à son sujet. »

Avec le Pr Patrice Cani, il a pu mettre le doigt sur les effets bénéfiques d’Akkermansia. « Elle restaure la fonction barrière de l’intestin », explique-t-il. « Ceci entraîne une réduction de l’inflammation et, à terme, un meilleur contrôle du stockage des graisses, du métabolisme du glucose et de la dépense énergétique. »

Plus frappant encore, le processus de pasteurisation augmente l’efficacité d’Akkermansia, en le rendant stable et donc lui assurant une longue durée de conservation. Ce qui permet de la produire sous des formes faciles à administrer aux consommateurs. « Suite à la pasteurisation, la bactérie meurt» précise le Pr de Vos, « mais ses protéines sont toujours bien présentes et fonctionnelles.»

Une collaboration fructueuse

La collaboration scientifique entre les deux chercheurs et leurs labos respectifs a donné lieu à la publication de dizaines d’articles scientifiques. Ainsi qu’à une étude chez l’Homme démontrant la capacité d’Akkermansia muciniphila pasteurisée à limiter les risques de détérioration de l’état de santé des sujets (prédiabète, risques cardiovasculaires), avec une réduction des marqueurs inflammatoires au niveau du foie, de la résistance à l’insuline et de l’hypercholestérolémie.

« Nos recherches continuent », dit Willem de Vos. « Nous étudions désormais les effets potentiels d’Akkermansia municiphila sur certaines maladies auto-immunes. Elle pourrait également présenter un intérêt dans d’autres pathologies. Par exemple, dans le cadre de l’immunologie du cancer, du traitement des carcinomes. Nous travaillons sur cette piste avec nos collègues d’Helsinki ».

Avec de nouveaux débouchés potentiels pour la spin-off installée à Mont-St-Guibert ? « Pourquoi pas », conclut-il.

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