Le débat a été lancé en début d’année par le Fonds de la recherche scientifique (F.R.S.-FNRS) à l’occasion de la première cérémonie des « FNRS awards ». Il tourne autour d’une simple question: les prix scientifiques, sont-ils la cause ou la conséquence de l’excellence? Pour tenter de faire la lumière à ce propos, quatre scientifiques et trois mécènes ont été amenés à confronter leurs points de vue.
Donner de la visibilité
Pour les mécènes, les prix scientifiques qu’ils organisent avec la collaboration du FNRS et souvent aussi de son alter ego flamand, le FWO, constituent soit des prix qui récompensent de belles réalisations, soit des bourses qui doivent permettre aux lauréats de mener leurs recherches de qualité une étape plus loin. Pour certains prix ou bourses, l’objectif est aussi d’encourager certaines catégories de la population vers des carrières scientifiques.
« Avec nos bourses « For Women in science » (FWIS), allouées tous les deux ans à de jeunes chercheuses afin qu’elles puissent réaliser leur doctorat, nous voulons montrer que la recherche est aussi une affaire de femmes », indique Brigitte Bekaert, de la société L’Oréal. « Nous souhaitons aussi donner plus de visibilité à ces jeunes femmes. Montrer que c’est possible, quand on est une femme, de faire une belle carrière en sciences ».
Faciliter la mobilité
Avec sa plate-forme pour l’Éducation et le Talent, la Fondation Boël-Sofina offre des bourses de mobilité internationales allant de 6 à 12 mois pour les doctorants. « Ces bourses sont attribuées en fonction de la plus-value qu’un séjour à l’étranger peut apporter à la qualité des recherches du ou de la scientifique qui en bénéficie », précise Framboise Boël, membre du Comité de suivi de la Plateforme.
« De leurs côtés, les Fonds Baillet Latour, initiés en 1974 par le Comte Alfred de Baillet Latour, encouragent la recherche scientifique d’une valeur exceptionnelle », indique Guy van Wassenhove, Conservateur du Fonds Baillet Latour.
Ces bourses et prix (le FNRS en gère chaque année une vingtaine pour le compte de mécènes privés), constituent pour les chercheurs qui en bénéficient de coups de pouce bienvenus, une belle reconnaissance scientifique pour la qualité de leurs travaux et parfois aussi de tremplin pour la suite de leur carrière ou de leurs recherches.
Pousser la recherche une étape plus loin
« C’est certainement une récompense », estime le Pr Miikka Vikkula, chercheur en génétique moléculaire humaine à l’UCLouvain, et lauréat du « Generet Award 2018 ».
« Cette récompense pour le groupe lui offre une plus grande visibilité. Cela est important lors de la recherche de nouveaux moyens financiers pour assurer la suite de nos travaux », poursuit-il.
Et d’ajouter, « quand le prix est doté d’un financement conséquent, cela nous permet aussi d’aller directement de l’avant, d’aller plus loin dans nos recherches, de poser de nouvelles questions, plus difficiles ».
« La recherche, c’est un sport d’équipe, une aventure collective et multidisciplinaire », confirme le Pr Anthony Clève, chercheur en sciences de l’informatique à l’UNamur et lauréat du Prix IBM Belgium 2010. « Même si le prix qui nous est attribué est un prix personnel, il constitue aussi un outil de notoriété, qui bien souvent permet d’ouvrir de nouvelles portes ».
Reconnaissance par les pairs et un plus sur le CV
« En ce qui concerne la carrière du chercheur, ces prix constituent aussi des labels d’excellence, des reconnaissances par les pairs », explique la Dre Bénédicte Machiels, chercheuse en immunologie-vaccinologie à l’ULiège et lauréate du Prix Eugène Yourassowsky en 2012.
« Ces prix sont décernés sur base de commissions scientifiques. Ils constituent donc aussi une partie importante d’un CV de chercheur », dit-elle.
« Ce critère est effectivement pris en compte par les commissions scientifiques », confie la Pre Martine Raes (UNamur), qui a siégé dans de multiples commissions de ce genre au FNRS. « Quand nous avons à trancher entre deux ou trois projets classés comme excellents pour un financement, ce genre de prix dans le CV peut faire pencher la balance en faveur du candidat primé. C’est un label d’excellence de plus pour le dossier ».
Une large diversité de thématiques de recherche récompensée
Pour en revenir à la question initiale de cette rencontre, « les prix sont-ils la cause ou la conséquence de l’excellence scientifique? », la Secrétaire générale du FNRS, la Pre Véronique Halloin estime qu’il existe en réalité deux types de prix. « S’il s’agit d’une récompense, alors clairement, il s’agit de souligner avec ce prix l’excellence scientifique du chercheur », dit-elle.
« Si le prix à pour vocation de financer un projet, nous sommes alors à cheval entre les notions de cause et de conséquence. Ce type de prix permet de prendre des risques, de financer un projet risqué. Un risque qui n’est toutefois pris que s’il s’agit d’un chercheur dont les qualités sont déjà appréciées ».
Et plus spécifiquement concernant ces « FNRS awards », Mme Halloin est catégorique. « Grâce à ces prix provenant de différents types de mécènes, nous touchons aussi a de multiples thématiques de recherche. Une diversité et une richesse que nous n’aurions sinon peut-être pas ».