Onze petites pointes en silex racontent la chasse aux chevaux il y a 23.000 ans

22 mai 2018
Temps de lecture : 3 minutes

Les archéologues du Tracéolab (préhistoire) de l’Université de Liège ont fait en 2015 une découverte qui, de prime abord, pourrait sembler banale. Lors de fouilles réalisées dans le sud de la France, ils ont exhumé sur le site préhistorique des Prés de Laure (vallée du Jabron, dans le Var) onze petites pointes de silex…

Cette trouvaille faite dans le cadre d’une étude pilotée par le Centre National de la recherche scientifique (français), se doublait de la découverte de fragments d’os.

Une arme composite âgée de 23.000 ans

Analysée par toute une série de spécialistes (des géomorphologues, des géomaticiens, des spécialistes des industries en pierre taillée et des archéozoologues), cette surprenante collection a été identifiée et datée. Il s’agirait des restes d’une arme vieille de plus de 23 000 ans jamais découverte dans un site du sud-est de la France.

Le travail interdisciplinaire des chercheurs a permis de reconstituer, à partir des fragments d’une pointe en os découverte en association avec les 11 barbelures en silex, ce qui est à ce jour la plus ancienne attestation formelle d’une pointe d’arme de chasse composite.

« L’étude des armes préhistoriques repose le plus souvent sur des éléments isolés (pointes, armatures) dont il n’est pas toujours possible de comprendre la fonction exacte. Les caractéristiques de ces armes échappent encore en grande partie aux spécialistes », précise l’Université de Liège.

« Depuis 2013, une équipe internationale coordonnée par le CNRS et l’Université de Liège fouille le site préhistorique des Prés de Laure (Comps-sur-Artuby). À la faveur de conditions de préservation tout à fait exceptionnelles, les chercheurs ont exhumé les restes de plusieurs occupations humaines étalées entre 35 000 et 20 000 ans”.

La découverte d’un tel site en moyenne montagne apporte des informations inédites sur la façon dont nos ancêtres chasseurs-cueilleurs se déplaçaient et exploitaient les ressources du territoire méditerranéen durant la dernière période glaciaire.

Archéologie expérimentale à l’ULiège

Ce n’est qu’en 2015 que les archéologues ont mis au jour une concentration de 11 petites pointes en silex distribuées de part et d’autre des fragments d’un élément osseux d’une dizaine de centimètres de longueur.

Le laboratoire TraceoLab de l’Université de Liège a conduit l’analyse des pointes en silex pour parvenir à identifier les sources des matières premières utilisées, les méthodes de fabrication mises en œuvre et la manière dont ces éléments ont été fixés sur la pointe en os.

 

Une partie importante de la démonstration repose sur la réalisation d’une expérimentation qui a nécessité la reproduction de 13 pointes en os et 100 barbelures en silex qui ont été projetées sur une cible artificielle au propulseur et à l’arc. C’est grâce à un tel protocole expérimental, rendu possible par la présence au sein de l’équipe d’un expérimentateur, que les chercheurs ont pu reconstituer l’arme et son fonctionnement.

Cette découverte est à ce jour la plus ancienne preuve d’une arme de chasse composite (une pointe de nature organique doublée de barbelures d’origine minérale). Cette arme a été utilisée, il y a plus de 23 000 ans, pour la chasse de chevaux dont les restes ont été retrouvés à proximité.

« Cette découverte permet de manière inédite de restituer une arme complète et d’en comprendre les caractéristiques balistiques. Elle permettra de réévaluer de nombreuses pointes en pierre découvertes isolément dans d’autres sites et contribue à mieux comprendre l’évolution des armes et techniques de chasse au cours de la Préhistoire en Europe », conclut-on à Liège.

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