La recherche en microbiologie au service de notre santé

23 juin 2023
par Raphaël Duboisdenghien
Temps de lecture : 4 minutes
“Mes années Pasteur”, par Philippe Kourilsky. Editions Odile Jacob. VP 24,90 euros, VN 19,99 euros

Philippe Kourilsky a vécu de belles aventures. L’immunologiste en donne un aperçu dans «Mes années Pasteur». Aux éditions Odile Jacob.

Le membre associé à la Classe technologie et société de l’Académie royale de Belgique craint de n’avoir pas suffisamment insisté sur «la chaleur humaine qui règne dans des labos où tous sont animés par la même passion de la découverte. Ou dans les salles du Collège de France où tous sont pénétrés du désir de connaître et de partager la connaissance.»

Envie de faire de la recherche

«J’ai toujours été à la recherche des temps à venir», poursuit le Pr Kourilsky. «Si la propension à se projeter dans le futur est habituelle chez les chercheurs, chez moi, elle est exacerbée. Mes réflexions dérivent irrésistiblement vers le futur. Analyser le passé ne me suffit pas. J’ai besoin d’aller vers l’avant. Et, en plus, de passer à l’action.»

Les jeunes sont les artisans de la science de demain… «J’espère leur transmettre mon enthousiasme pour la science. J’espère avoir donné aux étudiants l’envie de faire de la recherche. Je me désole de voir tant de belles intelligences se perdre dans la finance. L’argent n’est pas le plus important. L’aventure intellectuelle l’est beaucoup plus.»

Dans la cour des grands

En 1965, le polytechnicien Philippe Kourilsky intègre le laboratoire du biologiste François Gros, le codécouvreur de l’ARN messager. Le futur directeur général de l’Institut Pasteur à Paris étudie le développement du phage lambda dans des bactéries infectées. Il analyse ses ARN messagers grâce à son ADN purifié. Ce mangeur de bactéries est récupéré à partir de bouillons de culture. C’est en Italie, à Naples, que le chercheur apprend les rudiments de la génétique des phages.

Après s’être formé à la recherche, en partie sur le tas, avec pas mal d’essais et erreurs, le futur membre de l’Académie française des sciences soutient sa thèse de doctorat en 1970. Il remplace François Gros à un congrès scientifique majeur aux États-Unis.

Philippe Kourilsky est alors admis dans la cour des grands. «J’y fis connaissance de plusieurs membres de l’informel mais influent club du phage. Et j’y fus intégré d’autant plus facilement que je maîtrisais des techniques moléculaires assez innovantes. Cela me valut d’être invité à enseigner dans les cours d’été expérimentaux du phage. Je fus aussi invité à écrire un article dans le Lambda Book pour faire la synthèse de l’état des connaissances sur le phage.»

Un métier de rêve

«J’estimai alors que j’avais choisi un métier de rêve. À double titre. C’était le métier dont je rêvais et celui dans lequel mes rêves pouvaient s’exprimer. Rêve de découverte, rêve d’être utile, rêve de reconnaissance et de notoriété. Tout conspira à faire de ce métier à demi manuel une véritable passion.»

De retour à l’Institut Pasteur après un séjour au Canada, des recherches sur le phage lambda à Genève, Philippe Kourilsky peut développer, à 30 ans, un petit groupe de chercheurs.

Le scientifique tente d’appliquer le phénomène qu’il avait découvert en Suisse. Un minimum de 2 particules de phage est nécessaire pour lysogéniser une bactérie. Lui permettre de produire exponentiellement des bactériophages par un processus biochimique.

Le chercheur se réoriente vers l’ingénierie génétique. Ce génie génétique, devenu génétique moléculaire, bouleverse la biologie. Philippe Kourilsky se dirige vers l’étude de l’immunité. À 51 ans, après 27 ans de recherches, le chef du cours d’immunologie approfondie à l’Institut Pasteur est happé, de 1993 à 1996, par le groupe Pasteur Mérieux Connaught à Lyon. Pour superviser une vingtaine de programmes de recherche et développement. Destinés à améliorer le vaccin contre la grippe, le méningocoque. Découvrir des vaccins contre la maladie de Lyme et le sida. Lancer des recherches de vaccins anti-cancer.

À la tête de l’Institut Pasteur

Revenu à la vie pasteurienne, le conférencier au Collège Belgique est appelé, à 57 ans, à prendre la tête de l’Institut. Avec ses quelque 2.500 collaborateurs. Une dizaine de départements de recherche.

«Dès ma prise de fonction, j’affichai pour mission l’excellence de la recherche biologique», souligne Philippe Kourilsky. «Au premier chef microbiologique. Au service des hommes et de leur santé. Le mot service était fondamental et renvoyait à la santé publique.»

«À leur mesure et à leur rythme, mes successeurs ont, comme moi, apporté leur pierre à cet édifice paradoxalement stable dans son instabilité. Contraint à un perpétuel déséquilibre vers l’avant. Entre la recherche fondamentale et ses applications. Entre la recherche pure et la santé publique. Entre le public et le privé.»

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