Pour attraper ses proies, le caméléon projette rapidement sa langue, parfois sur une distance qui fait deux fois sa taille. Il saisit son repas, et le ramène illico dans sa gueule.
À moins de disposer d’une caméra ultrarapide pour saisir tous les détails de cette capture, difficile de bien observer la manœuvre. Elle ne dure que quelques fractions de seconde…
C’est ce que vient de faire une équipe de chercheurs, largement «belge». Pascal Damman et Déborah Lanterbecq, du Laboratoire Interfaces & Fluides Complexes de l’Université de Mons (UMons), Fabian Brau de l’Unité de chimie physique non linéaire de l’Université Libre de Bruxelles (ULB) et Leïla-Nastasia Zghikh, du Laboratoire d’histologie de l’UMons, ont voulu comprendre comment des proies, faisant parfois 30% de la masse du prédateur, étaient attrapées par cette langue véloce.
Une question de viscosité et de surface de contact
En collaboration avec Vincent Bels, du Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris, les chercheurs ont pu montrer que c’est la viscosité du mucus sécrété au bout de la langue de l’animal qui lui permettait de « coller » sa proie et de la ramener à lui.
« Ce mucus présente une viscosité 400 fois supérieure à celle de la salive humaine. Couplée à la déformation du bout de la langue, qui s’élargit au point de contact, elle explique l’efficacité du piège adhésif mis au point par le caméléon », révèle l’équipe, qui a étudié la biologie de l’animal mais a surtout modélisé, sur base de la détermination de la viscosité de ce mucus, les paramètres limites de cette technique de chasse.
Un animal qui multiplie les signes particuliers
La langue protractile du caméléon qui lui permet d’attraper des proies à distance n’est pas la seule particularité de cet animal. On pointera:
- – Les doigts opposables. Ses pattes comportent des doigts séparés en deux groupes opposables lui permettant, telle une pince, de s’agripper fermement aux branches.
- – Une mobilité oculaire découplée. Ses yeux ont une mobilité indépendante, lui assurant un vaste champ de vision.
- – Ses cristaux photoniques. Sa peau change de couleur grâce à la modification de l’organisation de nanocristaux, des iridophores, qu’elle contient dans certaines cellules. À ce propos, d’autres travaux, menés par un ancien de l’ULB, le Pr Milinkovitch, avaient déjà permis de mettre cette caractéristique en lumière.