Mêler art et sciences pour faire progresser les connaissances et pour mieux les partager avec le public: une bonne idée? Un saut aux Halles Saint-Géry, à Bruxelles, aide à répondre à cette question. L’exposition « Perspectives » met en lumière, et de manière imagée, le travail de scientifiques de l’ULB revisité par les étudiants de La Cambre. De quoi mieux cerner, par exemple, des projets de recherche portant sur la mécanique des ions dans la lutte contre la mucoviscidose, la valorisation des sédiments issus du dragage du canal Bruxelles-Charleroi ou encore l’utilisation des signaux WiFi afin d’analyser les mouvements d’une foule.
« Cette exposition retrace trois éditions du projet académique et interdisciplinaire «Recherche en Perspective » pour lesquelles des étudiants de Master en Communication Visuelle et Graphique (ENSAV La Cambre) et des chercheurs de l’ULB issus de disciplines variées ont collaboré », indique Ohme, l’association bruxelloise à l’origine de cette expo.
Susciter une émotion
« Ensemble, ils ont co-créé et produit des supports de communication illustrant de manière attractive et visuelle des contenus scientifiques parfois difficiles à appréhender et à communiquer . »
Bref, à travers ces exercices, il s’agit d’explorer d’autres manières de rapprocher la science de leurs utilisateurs finaux, les citoyens, et ce via le design graphique.
Que représente l’art pour un scientifique? « Il suscite une émotion », indique Gilles Bruylants, responsable du Laboratoire « Engineering of Molecular NanoSystems », de l’École polytechnique de Bruxelles (ULB). Quant aux sciences, « elles permettent de comprendre le monde », estime Nicolas Rome, coordinateur pédagogique de l’atelier de Communication visuelle et graphique de l’ENSAV La Cambre.
Résidence d’artistes au cœur de la science
Les deux mondes, sont-ils pour autant cloisonnés? Ou connaissent-ils de subtiles et fructueuses relations? « On parle de plus en plus des Stem (Sciences, techniques, ingénierie et mathématiques) quand on évoque les filières liées aux sciences et aux techniques », indique Marie Carmen Bex, Directrice adjointe d’Innoviris, l’agence bruxelloise de financement de la recherche.
« Ces filières sont aujourd’hui au cœur de stratégies publiques. Nous avons besoin de ces métiers. Y adjoindre la dimension artistique a du sens. Il n’y a pas si longtemps, l’art et les sciences étaient intimement liées. Aujourd’hui, on observe un regain d’intérêt pour cette convergence. La multiplication des résidences d’artistes au sein d’institutions scientifiques, comme au CERN, par exemple, en atteste »
« Les binômes art et sciences qui ont fait dialoguer les chercheurs de l’ULB et les étudiants de la Cambre constituent un exemple de synergies réussies entre ces deux univers », analyse Arthur Dubois, étudiant de l’ENSAV La Cambre.
« Cette expérience a permis la transmission de concepts d’une recherche à un non scientifique, qui ensuite s’en saisit pour les mettre en images, ce qui donne à les visualiser. Ces confrontations permettent de mieux comprendre ce que perçoit l’interlocuteur, et par-delà, le public. Cela nous amène à nous remettre en cause, dans notre communication. A retourner à des notions qui parfois nous semblent évidentes », dit Nicolas Rome. « Toute la difficulté réside dans l’équilibre entre le respect d’une certaine rigueur scientifique et la qualité, l’attractivité du rendu artistique ».
Le poster à l’honneur
Avec ces rencontres provoquées, il ressort clairement que la science peut aussi transmettre des émotions. La preuve en images, ou plus exactement en posters: ceux présentés dans cette exposition par les étudiants de La Cambre.
Le poster est un des supports privilégiés de la communication scientifique. Il présente un résumé académique d’un travail de recherche. « Il constitue, avec les présentations orales, le support de communication le plus utilisé par les scientifiques pour faire part de l’avancée de leurs travaux de recherche lors de colloques ou de conférences », rappelle Ohme.
« Il s’agit d’un support de présentation séduisant, car il reste accessible et dure plus longtemps qu’une intervention orale. Ainsi, il permet de toucher un public plus large et moins spécialiste, et peut susciter des rencontres et des discussions informelles. »
Pour l’opération « Recherche en Perspective », les graphistes et les scientifiques ont naturellement été orientés vers ce support, la co-création du poster constituant la base de la collaboration.
Pour certains binômes et dans un second temps, ce fut également l’occasion d’explorer la vidéo, l’édition ou encore le jeu vidéo. Et ce, toujours dans l’objectif de rendre accessible la connaissance issue de domaines variés. Autant de créations à découvrir d’ici la fin de l’année, aux Halles Saint-Géry.