Tissu pour bandes transporteuses avec capteurs de température © VdSWeaving

Avec BEL-COO, l’innovation industrielle se fait collaborative

22 août 2022
par Christian Du Brulle
Temps de lecture : 5 minutes

Série: Collaborer pour innover (1/5)

L’Union fait la force. La devise de la Belgique, est-elle aussi d’application dans le domaine de l’innovation? Les trois autorités régionales belges en charge de la recherche appliquée (SPW Recherche, Innoviris et Vlaio) en sont convaincues. BEL-COO, leur programme commun d’innovation permettant aux entreprises des trois régions du pays de travailler ensemble au développement de nouveaux produits, de nouveaux procédés ou de nouveaux services porteurs d’un vrai potentiel de commercialisation en atteste. Cette semaine, Daily Science propose à ses lecteurs de découvrir cinq exemples concrets de ces recherches collaboratives, dans des domaines parfois surprenants, mais toujours de pointe.

Le textile intelligent se tisse entre Farciennes et Audenaerde

Des pneus qui surveillent eux-mêmes leur état d’usure, une bande transporteuse qui détecte le taux d’humidité des matériaux qui y transitent, un matelas qui communique la température de la personne qui y repose… Les applications liées aux textiles intelligents sont multiples.

« Tout l’enjeu est de pouvoir produire de tels textiles à des coûts raisonnables », tempère Axel Soyez, l’administrateur délégué de la société Desimone, basée à Farciennes. « Ce qui signifie qu’il faut pouvoir automatiser la production. Fabriquer de tels textiles à la main est hors de prix. Et le défi est de taille. Insérer des capteurs, des petites cartes électroniques ou des puces dans un tissu est extrêmement compliqué. »

Avec l’entreprise VdSWeaving, Desimone, qui est spécialisée dans l’automatisation de procédés industriels, s’est attelée à la mise au point d’un tel système d’automatisation de grande précision.

À Audenaerde, VdSWeaving produit depuis des dizaines d’années des textiles techniques pour de multiples clients. Les deux entreprises avaient été mises en contact l’une avec l’autre par l’entremise du centre de recherche Centexbel.

Contraintes de souplesse, de connectique et de sécurité

« Quand il s’agit d’un support relativement rigide, comme les cartes électroniques de nos GSM ou de nos ordinateurs, les connexions sont toujours situées au même endroit », reprend Axel Soyez. « Il est donc relativement simple de mettre au point une machine qui établit automatiquement ces connexions. Quand il s’agit d’un textile souple, cette précision submillimétrique n’est évidemment plus tout à fait présente. »

En effet, le tissu peut bouger lors des manipulations. Par ailleurs, il faut pouvoir réaliser les connexions entre les capteurs et les fils conducteurs tissés dans le textile. Ces fils conducteurs doivent être isolés: pas question d’électriser la personne dont la peau est en contact avec ce tissu. Mais il faut aussi être capable de se brancher sur ce réseau et donc dénuder juste ce qu’il faut de fil pour que les contacts s’établissent.

« Le défi est de conserver la souplesse du tissu tout en disposant d’une machine capable de repérer de manière automatique les fils qui transmettent l’information afin d’y connecter les capteurs », résume-t-il.

Dispositif d’intégration de capteurs dans un textile connecté © Desimone & VdSWeaving

Détecter la mort subite du nourrisson

Dans le cadre du projet SMARTWEAVE, Desimone et VdSWeaving ont travaillé sur un tissu doté de capteurs de température destiné à un matelas intelligent. « Nous avions déjà planché sur ce type de tissu dans le cadre d’un projet européen », indique Guy Van den Storme, le patron de VdSWeaving. « Un prototype avait été mis au point. Mais le problème de l’automatisation de l’intégration des capteurs dans le tissu subsistait. D’où notre projet avec Desimone ».

Le matelas connecté mesure en permanence l’évolution de la température du nourrisson. Ce type de paramètre est un bon indicateur pour la détection de problèmes éventuels pouvant mener à un cas de mort subite.

« Nous avons pu disposer de quelques mètres carrés d’un tel tissu connecté, mais fabriqué à la main », reprend Axel Soyez. « Le défi industriel relevé avec notre partenaire a été de pouvoir industrialiser le tissage de ce textile spécifique. C’est-à-dire pour VdS Weaving de pouvoir y intégrer un réseau de fils électriques isolés exactement là où ils doivent l’être afin que nous puissions y intégrer tout aussi automatiquement les capteurs de température. »

Le projet, qui vient de se terminer, a permis d’atteindre ces objectifs. Un brevet a été déposé en février 2022. « Nous avons dans nos bureaux une machine qui tourne et qui place, dans un tissu connecté fourni par VdSWeaving, des capteurs de manière fiable et répétitive », précise Axel Soyez.

« Nous avons même été un petit peu plus loin que les objectifs de départ, car nous avons aussi fait d’autres essais sur d’autres types de tissus avec d’autres types de capteurs. Ceci afin de pouvoir, à terme, commercialiser des machines pour la production de tissus intelligents destinés à d’autres applications », conclut-il.

Textile connecté pour matelas © Desimone

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