Se réorienter après un décrochage dans l’enseignement supérieur

26 avril 2024
par Laetitia Theunis
Durée de lecture : 5 min

Redonner un cap aux étudiants en situation de décrochage scolaire. C’est l’objectif de « ReBOND », le service personnalisé de réorientation mis en place par le pôle académique de Namur. Créée en 2003 au sein de la Faculté des sciences de l’éducation et de la formation de l’UNamur, la formation a aidé quelque 1071 jeunes à redéfinir un plan de vie et d’études qui correspond à leurs aspirations, à leurs compétences et à leurs valeurs. Autrement dit, à rebondir.

Les raisons du décrochage sont souvent multiples. « Parmi les étudiants participant à ReBOND, il y a ceux pour lesquels les études ne correspondent pas à leurs attentes : ils sont déçus, le contenu des cours ne leur plaît pas. Il y a ceux qui ne se voient pas réaliser le ou les métiers sur lesquels débouchent leurs études. Il y a aussi celles et ceux qui aiment leurs études mais ils n’y arrivent pas faute de bagage scolaire nécessaire », explique Johan Tirtiaux, conseiller en réorientation à l’UNamur.

Apprendre à se connaître

Deux sessions s’ouvrent par an et accueillent en tout une septantaine de jeunes qui ont décidé d’arrêter leurs études en cours et veulent se réorienter. La première court de février à début juin, et la seconde d’avril à fin juin.

« La formation ReBOND se donne en, respectivement, 20 à 15h de cours par semaine. Dans le cadre du séminaire « projet », une demi-journée par semaine est consacrée au travail sur la connaissance de soi via des tests psys, des photos de mises en situation professionnelle, des noms de métiers. On va aussi inviter des professionnels en présentiel. On se plonge également dans les listes d’études reprenant l’éventail disponible. Et ce, pour, à la fois, réfléchir, mettre des mots sur soi, et s’ouvrir à tous les possibles. En effet, les jeunes qui viennent à la formation ReBOND sont généralement dans le flou, perdu et indécis quant à leur avenir », poursuit Johan Tirtiaux.

« C’est un travail en profondeur avec des personnes qui ont, souvent, un profil atypique. Ils ont fait un premier choix et ont abandonné en cours d’année, même parfois après deux voire trois ans. Certains sont en bac2 ou bac3 et sont devenus non finançables à cause leur parcours académique chaotique. D’autres ont déjà essayé 2 ou 3 orientations différentes, en vain. On peut également avoir des étudiants qui ont très peu d’autonomie, un capital social ou culturel très faible. Certains souffrent de dépression … »

Ouvrir le champ des possibles

« En parallèle du séminaire « projet », il y a les rendez-vous de réorientation. Des personnes spécialisées viennent présenter le large panel de formations disponibles en Belgique : universités, hautes écoles, écoles supérieures des arts, mais aussi IFAPME, promotion sociale, police, armée, SNCB, etc. L’idée, c’est de s’ouvrir à différentes options possibles. »

Les jeunes sont encouragés à aller assister durant un ou deux jours à des cours en élèves libres. Discuter avec des élèves du programme de première année pour en savoir davantage sur le contenu des cours, sur la façon dont les travaux pratiques sont menés, sur les points de difficulté, sur le bagage scolaire à avoir pour entreprendre ce type d’études.

« 73% des étudiants inscrits à ReBOND en 2018 et 2019 qui ont entamé des études à l’issue de leur formation ReBOND, ont réussi la première année», mentionne Gentiane Boudrenghien, coordinatrice de la formation ReBOND.

Un autre axe exploité dans ReBOND est la réalisation de mini-stages d’observation de 1, 2 ou 3 jours auprès d’un professionnel dont le métier semble intéressant ou attirant pour le jeune. « Photographe ? Infirmière ? Ingénieur architecte ? On se démène pour trouver un professionnel qui accepte de recevoir le jeune et de lui faire découvrir concrètement son métier. La dimension d’exploration est cruciale. Certains jeunes reviennent déçus de cette immersion professionnelle et décochent ce métier de leur liste des possibles, d’autres sont ravis. Et pour valider leur choix, il arrive que certains demandent de réinvestiguer le même métier auprès d’un autre professionnel », poursuit Johan Tirtiaux.

Pas pour les rhétos

A noter que la formation ReBOND, sauf exception, n’est pas accessible aux élèves de rhétos qui hésitent quant à leur futur.

« En Belgique, le modèle est linéaire. Les étudiants ne peuvent pas toujours, comme c’est le cas au Danemark par exemple, prendre le temps de construire leur projet d’études après les secondaires. Au sortir de la rhéto, le supérieur s’impose comme une évidence l’année qui suit, même s’ils n’ont pas de réel projet. »

Certains d’entre eux choisiront une option qui ne leur convient pas et se retrouveront à la table de ReBOND l’année suivante.

Une mise au point au 1e quadri

Si le décrochage scolaire de l’étudiant a lieu avant les examens de janvier, l’université de Namur a mis en place le dispositif MAP, pour Mise Au Point. Cela consiste en 5 séances collectives de réorientation données en soirée entre fin novembre et fin décembre, et en un suivi individuel.

« Pour les étudiants en premier Bac, le décret Paysage permet de changer d’études au cours de l’année. L’objectif de MAP, qui utilise des outils similaires à ReBOND, est de leur permettre de prendre les informations nécessaires, et d’aller réaliser leur second quadrimestre dans un autre bachelier », ajoute Johan Tirtiaux.

Il est important de préciser que les universités et hautes écoles en dehors du pôle académique de Namur disposent aussi généralement d’une structure de réorientation, avec leurs spécificités propres. Ainsi, citons la « formation-relais » à Louvain-la-Neuve. « Accroche » à HELMo (Liège). « Je rebondis » à HELHa. « Relance » pour le pôle académique Liège-Luxembourg. Et « ReStart » au pôle académique de Bruxelles.

Haut depage