Les maladies cardiovasculaires? « Jusqu’il y a quelques années, on estimait qu’il s’agissait surtout d’une affaire d’hommes ». Ce constat, c’est Pieter Vynckier, doctorant à l’université de Gand, qui le pose. Le chercheur défendra cet été sa thèse de doctorat soutenue par le Fonds pour la chirurgie cardiaque. Pendant trois ans, il a travaillé sur les différences entre hommes et femmes en ce qui concerne les maladies cardiovasculaires. « Heureusement, dans les faits, les choses ont bien évolué », précise-t-il aussitôt. « Seules quelques différences subsistent».
Par contre, dans l’imaginaire collectif, certains stéréotypes ont la vie dure. « Quand au début de ma thèse, je discutais de ce problème avec des amis, les avis étaient encore assez tranchés », se rappelle-t-il. « On me disait: bien sûr que les problèmes cardiovasculaires touchent davantage les hommes que les femmes! Or, dans les faits, les chiffres sont clairs. Ce type de maladie touche plutôt les femmes que les hommes, dans de faibles proportions, mais tout de même! »
Prise en charge et suivi des recommandations
« Depuis le début de mes recherches, en octobre 2019, j’ai tenté de mieux comprendre comment les patientes atteintes de maladies coronariennes étaient prises en charge dans la pratique clinique quotidienne par rapport aux hommes. Mais aussi comment la gestion des facteurs de risque différait éventuellement selon le genre », détaille le chercheur du groupe de recherche en épidémiologie et prévention du département de santé publique de l’université.
« Les mêmes conseils, les mêmes traitements, étaient-ils formulés ? Ces traitements et ces recommandations, étaient-ils suivis de manière équivalente, que l’on soit un homme ou une femme? »
Pour tenter d’y voir clair sur la situation actuelle, le chercheur, initialement formé en sciences infirmières en haute école (Courtrai) puis à l’université de Gand pour un master, a travaillé sur les données disponibles dans le cadre de la grande étude européenne transversale EUROASPIRE (European Survey Of Cardiovascular Disease Prevention And Diabetes). Elle a porté sur plus de 8.000 personnes. Un quart de ces patients étaient des femmes.
Changer d’habitudes n’est pas simple
Dans un premier temps, il s’est intéressé à la prise en charge médicale des personnes souffrant d’un problème coronarien. Cette première étude ne lui a pas permis de mettre en évidence de manière significative d’éventuelles différences de genre en ce qui concerne les traitements prescrits, les interventions ou encore les schémas de réadaptation.
Pieter Vynckier s’est ensuite penché sur la gestion des facteurs de risque. Il en ressort que les femmes restaient moins susceptibles d’atteindre les objectifs recommandés par les directives en matière de facteurs de risque. « Les femmes sont plus susceptibles de présenter des problèmes d’obésité, de manque d’exercice physique ou de contrôle du cholestérol par rapport aux hommes », dit-il.
Le chercheur s’est alors intéressé à l’évolution des comportements après un incident cardiaque. Là aussi, il ne remarque pas de différence entre les hommes et les femmes face aux conseils donnés par les professionnels de la santé: ce qu’on appelle dans le jargon de la prévention secondaire (après un accident cardiaque). « Sauf, peut-être que les femmes ont davantage tendance à adopter une meilleure alimentation alors que les hommes privilégient plutôt l’exercice physique », précise-t-il.
Au final, Pieter Vynckier note encore que les différences entre hommes et femmes s’estompent dans le domaine de la prévention secondaire, et certainement dans le domaine du traitement médical. « Ce qui est positif, c’est que ces dix dernières années, il y a eu une prise de conscience, des initiatives qui mettent l’accent sur les risques spécifiques pour les femmes ont été prises. Ces études montrent aussi qu’il faudrait davantage mettre aujourd’hui l’accent sur la compliance et… sans doute aussi la prévention primaire des maladies cardiovasculaires. »
« Mes recherches appellent des travaux complémentaires, par exemple des enquêtes plus qualitatives sur la raison des différences mises en lumière. Et enfin, il conviendrait aussi d’inclure davantage de femmes dans les essais cliniques, qui sont aujourd’hui souvent dominés par les patients masculins. », conclut-il.