Les légumes des potagers urbains sont sains

27 décembre 2017
par Christian Du Brulle
Durée de lecture : 4 min

L’agriculture urbaine s’inscrit dans une dynamique globale. Un exemple ? Depuis cet automne, une chaine de supermarchés a décidé de s’inscrire dans ce mouvement. Elle a lancé en Belgique un premier potager urbain sur le toit d’un de ses magasins. Cela se passe à Ixelles, en région Bruxelloise. L’initiative poursuit divers buts, notamment favoriser la fraîcheur maximale de certains de ses légumes vendus un étage plus bas, mais aussi mettre en place un circuit ultracourt entre le producteur et le consommateur.

Mais quel est le degré de salubrité de ces légumes produits au milieu d’immeubles dotés de systèmes de chauffage ou de conditionnement d’air ? Et quel est l’impact de la pollution routière sur ces légumes ? Et quels autres services écosystémiques ce type de culture en toiture peut-elle apporter à son environnement urbain ? C’est ce qu’a voulu savoir une équipe de chercheurs. Ses résultats sont surprenants.

Des salades et des tomates cerises

Christine Aubry et ses collègues de l’Institut des sciences et industries du vivant et de l’environnement (AgroParisTech), n’ont pas analysé les légumes produits sur le toit du supermarché bruxellois. L’initiative en Belgique n’a que quelques mois. Leurs travaux ont porté sur divers végétaux cultivés depuis deux ans sur les toits parisiens de leur institution.

Au rythme des saisons, des cultures de salades (Lactuca sativa), de tomates cerise (Lycopersicum esculentum var. cherry) et d’engrais verts (Trifolium incarnatum et Secale cereale) se sont ainsi succédé dans des bacs en bois (90 cm x 90 cm x 40 cm) espacés de 50 cm disposés en toiture.

Bons rendements et recyclage des déchets verts urbains

Les scientifiques ont mis en évidence que les niveaux de production de leurs bacs étaient comparables voir supérieurs à ceux de jardins familiaux en pleine terre (entre 4,4 et 6,1 kg/m² par saison de culture) et proches de ceux des maraîchers professionnels en agriculture biologique de la région.

Ils ont aussi constaté que les rendements étaient peu différents entre les trois types de sols (des « technosols ») testés. Ces sols étaient composés, pour les deux premiers, pour moitié de compost de déchets verts et de bois broyé issus de l’entretien d’espaces verts urbains. L’un était inoculé avec des vers de terre et l’autre non. Le troisième sol correspondait à un terreau d’origine commerciale, utilisé comme témoin au cours de l’expérimentation. Aucun apport de fertilisants minéraux n’a été réalisé: seule la biodégradation des déchets organiques fournit les nutriments aux plantes. Un constat toutefois, le sol constitué de déchets urbains étant aussi (voire plus) productif que le terreau.

Peu de métaux lourds dans les légumes 

Les chercheurs parisiens ont également observé que ces trois types de sol retenaient plus des trois quarts des eaux de pluie incidentes, contrairement à des toits nus et que les teneurs en métaux lourds (Cd, Cu, Pb, Zn et Hg) des légumes étaient largement inférieures aux normes.

Bien entendu, les déchets organiques utilisés se sont dégradés et ont libéré progressivement leurs éléments constitutifs. Le bilan des éléments entrant (eau de pluie et d’arrosage) et sortant du système (eau de drainage) a encore apporté une information intéressante aux chercheurs. Les « technosols » retiennent plus de nitrate qu’ils n’en rejettent, par contre, ils libèrent plus de carbone dissous dans les eaux de drainage que le terreau.

Voilà de quoi sans doute intéresser les responsables de l’expérience pilote menée sur le toit du supermarché bruxellois. Doté d’une toiture potagère de 360 mètres carrés occupée pour moitié par une serre et pour l’autre par des cultures en plein air, on y a cultivé cette fin d’année cinq variétés de salades (salade de blé, pourpier, baby leaf, asian mix, cresson). D’autres légumes, entre autres des tomates, des aubergines, des courgettes, devraient y prendre l’air dès l’année prochaine. Avec autant voire plus de goût que les légumes cultivés de manière plus classique ? Cela, l’étude parisienne n’en fait aucune mention…

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